Femina Logo

Musique

Diana Adamyan, toutes les couleurs du violon

Violoniste Diana Adamyan Ozawa Academy Nicolas Lieber 1

«Je suis née dans une famille de musiciens, mes parents sont tous les deux violonistes. Le violon a ainsi été une partie de moi dès le tout début de ma vie.»

© NICOLAS LIEBER

Elle est une poétesse du son, et son charisme limpide, sans artifices, a quelque chose de désarmant. Mais ne vous y fiez pas trop, car Diana Adamyan est aussi une guerrière de catégorie homérique lorsqu'il le faut. À 23 ans, la musicienne arménienne a en effet déjà remporté une bonne partie des plus prestigieuses compétitions internationales de violon, des concours où, pourtant, toute la crème planétaire des jeunes prodiges vient y donner son coup d'archet.

Au printemps 2018, elle décrochait ainsi le premier prix du Concours Menuhin, à Genève, dans la catégorie «seniors» des 16-22 ans. Une victoire qui revêt un sens spécial pour elle.

«Depuis que je suis petite, Yehudi Menuhin fait partie des deux violonistes que je vénère le plus. La profondeur du son qu'il produit, son timbre, sa musicalité, vont droit au cœur des personnes qui l'écoutent.»

Deux ans plus tard, les performances soniques de Diana faisaient de nouveau des miracles au point de gagner la Khachaturian International Competition. Dans des conditions, de surcroît, plutôt particulières à cause de la pandémie: millésime 2020 oblige, les auditions s'étaient déroulées en visio. Une configuration de concert à distance qui n'a pas désarçonné la violoniste.

Un algorithme est devenu fan d'elle

Et même lorsqu'elle ne conquiert pas la première place du podium grâce à un jury constitué d'humains, elle peut quand même être la lauréate pour d'autres types d'«oreilles», comme lors de cet étonnant épisode du concours Sibelius en 2022. On y voit Diana Adamyan arriver seconde après les délibérations du jury, qui lui a de justesse préféré le jeune Sud-Coréen Inmo Yang. Sauf que les organisateurs avaient prévu une petite surprise pour la fin: une intelligence artificielle allait elle aussi donner son jugement sur les prestations des candidats.

L'IA ne débarquait pas de la dernière pluie, des spécialistes du violon et le chef d'orchestre Sakari Oramo l'avaient minutieusement programmée, notamment en lui donnant à écouter les meilleures versions connues du concerto pour violon de Jean Sibelius – l’œuvre sur laquelle les participants étaient évalués – ainsi que des interprétations bien moins réussies, donnant à l'IA les notions de ce qui fait une grande version de ce tube de la musique classique.

Et là, coup de théâtre: considérant par exemple la clarté et la qualité du son, la maîtrise du rythme et la coopération de l'interprète avec l'orchestre, l'intelligence artificielle avait déclaré Diana Adamyan gagnante de la compétition, contre l'avis du jury de chair et d'os. Ce qu'il faut en déduire ici, c'est que même un algorithme n'a pu manquer la relation fusionnelle entre Diana et cet instrument, sa profonde compréhension de la musique et des partitions, de même que son intelligence émotionnelle pour donner toute sa beauté à une œuvre en compagnie d'autres musiciens.

Son premier violon en plastique

Histoire d'amour éperdue avec le violon qui a commencé avant même qu'elle sache lire, dans sa ville natale d'Erevan, en Arménie.

«Je suis née dans une famille de musiciens, mes parents sont tous les deux violonistes, raconte-t-elle. Le violon a ainsi été une partie de moi dès le tout début de ma vie.»

Très vite, l'instrument est devenu un objet de fascination pour elle. «Petite fille, je montrais beaucoup d'intérêt pour lui quand mon père ou ma mère jouaient. J'adorais le son qu'ils produisaient. Mes parents l'ont remarqué et ont fini par m'acheter, vers deux ou trois ans, un violon rose avec un archet jaune qui était plus un jouet qu'un vrai instrument. Mais j'étais tellement heureuse de posséder mon propre violon! Comme je ne m'en détournais pas avec le temps, ils m'en ont alors donné un véritable vers l'âge de cinq ans, et ce fut le début d'une longue épopée avec lui. C'est également à ce moment que j'ai eu mes premiers cours.»

