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Renouer avec les planches m’a redonné la joie de vivre

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Il ne restait plus que six semaines à Annie pour mettre en place son «seule en scène».

© Guillaume Perret/lundi 13

J’ai découvert le théâtre au gymnase

La première fois que je suis montée sur scène, je me suis sentie étonnamment à l’aise. Comme si j’étais à la maison. Et ce sentiment n’a cessé de se renforcer au fil des trois années de cours. J’étais sûre d’avoir trouvé ma voie: je serai comédienne! Mais quand j’ai annoncé à mon professeur de théâtre – que j’admirais – mon souhait d’en faire mon métier, sa réaction m’a prise de court: plutôt que de m’encourager, il a tenté de me dissuader, affirmant qu’il n’était pas possible de gagner sa vie avec cette activité. Quelle douche froide!

Persuadée d’être faite pour brûler les planches, j’ai passé outre la mise en garde et me suis inscrite aux examens d’entrée du Conservatoire d’art dramatique de Lausanne. Seule ma sœur aînée et ma meilleure amie étaient dans la confidence. J’ai préparé une scène d’«On ne badine pas avec l’amour», d’Alfred de Musset, qui évoquait l’inconstance des hommes et la vanité des femmes – certainement pas un hasard puisque, aujourd’hui, j’exerce comme coach et médiatrice de couple.

Le jour J, ma sœur m’a conduite en voiture vers ce que je croyais être ma destinée. Devant un jury de professionnels, j’ai livré ma prestation. Qui n’a apparemment pas convaincu, puisque j’ai été recalée! Grosse déception. Apparemment, la comédie n’était pas pour moi; il me fallait passer à autre chose. De toute façon j’avais 20 ans, l’avenir s’offrait à moi.

Et le tourbillon de la vie n’a pas tardé à m’emporter. J’ai goûté à différentes expériences professionnelles, avant de partir en séjour linguistique à l’étranger, d’y rencontrer celui qui allait devenir mon mari et le père de mon fils, et de m’installer aux Etats-Unis.

Et le théâtre m’a rattrapée

C’est à 30 ans que, à la suite de déboires conjugaux, je suis rentrée à Bienne. Là, les relations humaines m’ayant toujours passionnée, j’ai entrepris une formation de médiatrice dans le cadre de ma nouvelle activité professionnelle. Cela m’a amenée à travailler sur moi, et à réaliser… à quel point je ne m’aimais plus. Mon estime de moi était tombée au plus bas.

Le choc a été salvateur. J’ai décidé de me reprendre en main et de redevenir la jeune femme pétillante et pleine de vie que j’avais été. C’est en établissant une liste des choses qui me rendent heureuse que le théâtre est revenu au premier plan. Ni une ni deux: j’ai intégré une école de théâtre amateur qui proposait une formation. Au sein de la troupe d’élèves de tous âges, j’ai renoué avec le plaisir de fouler les planches. Trois ans plus tard, je décrochais mon diplôme de comédienne en présentant une série de portraits de femmes d’après des nouvelles de Lucia Etxebarria. Les rires ont fusé lorsque j’ai joué, avec l’accent espagnol, le «dialogue» désopilant d’une lesbienne avec son chien.


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Jouer en public

Dans ma to do list – celle des choses à réaliser avant de mourir – figurait la note «écrire une pièce de théâtre». Devenue entre-temps thérapeute de couple et de famille, j’avais écrit une pièce dont le personnage central était une psy. Mais je sentais qu’il me fallait accoucher de quelque chose de plus personnel… Et une déception amoureuse a été le déclencheur: une nuit, l’inspiration m’est venue. Elle ne m’a plus quittée pendant plusieurs semaines. Je me suis mise à coucher sur le papier les doutes existentiels d’une femme en quête d’amour véritable et ses interrogations sur les relations ô combien compliquées entre les hommes et les femmes – comme je le constate tous les jours dans mon cabinet de thérapeute. Les mots venaient de mes tripes et de mon cœur. Si les messages que j’avais envie de transmettre étaient sérieux, je voulais qu’en même temps le ton soit léger et que l’on puisse en rire.

Ensuite, à peine achevée la rédaction d’«Amour, glace et bon thé», je n’ai plus eu qu’une hâte: jouer ce one-woman-show pour un public. Encore fallait-il trouver un lieu. Je me suis alors rappelé une petite salle de café-théâtre, à Neuchâtel, sur laquelle j’avais flashé quelques années plus tôt. Je m’étais dit qu’un jour je jouerais là. J’ai donc contacté le gérant, et je lui ai demandé si je pouvais m’y produire… un mois et demi plus tard. Le 19 juin, précisément – date importante pour moi, car mon frère revenait alors de l’étranger. Mon enthousiasme devait être communicatif car, même sans dossier de présentation, il a accepté de me programmer.

Mon baptême du feu

Il me restait à peine six semaines pour mettre en place mon «seule en scène» d’une heure. Une folie! Mais j’étais prête à relever le défi. J’ai travaillé d’arrache-pied. J’ai sollicité le metteur en scène de mon école de théâtre pour qu’il me donne son avis sur le filage du spectacle. Sa réaction positive m’a rassurée: même s’il restait plein de petits détails à ajuster, j’étais sur la bonne voie.

Et le jour fatidique est arrivé. Je n’en menais pas large. J’étais paniquée et n’avais qu’une envie: tout annuler. Impossible bien sûr, d’autant qu’on affichait complet.

Mon baptême du feu devant une salle pleine à craquer – et sous les yeux de mes frère et sœur – s’est déroulé à merveille. Tout le monde se marrait. Un carton!

Par la suite, les gens en ont redemandé. Ils avaient aimé, ils en voulaient encore. Alors j’ai donné une deuxième représentation, trois mois plus tard. Puis j’ai enchaîné avec d’autres dates en Suisse romande. Et ça fait plus d’un an que ça tourne... Je suis la première surprise par ce succès! Mon spectacle semble toucher le cœur des gens. Alors je ne compte pas m’arrêter là: je suis en train de le traduire en «schwyzerdütsch» afin de le présenter à Bienne en 2017. J’imagine que mon accent de «Welsche» renforcera encore l’effet comique.

Grâce à la comédie, non seulement j’ai renoué avec la jeune fille pleine de vie que j’étais à 20 ans, mais je suis devenue une femme qui s’aime inconditionnellement. Et c’est ma plus belle victoire.

Prochaines dates d’«Amour, glace et bon thé» sur One Women Show.

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