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Consommation d'alcool

Témoignages: Des Romand-e-s racontent leur Dry January

Témoignages: Des Romand-e-s racontent leur Dry January

En Suisse, le défi Dry January est promu depuis 2021 par des organisations spécialisées dans les addictions.

© GETTY IMAGES/JENNY DETTRICK

Bonnes résolutions obligent, le Dry January est de retour. Cette philosophie originaire du Royaume-Uni invite les personnes non dépendantes à stopper ou réduire leur consommation d’alcool pendant le mois de janvier.

En Suisse, le défi est promu depuis 2021 par des organisations spécialisées dans les addictions, notamment Addiction Suisse et la Croix-Bleue, et soutenu par l’Office fédéral de la santé publique (OFSP). «La consommation excessive d’alcool est l’une des causes principales de décès prématuré et d’atteinte à la santé physique ainsi qu’à la santé psychique et sociale», rappelle l’Office fédéral de la statistique (OFS) dans sa dernière enquête sur la santé.

Ainsi, en 2022, 65% des hommes et 46% des femmes disaient boire de l’alcool au moins une fois par semaine. «Les habitudes de consommation ont évolué, précise par écrit Monique Portner-Helfer, porte-parole d’Addiction Suisse. Depuis 1992, la proportion de personnes qui consomment quotidiennement de l’alcool a été divisée par deux. Cependant, si elle boit moins souvent, la population a tendance à consommer de plus grandes quantités d’alcool lors d’une seule occasion.»

Consommation banalisée

Monique Portner-Helfer souligne en outre que, même si l’alcool est une substance psychoactive qui peut causer de nombreux dommages, sa consommation reste banalisée et les risques pour la santé encore méconnus: par exemple, la moitié des actes de violence en Suisse ont lieu sous l’influence de l’alcool – en rapport notamment avec les violences domestiques – et les coûts économiques des conséquences de sa consommation s’élèvent à 2,8 milliards de francs par an.

Au-delà de la banalisation, il subsiste aussi une certaine pression sociale à boire de l’alcool. Addiction Suisse encourage toutefois à oser dire non. «Il est tout à fait légitime de refuser de l’alcool et ce n’est pas nécessaire de justifier son choix», insiste la porte-parole de l’organisation, qui souligne que l’on peut aujourd’hui trinquer avec des boissons sans alcool, un marché en pleine croissance.

Damp January, la tendance de 2024

Face à ce défi souvent plus difficile qu’il n’y paraît – plus de la moitié des participant-e-s n’ont pas réussi le challenge en 2023 d’après un sondage d’Addiction Suisse –, Damp January («janvier humide») a la cote. Il s’agit de réduire sa consommation plutôt que la stopper. Même si boire moins est déjà bénéfique pour la santé, Addiction Suisse recommande toutefois de renoncer complètement pour profiter au maximum des bienfaits, en l’occurrence un meilleur sommeil et un regain d’énergie, mais également une perte de poids et des économies substantielles.

Quoi qu’il en soit, la démarche Dry January s’inscrit dans la prévention et invite à questionner ses habitudes pour mieux comprendre le rôle de l’alcool dans son quotidien, le contrôle que l’on a sur sa consommation ou les injonctions qui entourent le fait de boire en groupe. Des tests en ligne peuvent aider à nourrir cette réflexion et mènent parfois à prendre conscience qu’on boit plus qu’on ne le pense. Découvrez nos six témoignages de Romand-e-s sur le sujet.

Laure, 24 ans: «J’ai pris l’habitude de faire l’apéro avec mes copines avant de sortir»

C’est la première fois que je fais cette démarche et je pense que c’est une bonne chose de faire une pause et de prendre du recul sur sa consommation d’alcool. Je trouve intéressant, en outre, d’avoir le contrôle dessus.

Il est vrai que je ne bois pas de manière excessive, mais, comme de nombreuses personnes de mon âge, je fais parfois la fête et les verres s’enchaînent.

