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Toutes les questions qu’on se pose sur les fantasmes

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L’idée directrice du fantasme n’est pas de le rendre possible dans la vraie vie, mais d'abord de générer de l’excitation.

© Audrey Shtecinj / Stocksy

Il paraît que la période estivale est particulièrement généreuse côté libido, ainsi qu’en projets de réalisation de certains fantasmes. S’enlacer sur une plage, ou dans l’eau, tenter un plan à trois, le faire dans une voiture… mais au fait, pourquoi telle ou telle idée nous émoustille plutôt qu’une autre? La concrétiser peut-il déboucher sur une expérience inoubliable? On explore ces brûlantes interrogations avec deux spécialistes du sujet.

Un fantasme sexuel, c’est quoi?

L’étymologie du mot actuel découle de fantaisie, terme qu’on utilisait d’ailleurs jusqu’au XIXe siècle pour désigner une scène sexuelle qu’on se représente mentalement. Avec l’avènement de la psychanalyse, le sens se précise. «Dans la théorie freudienne, le fantasme est avant tout quelque chose de refoulé, une envie que la conscience ne s’autorise que peu à penser, car elle heurte trop le sujet par sa dimension transgressive, explique Philippe Brenot, psychiatre et thérapeute de couple, auteur de Pourquoi c’est si compliqué l’amour? (Ed. Les Arènes). Avec le temps, toutefois, de façon populaire, le fantasme est devenu synonyme de désirs un peu scénarisés et sortant de l’ordinaire, se détachant du concept de refoulement.»

La littérature contemporaine en sexologie admet désormais comme fantasme «toute pensée érotique déclenchant ou soutenant l’excitation sexuelle, fait remarquer Laurence Dispaux, sexologue et chroniqueuse pour Femina. Il est l’une des composantes constitutives de notre vie sexuelle.» Un souvenir érotique, une scène de film, un scénario précis… le fantasme doit cependant être distingué du souhait, précise la spécialiste, car on peut fantasmer sur telle ou telle chose sans nécessairement avoir envie qu’elle se réalise un jour.

Comment naissent-ils?

Freud, encore lui, révolutionna la pensée scientifique avec ses Trois essais sur la théorie de la sexualité, publiés en 1905, révélant l’existence de pulsions sexuelles très précoces, dès le plus jeune âge. L’Autrichien parle ainsi de fantasmes originaires, qui peuvent se constituer au fil des premières expériences émotionnelles et sensorielles.

«Les fantasmes tendent à se construire en au moins deux temps, note Laurence Dispaux. Une partie se développe assez tôt. Ils s’élaborent d’abord en fonction des premières expositions à du matériel érotique, puis subissent l’influence des préoccupations personnelles intrapsychiques. Nos expériences peuvent faire évoluer certaines thématiques aux dépens d’autres.

Si on a l’envie très forte de se sentir désirable, par exemple, on a de grandes chances de développer un univers fantasmatique où on suscite un immense désir chez quelqu’un. Un sujet habité par une certaine agressivité pourra, lui, mettre en place des fantasmes avec l’idée de domination ou d’acte vigoureux.»

A quoi ça sert?

Pour les hommes? «Pas à grand-chose, sourit Philippe Brenot. Leurs fantasmes s’apparentent davantage à des souhaits et sont souvent réalisables. Faire l’amour dehors près d’un feu de camp, dans un ascenseur, avec deux partenaires… d’ailleurs, souvent, ils les réalisent. Ici, la prise de risque existe, mais elle reste faible.» En revanche, chez les femmes, ce sont plus fréquemment de véritables fantasmes, au sens psychanalytique du terme, puisque faisant plus souvent appel à un refoulement, avec une notion de transgression plus marquée.

«On rencontre chez elles beaucoup plus de fantasmes comprenant une dimension onirique et des scénarios les rendant peu ou pas du tout réalisables, observe Philippe Brenot. D’ailleurs, l’idée n’est pas de les rendre possible dans la vraie vie, mais plutôt de générer de l’excitation. Certaines femmes sont davantage dans la sensation, mais beaucoup font appel à ces fantasmes et à cette dimension onirique pour faire monter leur désir.»

