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J’ai testé pour vous: Dire oui à tout pendant une semaine
«Apprendre à dire Oui va changer votre vie.» Voilà ce que promet la couverture du livre écrit en 2015 par Shonda Rhimes et publié en français aux éditions Marabout, début 2017. Ce roman pétillant aux incessants rebondissements nous invite à suivre la brillante créatrice des séries «Grey’s Anatomy» et «Scandal» dans un quotidien étonnant, le temps d’un récit autobiographique rempli d’humour.
Résumé
Légèrement lassée de son train-train de working-mum overbookée, l’héroïne se lance un incroyable défi: celui de dire «oui» à tous les challenges qui se présenteront à elle, lors d’une année qui changera radicalement son existence. Dès lors, hors de question de refuser une invitation, de jouer la discrétion en fuyant le tapis rouge ou d’éviter les bains de foule… Peu à peu, cette grande timide va retrouver des parts d’elle-même dont le passage du temps lui avait fait oublier l’existence. Une lecture amusante et inspirante; si inspirante que nous avons voulu tester la formule magique du «Oui»…
© Editions Marabout
Et si j’essayais..?
Tiens, me suis-je dit en découvrant le titre; cela me rappelle le film «Yes Man» avec l’hilarant Jim Carrey… J’avoue que l’idée de me transformer en «Yes Woman» durant ce qui ne serait pas une année, mais une semaine du «Oui» me paraissait potentiellement riche en leçons de vie… et puis, surtout, irrésistiblement comique.
Or, autant préciser tout de suite qu’avant de relever le défi, j’ai établi quelques exceptions indispensables à ma survie: le mot «Non» me serait formellement interdit, mais je préservais évidemment le droit de refuser toute proposition dangereuse ou indécente qui pourrait m’être faite au cours du périple (nous, nous comprenons, n’est-ce pas?)… Les règles du jeu établies, je me suis lancée.
Lundi: Dire oui… aux tâches ménagères
Heureusement pour moi, la grande majorité de mon entourage ignore qu’à partir d’aujourd’hui, je n’aurai le droit de lui refuser quoi que ce soit. La semaine commence tranquillement, rythmée par les «pourrais-tu sortir les poubelles?» les «ça t’embête d’aller me chercher un café» et les «tu as le temps de changer la litière du chat?»; le genre de demandes banales que je m’attendais à acquiescer tout sourire pendant sept jours de suite (ce qui ne change a-bso-lu-ment pas de d’habitude, je vous le promets!)
Mardi: Dire oui… à toutes les soirées
Mardi matin, j’acquiesce sans broncher lorsqu’on me demande «tu viens à la fête 80s?» et «tu serais d’accord de te déguiser?» Plutôt satisfaite de ce programme, je reprends espoir en la semaine du Oui. Mais lorsque s’en suivent trois autres propositions pour le même soir, je commence légèrement à pâlir. Décidément, mes copines sont particulièrement motivées cette semaine. Dépassée par les événements, je noircis mon pauvre agenda, et me dis que j’ai intérêt à prendre des vitamines tous les matins…
Mercredi: Dire oui… à tous les entraînements sportifs
«On va courir dix kilomètres, après le travail?» Mon visage reste impassible, mais mon cerveau honnit silencieusement la syllabe «Oui». Pourquoi fallait-il que cette question soit aussi précise?! Je me dirige vers mes chaussures de course et me persuade toute seule qu’un peu de cardio ne me fera pas de mal. Une fois rentrée, le teint dangereusement proche du violacé, je me félicite intérieurement et me réjouis de prendre une douche glaciale: ce fut le moment précis que choisit une autre amie pour m’envoyer un WhatsApp dégoulinant d’enthousiasme: «Ça te dit, une séance de Pilates, dans une demi-heure?» Bon, ben la douche attendra…
Jeudi: Dire oui… aux plats les moins appétissants
«Tu ne voudrais pas essayer ce dessert?» Sans parvenir à retenir un froncement de nez, je toise l’assiette qu’on me propose d’entamer. Mais attendez une seconde, il n’inspire absolument pas confiance avec sa consistance visqueuse, venu d’une contrée lointaine où les palais sont certainement plus raffinés que les nôtres (passez-moi donc un McFlurry!) Finalement, il est très bon. Enfin, un peu… Oui, bon, disons juste que je suis très fière d’avoir tout mangé.