Trajectoire ascendante

D'ailleurs, encore aujourd'hui, au-delà des compositeurs et des violonistes mythiques qui l'ont inspirée dans sa formation, ce sont ses parents qui demeurent ses références. «Ils sont mes premiers modèles! Ils n'ont pas pu faire une grande carrière personnelle, mais ils ont apporté énormément de soutien, déployé beaucoup d'efforts et fait preuve d'une grande implication dans mon parcours de musicienne comme dans celui de ma sœur Alina (elle aussi violoniste concertiste, NDLR). Ils ont passé des années et des années à nous aider à nous améliorer et à réaliser de grands pas en avant dans notre art.»

Cette alchimie familiale a porté ses fruits. Premier prix en concours à l'âge de dix ans. Formation de haut vol à l'Académie Tchaïkovsky d'Erevan puis à Munich. Diana est actuellement l'un des plus grands espoirs du violon classique, avec toutes les qualités pour suivre les traces d'une Julia Fischer ou d'une Hilary Hahn, superstars du violon de ces dernières années.

Son secret pour sa réussite? La passion. Et le travail, bien sûr, avec ce lot de longues heures quotidiennes passées à dompter l'instrument, à en explorer la moindre faculté d'expression. Mais il y a peut-être autre chose encore: elle est peintre.

Car lorsqu'elle ne joue pas avec son fidèle compagnon, la jeune virtuose s'immerge dans les toiles et les pinceaux, son autre amour, maniant d'autres nuances, d'autres plastiques que celles du son. Voilà peut-être ce qui fait la recette secrète de ses interprétations sur scène: «J'ai commencé à peindre en même temps que j'ai appris à jouer du violon, et depuis, cela a toujours fait partie de ma façon de concevoir la musique.

Mentaliser des couleurs, des images, débusquer des détails magnifiques, souligner des beautés à travers le timbre, les nuances, sont parmi les choses les plus incroyables qui puissent se faire en tant que musicien selon moi.»

La musique avant toute chose

Diana Adamyan fera d'ailleurs prochainement démonstration de son art en Suisse, cet été 2023, à la Seiji Ozawa International Academy Switzerland, avec des concerts organisés le 6 juillet au château de Rolle, le 9 juillet au Genève Victoria Hall et le 10 juillet à la Fondation Gianadda. La violoniste a su, comme en 2019, passer avec succès le concours donnant accès à cette académie exigeante créée par le chef japonais. Elle interprétera le sublime quinzième quatuor à cordes de Schubert en compagnie de trois autres musiciens de sa génération. Elle sera également premier violon dans l'ensemble jouant les Métamorphoses de Richard Strauss. Des œuvres intenses et introspectives loin de toute esbroufe.

«J'ai perpétuellement en tête la phrase du metteur en scène et professeur d'art dramatique russe Konstantin Stanislavski: Aime l'art dans toi, et pas toi dans l'art», confie-t-elle. Humble mais au service de la musique, Diana Adamyan semble parfaitement incarner cette philosophie.

Plus d'informations

Nicolas vous suggère de lire aussi:

Podcasts

Dans vos écouteurs

E94: Les bienfaits du jeu vidéo sur notre épanouissement

Dans vos écouteurs

Tout va bien E89: Comment mieux comprendre nos rêves

Notre Mission

Que faire pendant le temps libre? Inspirez-vous des coups de cœur loisirs, des repérages séries, des bonnes adresses, des idées voyages de Femina.

Icon Newsletter

Newsletter

Vous êtes à un clic de recevoir nos sélections d'articles Femina

Merci de votre inscription

Ups, l'inscription n'a pas fonctionné