Quels sont les plus fréquents?

La diversité de leurs configurations est a priori infinie, pourtant, «la plupart tournent autour de quelques thématiques récurrentes», souligne Laurence Dispaux. Pour ces messieurs, c’est notamment l’idée de la performance qui sort du lot, avec les fantasmes impliquant plusieurs partenaires ou des personnes a priori difficiles à conquérir. Pour les femmes, nombre de fantasmes tournent autour de la notion de grande désirabilité de leur corps.

Une tendance qui s’exprime souvent par le biais d’un imaginaire à première vue dérangeant, relève Philippe Brenot: «Le premier fantasme féminin, montrent les études sur la question, c’est celui du viol. Evidemment, ces femmes ne rêvent pas de vivre un rapport sexuel sous la contrainte dans la réalité, il s’agit seulement de se sentir tellement désirable que l’autre ne pourra pas se contrôler. Dans ces fantasmes, elles ne sont d’ailleurs pas forcées par le premier mâle venu, mais par un homme lui aussi très désirable et excitant. En fait, plutôt qu’un viol, on peut dire que c’est davantage un ravissement par un prince charmant, qui va rester doux et sensuel. Encore une fois, attention, on est là face à un vrai fantasme, à distinguer du souhait, dans le sens où, servant à l’excitation, il n’est pas destiné à se concrétiser.»

Peut-on les réaliser?

«Cette question a été l’un des leitmotivs des rubriques sexo dans les années 90, fait remarquer Philippe Brenot. La psychanalyse tend à répondre qu’il vaut mieux ne pas les réaliser, car cela mènerait à épuiser le réservoir des désirs et des imaginaires boostant l’excitation. Ce qui est faux, on le sait maintenant: même en les concrétisant, on en a encore, d’autres fantasmes émergeant au cours des expériences de la vie.»

Cependant, un risque existe, celui que le fantasme devenu réel ne soit pas à la hauteur de sa version mentale en termes de potentiel d’excitation. «Beaucoup de facteurs sont occultés dans les fantasmes, comme l’odeur corporelle de l’autre, sa personnalité… ce qui peut conduire à vivre une expérience déstabilisante, voire pas si agréable dans la réalité, constate Laurence Dispaux. Là, le scénario si émoustillant peut vite se casser la figure et arrêter de fonctionner comme une source d’excitation. Le risque est aussi de vouloir le répéter encore et encore en espérant que la satisfaction arrive enfin, en vain.»

Faut-il en parler à son partenaire?

«Confier ses fantasmes à quelqu’un peut amener davantage d’intimité avec lui et enrichir le sentiment d’appartenance du couple, notamment lorsque la seule évocation du scénario est source d’excitation, mais pas toujours, prévient Laurence Dispaux.

Certes, beaucoup de personnes ont finalement des fantasmes assez tranquilles mais, parfois, ils s’avèrent surprenants, créant une incompréhension et mettant à mal la perception que le partenaire avait de nous - surtout si l’autre croit que l’on tient absolument à les réaliser.»

Plutôt qu’émoustiller, cela peut donc refroidir l’ambiance. «Le problème avec les couples qui se disent tout, c’est que cette transparence permanente peut stériliser la vie sexuelle, avance Philippe Brenot. Ne pas tout dire, ce n’est pas cacher. Il faut veiller à conserver une part de soi pour soi, car un équilibre personnel est meilleur pour la vie sexuelle. Au fond, les fantasmes sont comme les rêves, on n’est pas obligé de les partager. L’érotisme se nourrit d’une part d’inconnu, d’imaginaire, de clair-obscur. En revanche, si ces fantasmes sont plutôt dans la catégorie de quoi j’ai envie, alors les expliquer peut permettre de mieux orienter les gestes vers telle ou telle préférence, pour un ajustement pendant l’acte qui s’approche au plus près de ce qu’on désire.»

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