Je sais déjà que mes copines vont être étonnées quand je vais leur annoncer que je ne bois pas. C’est ancré pour nous justement, avant de sortir le week-end, on fait toujours l’apéro et j’aimerais pouvoir me dire que je peux m’amuser sans alcool. Boire une bière, c’est aussi la facilité, et j’ai envie de découvrir d’autres habitudes que je vais pouvoir garder par la suite.

Natacha, 38 ans: «La pression sociale nous fait boire»

Quand j’ai entendu parler du Dry January, je n’ai pas directement participé, car je me sentais incapable de tenir un mois sans alcool. Et puis, en plein été, il y a un peu plus de deux ans, je n’ai pas pu boire un long moment à cause du Covid et j’ai décidé de continuer ainsi tout le mois, même une fois guérie. Finalement, c’était beaucoup plus facile que ce que je pensais. Il y avait un côté rassurant de se dire que j’avais déjà pu tenir et je me suis décidée à faire le Dry January. Cela m’a fait réaliser plusieurs choses, en particulier le fait que la pression sociale nous amène à boire plus que l’envie.

Quand on ne boit pas, on a vraiment l’impression d’être la personne la plus ennuyeuse au monde. Je dois l’avouer, j’ai moi-même eu ce regard sur des gens, et là, je devais m’y confronter.

C’est quand même agaçant, car on doit toujours se justifier, faire des blagues, préciser qu’on n’est pas enceinte quand on est une femme… Depuis que j’ai suivi le Dry January, j’ai décidé de ne plus boire en semaine et je m’y tiens. Même quand on insiste – ce qui arrive très souvent –, je ne cède pas.

Loïc, 30 ans: «Il faut plutôt changer ses habitudes toute l’année»

Je ne fais pas le Dry January et je n’ai rien contre les personnes qui le font, mais ce que je reproche à cette tendance, c’est le fait qu’elle est prévue sur un mois. On pourrait vite avoir le réflexe de reprendre ensuite ses mauvaises habitudes. On voit la même chose avec les régimes ou les détox.

Il y a cette prise de conscience que notre mode de vie est malsain, donc on arrête un mois pour se sentir mieux, mais on recommence derrière.

Ce n’est pas très utile. Personnellement, cela fait en effet une année que j’ai diminué ma consommation d’alcool et je considère que c’est une bonne chose, car on vit dans une société alcoolique et c’est plutôt bien de se remettre en question, se rendre compte qu’on n’est pas obligé de boire à foison quand on sort. Par contre, je ne me vois pas forcément arrêter durant un mois, même si cela pourrait arriver un jour, pourquoi pas!

Pierre, 58 ans: «Janvier est le bon moment pour faire une cure»

C’était vraiment difficile la première fois que j’ai fait le Dry January, il y a trois ans, notamment car ma femme, elle, ne le suivait pas. Quand on ne boit pas, on peut vite se sentir assez seul dans son coin. Heureusement, l’année passée, ma femme m’a rejoint dans cette expérience, que je réitère en 2024.

Durant cette période, j’ai senti que j’étais en meilleure forme, je dormais mieux, je me concentrais davantage.

Ce qui m’a motivé, c’est plutôt le fait de relever un défi personnel que de remettre en cause ma consommation d’alcool. Je suis en accord avec ce dernier point et j’ai d’ailleurs déjà décidé il y a quelque temps de ne plus boire en semaine. Je trouve aussi que le mois de janvier est le bon moment pour faire une cure. En décembre, on a tendance à beaucoup boire, sans même s’en rendre compte, car il y a de nombreux événements sociaux.

