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Viticulture

Témoignage: Elle se lance dans la production de vin géorgien

Temoignage les vins georgiens racontent le partage

L’objectif de l'entrepreneuse Mariam Garcia? Faire un vin géorgien, né de pratiques ancestrales et artisanales, en Suisse.

© MAGALI DOUGADOS

Mariam Garcia est née en Suisse, il y a moins de trente ans, dans un quartier des hauts de Lausanne, mais ses racines courent sur tout le continent, de l’Espagne, du côté de son père, à la Géorgie, par sa mère. Le premier a longtemps été à la tête d’une entreprise de carreleur, il travaille aujourd’hui comme éducateur, tout comme sa mère, qui s’appelle Nino, un des noms de femmes les plus fréquents en Géorgie. Le couple s’est rencontré là-bas et, tout de suite, il y a eu coup de foudre. Les amoureux avaient l’intention de s’y installer mais la situation politique les a poussés sur les rives du Léman. En Suisse, Nino a commencé par donner des cours de russe avec l’accent de Géorgie comme une nique au pays oppresseur.

Cette histoire compte pour Mariam. Mais comment la faire vivre et en faire quelque chose pour sa propre vie? Elle suit des cours d’histoire contemporaine, de géographie et de russe à l’Université de Fribourg. Elle passe six mois à Saint-Pétersbourg. «J’ai suivi ces cours pour comprendre l’histoire de la Géorgie et la relation qu’elle entretenait avec la Russie. Rien ne nous lie, rien n’est semblable, si ce n’est la colonisation dont nous avons été victimes. Nous les Géorgiens, nous ne sommes pas slaves.»

Après son bachelor, Mariam ouvre un bar avec une amie à Genève, dans l’association Bongo Joe, dans les Halles de l’Île, au bord du Rhône. L’endroit est très fréquenté, il fait office de magasin de vinyles et des concerts y sont organisés deux fois par semaine. Elle aime cette activité, accueillir les gens. «Cela fait dix ans que je fais ça, il y a un aspect social que j’adore».

Tradition et savoir-faire

Mais voilà que sans que les choses se disent, le parcours de Mariam – histoire contemporaine avec un focus sur la Géorgie et gestion de bar – débouche sur une évidence. «J’ai toujours voulu travailler dans le domaine du vin. J’ai donc fait des cours d’œnologie à l’Université agraire de Tbilissi, pour comprendre les techniques de vinification. Parce que les premières manifestations de vinification ont été repérées en Géorgie, grâce à des traces trouvées sur les amphores.

Les amphores qu’on appelle Qvevri en géorgien sont les plus vieilles technologies de vinification.

Elles sont en argile, faites manuellement, et le savoir-faire se transmet de père en fils. Grâce aux fines parois de l’argile, il y a une microporosité qui fait que le vin respire.»

Mariam décide donc d’abord d’importer le vin de son pays, des productions issues de vigneronnes et de vignerons qu’elle connaît et qui se sont lancés dans le vin nature (ndlr: ce qui veut dire sans intrants œnologiques). Avec son compagnon Julien, qui est le fondateur de «Chien bleu», une marque de cidres, bières et vins suisses vendue et exportée dans le monde (Chine, Corée, Canada), ils ouvrent un bar qui est aussi un local de production de boissons. L’endroit se trouve dans le quartier des Charmilles et au moment où nous discutons, les étudiants de la Head, l’école d’art de Genève, y passent en grappes.

On goûte le vin géorgien qu’elle nous propose et c’est une merveille (ndlr: l'abus d'alcool est dangereux pour la santé). «Ce vin est né non loin de la mer en Iméréthie. Les terres sont riches en minéraux. C’est moins ensoleillé que la Kakhétie, la région des grands domaines et qui donne des vins plus riches, plus lourds. Le producteur est un vieux monsieur qui fait ce métier depuis des années. Les autres vins de mon pays sont produits par des personnes que je connais et qui sont des amis. En Géorgie, la tradition du partage et de l’accueil est très forte. J’ai envie de faire connaître tout ça ici en Suisse.»

Au bar du «Chien bleu»

Mais Mariam ne compte pas s’arrêter là. Désormais, quatre amphores de 500 litres chacune viennent d’arriver de Géorgie. Mariam s’apprête à les planter dans le jardin de ses parents, à Bois-Gentil, sur les hauts de Lausanne. «Il faut faire un grand trou de deux mètres pour les enterrer. Il y a plusieurs techniques. La plus ancienne consiste à mettre le raisin directement dedans, avec la gravitation et la macération, le vin naît, puis on le retire avec une pompe. Une de mes amies qui est toute fine entre directement dans l’amphore pour nettoyer ensuite les parois, moi je vais avoir de la peine… Je vais privilégier la deuxième technique qui consiste à laisser macérer les raisins une courte période à l’extérieur, avec les peaux, puis à presser le jus et à le mettre dans l’amphore. Il y reste une ou deux années. Plus on laisse le vin, plus il se stabilise.

L’objectif est donc de faire un vin géorgien, né de pratiques ancestrales et artisanales, en Suisse!

Ce n’est pas évident. La technologie n’est pas stable. Personne n’a réussi à la commercialiser!»

L’aventure commence donc pour la jeune entrepreneuse, dans le bar où elle vend les vins de son pays, avec un nouveau site qui permet aux personnes intéressées de l’acheter et, dans quelques mois, avec la production mystère qui sortira de ses amphores. «J’ai donné à mon entreprise le nom de ma grand-mère, Lali. Ainsi je concilie mes choix professionnels, mes racines géorgiennes, le goût du partage et de l’accueil», dit en souriant la jeune femme.

Lali-vin.ch; le bar «Chien bleu», rue de Bourgogne 29, Genève.

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