culture
Le podcast féministe Tea Room s'offre un festival à Fribourg
L'initiatrice du festival Tea Room, Vanessa Cojocaru, anime également le podcast du même nom, enregistré en live à Fribourg depuis 2020.
© JULIEN JAMES AUZANVous prendrez bien une tasse de féminisme, le temps d'un week-end? Tea Room, c'est le projet transdisciplinaire initié par la Fribourgeoise Vanessa Cojocaru, qui allie réflexions féministes et milieux culturels romands sous la forme d'un podcast. Après huit éditions de talk shows enregistrés en direct depuis 2020 - avec des personnalités telles que la rappeuse KT Gorique, l'illustratrice Nidonite ou encore la chanteuse Flèche Love - discussions suivies de performances d'artistes montantes de la scène suisse, la fondatrice Vanessa Cojocaru propose pour la toute première fois un festival sur trois jours, du 28 au 30 avril 2023, à l'espace culturel Le Nouveau Monde à Fribourg.
«Pour célébrer ce projet qui tisse des liens précieux à Fribourg et au-delà, entre des artistes, des personnalités et le public, on a voulu investir tout le bâtiment du Nouveau Monde, là où le podcast est enregistré, proposer une programmation plus riche et explorer des champs artistiques variés», explique Vanessa Cojocaru.
Pourquoi «tea room»? «Ce nom évoque l'ambiance intimiste que j'ai souhaité pour le podcast, afin que les invitées puissent se livrer confortablement. Il représente aussi les espaces dans lesquels on se retrouve entre amies pour se confier», poursuit la productrice.
«Historiquement, les tea rooms sont également des lieux fondateurs notamment pour l'indépendance économique des femmes.»
Une initiatrice engagée
Graphiste de formation, Vanessa Cojocaru s'est éveillée aux luttes féministes après #MeToo, lorsque des podcasts français ont émergé sur cette thématique. «J'étais obnubilée par La Poudre, Kiff ta race et Les Couilles sur la table, que j'écoutais religieusement au travail. Je me suis engagée quand j'ai entendu parler de l'organisation d'une grève en Suisse en 2019 et j'ai mis mes compétences professionnelles à contribution au sein du collectif Grève féministe Fribourg.
J'ai senti que l'année 2019 était un tournant historique, et je voulais faire partie de cette révolution. Malheureusement, il manquait des espaces d'échanges en Suisse qui débattait des enjeux sociaux, économiques et politiques de notre pays avec une perspective féministe. C'est pourquoi j'ai lancé mon podcast, que j'ai voulu transdisciplinaire, car je intéressant de faire des ponts entre les milieux culturels et les luttes féministes, raconte Vanessa Cojocaru. J'ai commencé avec Odette Vetter, première femme à avoir couru le Morat-Fribourg. Puis le projet s'est étendu, avec des collaborations et un public qui vient parfois de Genève ou du Valais.»
Programme: expo, concert, marché et table ronde
Au programme de ce week-end féministe et festif, la valorisation des groupes minorisés dans la culture et la société, et l'échange autour de diverses pratiques artistiques.
Exposition collective
Exclusivement pour le Tea Room festival, des artistes romandes ont chacune imaginé une affiche sur le thème du féminisme, disponible sur place à la vente sous forme d'impressions en risographie en édition limitée. Les illustratrices invitées? Alice Izzo, Dat Biche, Fifille, Ginevra Mandelli, Hélène Becquelin, Kokito, Louiza, Madame Marilou, Michèle Reymond et Nidonite. L'exposition collective sera accompagnée de textes sélectionnés avec soin par l'association Les Semaines de la Lecture.
Vernissage vendredi 28 avril 2023 à 18 h 30 à l'aile est du Café de l’Ancienne Gare. Expo accessible durant le festival, de 10 h 00 à 19 h 00 le 29 avril et de 10 h 00 à 17 h 00 le 30 avril 2023. Entrée libre.
Marché de créateur-trice-s
Une douzaine de stands seront également installés au Café de l'Ancienne Gare, pour proposer des créations d'artisan-e-s du coin ou des livres. Parmi les créateur-trice-s présent-e-s, Bloom, la boutique en ligne dédiée à la santé sexuelle, le collectif PoinGt et ses broderies, les céramiques de Fanfary ou de Tethys, les objets de déco de Tape-Tapis et Tisane Froide, ou encore quelques ouvrages de la librairie engagée L'Art d'Aimer.
De 10 h 00 à 19 h 00 le 29 avril et de 10 h 00 à 17 h 00 le 30 avril 2023, à l'aile est du Café de l’Ancienne Gare.
