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«J’ai mixé au Berghain, le club le plus renommé du monde»

Jai mixe au berghain le club le plus renomme du monde

NVST a mixé dans de nombreux clubs en Suisse, mais également à l'international, notamment lors d'une tournée en Amérique du Sud, en Chine et au Japon.

© LA FÊTE DU SLIP

Quand j’ai appris que j’allais jouer au Berghain, j’ai pleuré. C’était beaucoup d’émotions, car cela représente une consécration après beaucoup de travail acharné et de sacrifices. Je suis vraiment très fière d’en être arrivée là, en tant que femme avec des origines algériennes, car on sait que la scène de la musique électronique reste encore dominée par des hommes blancs. Cela m’a procuré beaucoup d’émotions de me dire que j’avais réussi à dépasser le plafond de verre, même si le parcours était long et difficile. Ça me fait aussi très plaisir de pouvoir apporter de l’espoir aux futures générations, car on manque encore de représentations féminines et non-blanches parmi les DJs.

C’est encore difficile de réaliser que c’est bel et bien arrivé, mais le soir en question, j’ai vraiment vécu une communion intense avec le public. Une vingtaine d’ami-e-s ont fait le déplacement et cela m’a beaucoup touché d’avoir ma communauté présente et de pouvoir partager cette soirée tous et toutes ensemble. Si je ne devais retenir qu’un seul moment, je parlerais de la fin de mon set. J’ai joué la musique algérienne de DJ Snake, Disco Maghreb. Elle s’inspire de chants raï très populaires, et de l’entendre au Panorama Bar – la salle du Berghain où j’ai joué – c’était vraiment incroyable. J’ai senti que parmi le public, il y avait d’autres personnes de la communauté maghrébine qui ont explosé de joie, c’était bouleversant et symboliquement très fort.

Une boucle temporelle

Comme de nombreux amoureux-euses de la musique électronique, le Berghain tient une place importante dans ma vie. C’est en grande partie là-bas que j’ai forgé ma culture musicale, tout comme dans les raves où j’ai beaucoup traîné mes baskets. Ce lieu a clairement eu une influence sur l’artiste que je suis devenue. Je l’ai découvert quand je suis partie vivre à Berlin à 19 ans et je n’aurais jamais pensé que j’y jouerais un jour. Finalement, c’est arrivé, pile dix ans plus tard. J’ai d’ailleurs eu une pensée émue pour la personne que j’étais à l’époque durant mon set.

C’était encore plus incroyable d’avoir pu être programmée au Berghain pour une soirée de bass music (jungle, drum and bass…), nommée «REEF», et non pour de la techno, car ce n’est pas le style que je joue. En effet, quand on pense au Berghain, on pense tout de suite à la techno, mais c’était aussi très émouvant d’entendre résonner des classiques de la jungle sur une sonorisation connue comme l’une des meilleures au monde. Il faut aussi noter que la techno est devenue très commerciale, le public ne sait même plus d’où ça vient, il a oublié que cette musique a été créée à la base par la communauté noire et ouvrière de Détroit pour rassembler les minorités. C’est un aspect important qui se perd malheureusement, même au Berghain.

Devoir d’exemplarité

Cette date marquante me ramène aussi au chemin parcouru. J’ai commencé à mixer dans les raves il y a six ans et les deux premières années, je jouais vraiment presque exclusivement dans des fêtes illégales. Ça m’a ouvert musicalement et j’ai aussi toujours eu un pied du côté de l’activisme. Puis, j’ai commencé à avoir plusieurs dates dans des clubs officiels, dans toute la Suisse et à l’étranger. Finalement, j’ai été repérée par l’agence Bi:Pole en France et maintenant je suis chez Octopus, une importante agence basée à Amsterdam. Tout s’enchaîne désormais. Cette année, j’ai notamment fait une tournée en Amérique du Sud, au Japon et en Chine et j’ai pu signer un morceau sous le label du Trésor, autre club légendaire de Berlin.

Même si j’ai l’impression que c’est allé plutôt vite, c’était compliqué de me faire ma place. J’ai dû jouer des coudes, m’imposer et parfois, j’en ai pris plein la gueule. Je trouve vraiment difficile, car en tant que femme ou personne de couleur, on sent qu’on n’a pas le droit à l’erreur. C’est comme si on avait un devoir d’exemplarité et c’est quelque chose qui pèse quand on se construit en tant qu’artiste, mais aussi en tant que personne.

Ce que je recherche dans le monde de la nuit et les clubs, ce sont des espaces les plus safe possibles, inclusifs et accueillants pour tout le monde. Et pour que les choses changent, il ne suffit pas de mettre des femmes sur les line-up, ce qu’on voit en effet de plus en plus. Il faut aussi des femmes et des minorités qui travaillent aux autres postes dans les boîtes de nuit, comme ceux et celles qui prennent des décisions. En Suisse romande, on est très loin de ça et c’est vraiment dommage. Le monde va mal et c’est important de pouvoir se retrouver pour se soigner collectivement et danser tous et toutes ensemble en harmonie.

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