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Féminisme

Angela Davis poursuit sa lutte contre les inégalités

Angela Davis toujours militante HANS LUCAS ANTONIN WEBER

Pour Angela Davis, les choses sont au fond assez simple: quelles qu’en soient les bases, toute forme de domination ou de discrimination est inacceptable.

© HANS LUCAS/ANTONIN WEBER

En 1970, Angela Davis a 26 ans. Marxiste revendiquée, militante du Mouvement américain des droits civiques, féministe et membre des Black Panther - parti révolutionnaire qui s’inspire des écrits de Frantz Fanon et de Malcolm X -, elle est poursuivie et jugée pour complicité d’assassinat. Ce qui pourrait lui valoir la peine capitale.

Or, voilà que ce qui aurait pu n’être qu’une affaire politique américano-américaine franchit les frontières: forte du soutien des milieux intellectuels et artistiques français, dont Jean-Paul Sartre et Jean Genet, puis des Rolling Stones ou de John Lennon et Yoko Ono, cette brillante philosophe devient rapidement le symbole mondial de la résistance à l’oppression des minorités, l’icône de la lutte contre les inégalités. Un statut qu’elle n’a jamais souhaité, dit-elle, soulignant que

«c’est le mouvement qui devrait susciter l’admiration, pas moi!»

Il n’empêche, l’image lui colle à la peau.

Si bien qu’aujourd’hui, à 80 ans, sa popularité est toujours aussi grande, son aura aussi puissante. La preuve une fois encore le samedi 16 mars 2024, à Genève, quand, invitée par le Festival du film et forum international sur les droits humains (FIFDH), les centaines de personnes de tous âges et tous horizons réunies au Théâtre Pitoëff pour la voir et l’entendre lui font un véritable triomphe, galvanisées par la force de ses propos.

Contre toutes formes de domination

Car le temps n’a pas émoussé sa combativité. Loin s’en faut. Au fil des décennies, si Angela Davis a affiné certaines positions, notamment sur l’homosexualité (elle a d’ailleurs fait son coming out en 1998), elle en a radicalisé d’autres. Quitte à susciter des polémiques - comme en 2019, avec son soutien à une campagne internationale qui demandait le boycott d’Israël, ou son engagement contre l’interdiction du port du voile en France il y a une vingtaine d’années. En clair, toujours révolutionnaire dans l’âme, la charismatique professeure de philosophie et théoricienne de l’intersectionnalité des luttes ne lâche rien. Ainsi sur la police, dans son viseur du jour, par exemple.

Le ton doux, le regard intense, celle qui a consacré sa vie à l’antiracisme, au féminisme, à l’abolition de la prison, ou au moins à l’amélioration des conditions carcérales, à la lutte contre les violences policières et à la critique du capitalisme explique: «Tout comme nous nous en remettons à la prison pour les questions de criminalité et de punition, nous nous en remettons à la police pour les questions de sécurité et de sûreté. Pourtant… Imaginons ce que pourrait signifier une conception différente de ces questions spécifiques. On ne peut pas prévenir la violence par la violence, cela se joue à d’autres niveaux!» Lesquels?

«Déjà, il faudrait des écoles, des soins et des logements pour tous et toutes, une société et un «vivre ensemble» repensés dans leur intégralité…»

Avec calme mais conviction, elle poursuit: «Pour prévenir les problèmes, nous devrions réfléchir à d’autres types de solutions plutôt que de compter sur des institutions d’hommes armés qui, dans le cadre même de leur mission, sont les seuls à pouvoir garantir la sécurité des personnes et de notre monde…»

Et quid des questions féministes, qu’elle lie intrinsèquement au racisme systémique et au capitalisme? Elle est là encore limpide: un authentique mouvement de libération doit lutter contre toutes les formes de domination. Toutes. Point final!

Croire en un monde différent

Autant dire que le chemin est encore long – même si une conscience collective sur toutes les problématiques qui lui tiennent à cœur s’est (un peu) développée depuis son enfance passée dans une Alabama ségréguée et «ku-klux-klanisée». Mais Angela Davis ne désespère pas:

«À quelque niveau que ce soit, quand nous luttons contre le racisme, les séquelles du colonialisme, le capitalisme, l’homophobie et le sexisme, c’est parce que nous croyons qu’un monde différent est possible.»

«Et cet engagement génère de l’espoir. Pour nous-mêmes mais aussi pour les générations futures…»

Bio express

1944 Naissance en janvier à Birmingham, en Alabama. Ses parents sont professeur-e-s. C'est dans son enfance, par ailleurs heureuse, qu'elle découvre ce que racisme et ségrégation signifient. Elle en sera profondément marquée.

1962-1965 Études en philosophie et en littérature, en partie en France et en Allemagne. Brillante, elle développe parallèlement sa conscience politique et devient marxiste.

1969 Adhère au Black Panther Party. En 1970, après avoir été traquée pendant deux mois par le FBI, arrestation pour avoir fourni une arme ayant servi à une prise d’otages.

1972 Acquittée après 22 mois passés en prison, elle entre à l’Université de Californie comme professeure d'«histoire de la prise de conscience». Parallèlement, devenue une icône internationale de la lutte contre les discriminations, elle publie des essais, fait des tournées mondiales de conférences et milite sur tous les fronts.

1980 et 1984 Candidature à la vice-présidence américaine aux côtés du leader du Parti communiste Gus Hall.

2012 Retraite académique. Mais guerrière sans repos, elle ne cesse pas de militer.

À l'issue de sa discussion genevoise, chaleureuse, souriante et disponible, elle signe des autographes, dédicace des livres, a un mot gentil...©DR
À l'issue de sa discussion genevoise, chaleureuse, souriante et disponible, elle signe des autographes, dédicace des livres, a un mot gentil... © DR


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