Ateliers podcast
Deux ateliers pour soutenir la création de podcasts locaux seront également proposés. Samedi 29 avril 2023, de 10 h 30 à 12 h 00, la productrice du podcast féministe Décharge, Sarah Gay-Balmaz, animera un workshop visant à dépasser le syndrome d'imposture, en partageant sa propre expérience et en délivrant ses précieux conseils. Ainsi, les participant-e-s apprendront les outils nécessaires à la création de leur propre émission audio.
Le 30 avril 2023, de 10 h 30 à 12 h 00, un second atelier autour de la neutralité journalistique sera animé par Kaziwa Raim, productrice du podcast féministe et antiraciste L'InConfortable. La journaliste indépendante abordera avec le public la question d'inclusion des personnes racisées dans la société et la légitimité de la parole des groupes minorisés.
Ces ateliers sont proposés à prix libre (conseillé 15 fr.). Inscription par e-mail à info.tearoom@gmail.com.
Performances artistiques
Le festival offre aussi plusieurs performances et un concert. La percussionniste nyonnaise Béatrice Graf, aux projets musicaux atypiques et aux multiples collaborations avec des artistes issus d'univers musicaux différents, présentera son one woman band le 29 avril 2023, de 15 h 45 à 16 h 30 dans la salle du Nouveau Monde.
De son côté, la performeuse et chorégraphe bernoise Anna Chiedza Spörri, qui fusionne danse contemporaine, hip hop et poésie, questionnera la notion d'identité à travers le corps et les mots. Elle sera accompagnée d'un collectif de danseuses et se produira le 30 avril 2023, de 15 h 45 à 16 h 30 dans la salle du Nouveau Monde.
Enfin la chanteuse lausannoise Billie Bird vernira son premier album très attendu Incendies - sorti le 10 mars 2023 - lors d'un concert exceptionnel le 29 avril, de 21 h 00 à 23 h 30 dans la salle du Nouveau Monde. L'artiste à la synthpop audacieuse, qui s'est déjà produite au Paléo ou au Cully Jazz, sera accompagnée sur scène par des guests, dont Julie Hugo, Lakna et Louise Knobil, ainsi que des invité-e-s surprises.
Table ronde politique
Finalement, les événements phares de cette première édition du Tea Room festival sont une table ronde divisée en deux volets. Lors de ces discussions animées par Vanessa Cojocaru, des invité-e-s endosseront le rôle de conseiller-ère-s fédéraux-les et proposeront leurs idées politiques pour une Suisse plus égalitaire. Parmi les convives, Caroline Dayer, spécialiste des questions d’homophobie et de transphobie, Loïc Valley, artiste et pédagogue, Saoussen Hammami, membre du collectif Les Foulards violets, Natasha Stegmann, présidente de l’association Mille Sept Sans, Lakna, chanteuse, et Catherine Friedli, membre du collectif Grève féministe Fribourg.
Billetterie en ligne pour les performances et la table ronde
Mêler joie et luttes féministes
«L'événement à ne pas manquer est sans doute cette table ronde en deux parties, annonce avec enthousiasme Vanessa Cojocaru. J'ai imaginé un concept suite à notre épisode avec Aurélie Cuttat et Christine Gonzalez au sujet de leur podcast Voyage au Gouinistan: en introduction, j'ai récité un poème inspiré d'un texte de Zoe Leonard qui dit "I want a dyke for president".
«Mon adaptation était "Je veux une gouine comme conseillère fédérale". Le lendemain de la publication de ce poème sur Instagram, l'UDC Ueli Maurer annonçait sa démission. Un signe?», glisse la productrice.
«Cette idée m'est restée en tête et je me suis dit que ce serait drôle d'incarner un nouveau gouvernement. Six personnalités engagées vont donc se projeter dans le rôle d'un-e conseiller-ère fédéral-e en quête de solutions, peut-être utopiques ou très concrètes, nous verrons!»
Par cet événement, et toute la programmation du festival, Vanessa Cojocaru veut montrer que les messages politiques et militants peuvent être joyeux, et que le féminisme ce n'est pas seulement se plaindre et pointer du doigt les dysfonctionnements.
«Fribourg est une petite ville encore conservatrice, et j'aimerais que le Tea Room festival attire un public large pour prouver qu'il y a aussi de la joie dans les luttes», conclut la fondatrice.
Pour celles et ceux qui ne pourraient pas se rendre à Fribourg, les deux volets de la table ronde seront retransmis en tant que prochains épisodes du podcast Tea Room, diffusés d'ici l'été 2023. Dans cette attente, deux épisodes enregistrés au mois de mars sont en cours de préparation et devraient bientôt être disponibles sur les plateformes d'écoute.