Le soir même (lors d’un dîner beaucoup trop chic que je n’eus point la possibilité de décliner), on me demande «Tu veux goûter?» Je lève les yeux de mon risotto pour regarder la fourchette sur laquelle pendouillent les tentacules de ce qui ressemble fortement à une pieuvre miniature. Une chose est sûre: pour dire Oui à tout, il faut être prêt à tenter de nouvelles expériences (ahem…).
Vendredi: Esquiver pour ne pas dire Oui...
Déjà épuisée à 21h, après deux apéros et deux afterworks, j’arrive à la fameuse soirée 80s, vêtue comme ma mère à vingt ans (après m’être changée en coup de vent dans les toilettes d’un restaurant…). A ce moment-là, le secret devient trop lourd à porter. Je dévisage mes copines, la mine déconfite, et prononce la phrase qu’il n’aurait jamais fallu prononcer: «Cette semaine, je dois dire oui à tout.» Bien évidemment, et comme j’aurais dû m’y attendre, cette information ne tombe pas dans l’oreille de sourdes. Elles échangent quelques regards malicieux et je devine déjà ce qu’elles s’apprêtent m’infliger: Trois… Deux… Un… «Monsieur? Vous ne voudriez pas offrir un verre à mon amie, par hasard?»
Samedi: Dire oui… à tout
Loin de l’espace protecteur du bureau, je m’aventure dans la foule distraite du week-end, légèrement angoissée, mes écouteurs enfoncés dans les oreilles (oui, j’avoue, je triche). «Mademoiselle, je travaille pour telle association, auriez-vous cinq minutes?» Oui, évidemment que j’ai cinq minutes. «Madame, voudriez-vous essayer notre nouvelle lotion anti-âge aux orties?» Oui, naturellement que je le veux. «Excusez-moi, je suis perdu, auriez-vous le temps de me montrer la station de tram la plus proche?» Oui, sans aucun problème, je vous y mène. Qu’on ne prétende plus jamais que les gens dans la rue fuient le contact: tout le monde vous parle. Il suffit juste d’écouter.
Dimanche: Morale de l’histoire
Place à l’épiphanie de fin de semaine: je réalise enfin quelque chose. Avant de devenir «Yes Woman», j’utilisais déjà bien souvent ce petit mot magique. En y réfléchissant bien, les «Oui» forcés ont été étonnamment peu nombreux et ne m’ont pas traumatisée du tout. Ai-je découvert des recoins cachés de ma personnalité? Pas vraiment. Sauf si l’on compte une nouvelle et intense passion pour le Jazz en live («Tu m’accompagnes à ce concert, s’il te plaît? m’avait lancé une amie. J’ai flashé sur le saxophoniste!»)
Peut-être faut-il s’imposer une semaine du Oui pour réaliser l’importance du Non. Certainement en avais-je besoin pour comprendre que l’essentiel n’est pas de tout accepter, mais d’accepter ce que l’on veut, tout en envoyant valser sans culpabilité ce qui ne nous enchante pas. Evidemment, il ne s’agit pas de dire Non à tout, mais bien d’accepter ce qui nous permet de quitter notre zone de confort, d’enrichir notre culture et notre expérience du monde. Tant que l’on parvient à faire cela, le Non est un luxe qu’il faudrait que je m’octroie plus souvent. Bon allez, dès lundi je commence la semaine du Non! (Et prions pour que personne ne me demande en mariage…)
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