Voyage: Les vacances entre femmes sont de plus en plus prisées

La pandémie de coronavirus s’éloigne tout doucement et les horizons, eux, se rapprochent de nouveau. Déjà très présent avant l’ère Covid, le voyage entre femmes a la cote. Décryptage du phénomène avec Émilie Straub, directrice marketing et communication de la plateforme Copines de Voyage, créée en 2016, qui permet aux candidates au départ de se mettre en contact et d’organiser leur odyssée entre elles.

FEMINA Comment est née l’idée de lancer un tel concept?
Émilie Straub À l’origine, ce sont deux hommes trentenaires français, alors basés aux États-Unis, qui cherchaient une idée pouvant faire la différence dans le marché très concurrentiel du tourisme. Il se trouve que les deux avaient des mamans seules. Elles désiraient voyager mais rencontraient des problèmes pour s’organiser, se projeter, elles ne se voyaient pas vraiment partir sac au dos et leurs copines n’étaient pas facilement disponibles. L’idée de connecter entre elles toutes ces femmes afin de leur permettre de voyager ensemble s’est alors imposée, en pensant intéresser principalement les seniors. Mais dans les faits, la plateforme a finalement attiré tous les âges.

Les femmes ont-elles de plus en plus envie de voyager par elles-mêmes?
Je crois que ce désir a toujours été là. Cependant, avec l’évolution de la société ces dernières décennies, elles sont de plus en plus autonomes et les opportunités de partir augmentent. Pour elles, voyager est une façon de s’évader, de prendre de la distance avec leur quotidien chargé.

Se dégage-t-il des profils dans les utilisatrices de la plateforme?
Les femmes entre 25 et 45 ans sont aujourd’hui le cœur de cible du site, avec la forte présence des jeunes trentenaires, même si les seniors sont également demandeuses. On observe une part importante de personnes célibataires, mais il y a aussi le profil de mamans, ou de femmes divorcées qui profitent de la garde alternée pour voyager. Dans certaines situations, les utilisatrices sont en couple, mais leur partenaire n’a pas le temps ou pas le souhait de partir, craint de prendre l’avion ou n’a pas les mêmes goûts en termes de destination ou de type de voyage. Et elles ont décidé que cela n’allait pas constituer un obstacle à la réalisation de leurs rêves.

Pourquoi voyager en groupe plutôt qu’en solo?
Il est vrai qu’aujourd’hui, avec l’offre digitale qui permet d’acheter facilement un billet d’avion et de réserver des logements, il est assez aisé de partir seule. Mais voyager en solitaire exige de connaître la langue locale, ou du moins d’être à l’aise avec l’anglais, il faut également être plutôt sociable, oser aller vers les inconnus, ce qui n’est pas le cas de tout le monde.

On n’oubliera pas non plus la composante sécuritaire. En ce domaine, les problématiques sont globalement les mêmes qu’il y a quinze ans, sauf qu’on en entend peut-être davantage parler. C’est vrai que pour certaines destinations, être une femme seule peut apporter des désagréments. Or les voyageuses n’ont pas envie d’être agressées ou chahutées, elles veulent pouvoir se détendre, ne pas être stressées ou sur leur garde en permanence.

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Quels types de voyages privilégient les utilisatrices?
La plateforme était très orientée circuits et long-courriers juste avant le Covid, avec un engouement historique pour Bali. Cette destination a été fermée aux touristes pendant plus de deux ans et n’a rouvert qu’en juin 2022. Pour autant, on n’assiste pas à un grand retour en grâce de Bali dans les souhaits de voyage. Les utilisatrices continuent néanmoins de vouloir explorer l’Asie, notamment le Sri Lanka et le Vietnam, destinations très dépaysantes et favorables pour les budgets limités. Lorsqu’elles envisagent d’aller loin, les femmes s’adressent à nous pour des pays qu’elles n’auraient pas arpentés seules.

L’ère Covid a-t-elle modifié d’autres comportements?
Le volume s’est beaucoup réorienté vers les moyen-courriers. Les utilisatrices tendent plutôt à choisir les destinations classiques du bassin méditerranéen, la Grèce, l’Espagne et même la France. La part de séjours est d’ailleurs de plus en plus importante: l’idée est de loger dans le même hôtel mais de faire des activités qui rayonnent autour de l’établissement.

On observe également que le comportement lors des réservations a changé. Les utilisatrices tendent de moins en moins à réserver en avance et privilégient l’organisation à la dernière minute. Il y a sans doute l’envie d’une certaine spontanéité, de flexibilité, mais aussi la peur de se projeter avec toutes les incertitudes de l’époque. Le problème est qu’il demeure préférable de booker suffisamment tôt ses billets d’avion pour profiter de tarifs intéressants.

Cette plateforme participe-t-elle à créer des liens entre voyageuses?
On le constate tous les jours. 30% des nouvelles utilisatrices refont un voyage avec nous. Beaucoup de femmes créent des liens très forts et deviennent amies. Elles se revoient en dehors, repartent entre elles par leurs propres moyens ou rebookent un voyage via notre site de manière à partir ensemble. Le fait que les groupes soient de taille modeste, 3 ou 4 au minimum et 10 ou 12 au maximum, contribue à entretenir quelque chose de convivial. C’est un effectif qui permet généralement de toutes manger à la même table, par exemple.

J’ai vu des cas où telle voyageuse est devenue maman et a demandé à l’une des participantes de devenir la marraine de l’enfant. On entend également des histoires où des utilisatrices qui ont pu voyager ensemble ont créé un groupe WhatsApp à leur retour et s’écrivent tous les jours. Il y a un fort besoin de sororité aujourd’hui et le voyage y répond.