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«Dark Waters», le film qui donne envie d’en finir avec sa poêle

«Dark Waters», le film qui donne envie d’en finir avec sa poêle

Mark Ruffalo incarne Robert Bilott, l’avocat qui a poursuivi le géant chimique DuPont pour avoir empoisonné l’eau de toute une région.

© Focus Features

Mon premier réflexe, dès l’apparition du générique de fin du film «Dark Waters»? Appeler mon mari, lui demander de ne SURTOUT PAS réchauffer, cuisiner ou rôtir quoi que ce soit dans une poêle pour nourrir notre fils. Parano, moi? Difficile de ne pas l’être en sortant de la projection. Car le film réalisé par Todd Haynes raconte une histoire vraie, celle d’un empoisonnement massif de toute une région des États-Unis par l’industrie qui a mis au point le téflon.

Comédien, activiste et producteur

À l’initiative du long-métrage, on retrouve l’acteur et activiste environnemental Mark Ruffalo. Ce dernier incarne Robert Bilott, l’avocat qui a poursuivi le géant chimique DuPont pour avoir empoisonné l’eau de Virginie du Sud. «Dark Waters» s’inspire directement d’un article paru dans le «New York Times» en 2016: «The lawyer who became DuPont’s worst nightmare» («L’avocat qui est devenu le pire cauchemar de DuPont»).

La molécule chimique pointée du doigt? Le PFOA, ou acide perfluorooctanoïque. Ce dernier a été utilisé jusqu’au début des années 2000 pour fabriquer les poêles en téflon. Extrêmement persistant dans l’environnement et nocif pour ce dernier, il est invisible et se trouve désormais partout sur la planète ainsi que dans 99% des êtres vivants, comme l’explique le «New York Times»:

«Si vous êtes en train de lire cet article, vous avez déjà du PFOA dans le sang. C’est dans le sang de vos parents, le sang de vos enfants, le sang de votre amant. Comment est-il arrivé là? Par les airs, par l’alimentation, par l’utilisation d’ustensiles de cuisine antiadhésifs, par le cordon ombilical. Ou vous avez peut-être simplement bu de l’eau contaminée.»

Influençant le système immunitaire et cancérigène possible, l’acide sera interdit dans l’Union européenne dès le 4 juillet 2020 et en Suisse une année plus tard. «Et depuis 2011, les tests démontrent que les poêles n’en dégagent plus, rassure Barbara Pfenniger, responsable alimentation au sein de la Fédération romande des consommateurs (FRC). Son cousin, le PFOS, connaît un usage limité depuis 2006. Et les études démontrent que la molécule est toujours détectée dans le sang des enfants, mais sa quantité diminue.»

Mais la vigilance reste de mise, puisque le PFOA est présent sous d’autres formes dans les cartons en revêtement anti-graisse (notamment les pop-corn à faire au micro-ondes), certains traitements anti-tâches et autres vêtements imperméables. Que les amateurs de maïs soufflé se rassurent, «il est tout à fait possible de réaliser soi-même ses propres pop-corn, en utilisant simplement un récipient en verre qui résiste à la chaleur ainsi qu’un couvercle», recommande Barbara Pfenniger. Un zeste de beurre ou d’huile et le tour est joué!

600 molécules chimiques en libre circulation

«Dark Waters» se termine sur un constat anxiogène: si le PFOA est désormais réglementé, plus de 600 molécules chimiques circuleraient dans la nature sans être régulées. «Ce chiffre ne m’étonne pas, commente l’experte. Il y a beaucoup de substances utilisées par l’industrie dont on ignore les effets sur le long terme. De notre point de vue, la législation va bien trop lentement. On devrait faire davantage de tests avant d’approuver ou non l’usage d’un matériau sur le marché. Car la bioaccumulation est un réel danger.» La FRC exige que tous les matériaux en contact avec des denrées alimentaires soient mieux réglementés. «Il y a certaines zones grises qui devraient être améliorées, notamment vis-à-vis des emballages, ustensiles, poêles, etc.»

Remplacer ses ustensiles en téflon par des modèles en fonte peut se révéler une bonne alternative, mais elle n’est pas réalisable dans tous les cas (les poêles sont lourdes et leur revêtement n’est pas anti-adhésif).

La céramique ou «téflon green» est une autre option, «mais cela reste un mélange, met en garde Barbara Pfenniger. Le plus important est ensuite de ne pas surchauffer les aliments ou de faire brûler la graisse.»

Pour Yann Berger, chimiste cantonal de Neuchâtel, il n’est pas nécessaire de bannir totalement le téflon de sa cuisine, mais de prendre soin de ses ustensiles. «Afin de ne pas détériorer le revêtement, il ne faut pas surchauffer les poêles, leur infliger un choc thermique (passage directement sous l’eau froide après la cuisson par exemple) ni utiliser d’instruments en métal. Le non-respect de ces règles provoque la dégradation du revêtement et, dans le cas d’une surchauffe importante, la formation de gaz.»

Après avoir découvert «le plus grand crime commis par une entreprise, courant sur 50 ans et dont personne ne savait rien», Mark Ruffalo a modifié toutes ses habitudes. Il utilise désormais un filtre perfectionné pour traiter son eau et a cessé d’acheter ses vêtements de sport favoris, car ils contenaient du PFOA. Et s’il a produit «Dark Waters», c’est parce que «cette histoire d’horreur actuelle doit être racontée au plus grand nombre, a-t-il expliqué au «Telegraph Herald». La connaissance, c’est le pouvoir.»

«Dark Waters» de Todd Haynes avec Mark Ruffalo et Anne Hathaway, en salles dans les cinémas de Suisse romande dès le 26 février 2020.

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