Emma*, 41 ans: «Mon copain a été mon Dry January»

J’ai récemment écouté un témoignage qui expliquait que l’alcool était la seule drogue qu’on s’excusait de ne pas vouloir prendre. Cela a eu un écho en moi, car j’ai réussi à contrôler ma consommation d’alcool, un toxique donc, depuis quelques années maintenant. J’ai grandi dans une de ces familles où l’on célèbre les fêtes par de l’alcool en disant «santé», alors qu’on sait pertinemment que ces boissons favorisent les cancers et les maladies cardiovasculaires.

J’ai malheureusement traversé dans ma vie un deuil douloureux, des relations compliquées… L’alcool était alors bien souvent un antalgique.

Il y a six ans, mon conjoint m’a fait réaliser que boire systématiquement pour me féliciter d’une victoire ou pour décompresser en fin de journée était symptomatique de l’alcoolisme. Je me rappelle avoir été fâchée par ses paroles. Pourtant, au fil des mois, grâce à son aide, j’ai réussi à sortir de mon déni. J’ai aussi compris que les effets euphorisants de l’alcool se transformaient pour moi en insomnies et en anxiété. Si mes mots vous parlent, dites-vous ceux qu’un docteur m’a un jour soufflés: arrêter de boire de l’alcool ne vous fera pas de mal.

Stéphane*, 34 ans: «C’est important de remettre en question sa consommation»

Je me suis toujours posé des questions sur l’alcool. C’est lié au fait que mon grand-père est décédé à cause de sa consommation et que mon père a souffert d’alcoolisme. J’ai déjà fait le Dry January il y a quelques années et je vais le refaire en 2024. La dernière fois, j’ai même été sobre durant 40 jours et je me suis vraiment senti mieux. J’avais plus d’énergie, même si je n’étais déjà pas un gros consommateur et que j’ai encore réduit depuis. Je trouve que c’est une bonne idée de remettre en question sa consommation d’alcool et d’autant plus en tant qu’homme.

Quand on est entre potes et qu’on se dit qu’on va en boire une, si quelqu’un prend une eau gazeuse, ça va faire bizarre.

Avec l’alcool, il y a un côté festif et social très important. D’ailleurs, cette année, je vais faire le Dry January en décalé, car j’ai mon anniversaire au début du mois.

*Nom connu de la rédaction

Ressources

Livres

Fille d’alcoolo, de Camilla Gallapia (Éd. Larousse, 2023)

Dans ce roman graphique, l’autrice raconte l’alcoolisme de sa mère et évoque la vie de cette dernière, qui elle a pu être avant l’alcool et comment la maladie est apparue. Camilla Gallapia livre aussi le récit de l’enfant qu’elle était, touchée par l’alcoolisme d’un proche.

Sans alcool, de Claire Touzard (Éd. Flammarion, 2021)

L’autrice française se livre sur son alcoolisme dans ce livre décrit comme le journal de son sevrage. Elle explique également comment, à ses yeux, la sobriété représente un acte subversif face à une société qui banalise et sanctifie la boisson, notamment le vin.

Sans alcool, 1001 boissons pour un nouvel art de vivre à la française, d’Augustin Laborde, Maud Catté et Fabien Humbert (Éd. Massin, 2023)

Ne plus boire d’alcool ne veut pas dire arrêter tous les cocktails et autres boissons festives. Dans ce livre, retrouvez de nombreuses idées pour boire sans alcool et se faire plaisir, de la bière jusqu’aux vins. L'illustratrice Tiffany Cooper fait également partie du projet. Cette dernière est récemment devenue sobre et parle fréquemment de sa relation avec l'alcool sur son compte Instagram.

Podcasts

Contre-addictions, de Rose

Dans ce podcast, la chanteuse revient sur son parcours de dépendante et interviewe des personnalités, des anonymes et des professionnels de santé autour de l’addiction. Rose sort aussi un livre, du même titre, le 25 janvier 2024.

Alcool, nous avons un problème, de Delphine Salte, sur ARTE Radio

Dans cet épisode du podcast «Vivons heureux avant la fin du monde», la journaliste se demande quand notre consommation devient problématique et explore cette zone grise de l’alcool.

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