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«Le cancer a décuplé mon instinct de vie»

«Le cancer a décuplé mon instinct de vie»

«La tristesse et la colète m'ont submergée, mais je devais être forte.»

© Joëlle Neuenschwander

Tout s’est passé très vite, en trois jours à peine, au mois de juillet de l’année dernière. Je venais de terminer ma formation d’éducatrice de l’enfance et d’emménager avec mon compagnon. Une nouvelle vie commençait, pleine de bonheur. Puis un matin, je me suis réveillée avec le ventre très gonflé et j’ai compris tout de suite qu’il y avait un problème. Mon médecin de famille m’a orientée vers un gastro-entérologue, le verdict est tombé: on avait trouvé un kyste de douze centimètres dans mon abdomen et des examens approfondis s'imposaient. A l’hôpital, personne ne pouvait me prendre en charge sur le moment. Que faire? Mes parents étaient en vacances et mon compagnon travaillait. Finalement, sur les conseils de mon frère et de ma sœur, je me suis rendue aux urgences, où, après des heures d’examens et d’attente, on m’a annoncé que ce kyste détruisait mes intestins.

A cet instant, ma vie a basculé. J’étais sous le choc. Les spécialistes me répétaient que la situation semblait très grave et qu’ils ne pouvaient pas se prononcer sur l’issue de mon mal. L’opération chirurgicale paraissait inévitable et devait se pratiquer le plus tôt possible. Quelques jours plus tard, je passais sur le billard pour me réveiller, au bout de quatre heures, complètement nauséeuse. L’intervention avait été minimale, puisqu’il fallait d’abord chercher à identifier la lésion. Seuls quatre points rouges marquaient mon ventre.

Je me suis nourrie de leur amour

Les jours suivants, nous nous sommes vus, les médecins, ma famille et mon compagnon, pour tirer un premier bilan. Un rendez-vous qui m’a profondément marquée et que je n’oublierai jamais, parce que le verdict était on ne peut plus clair: je souffrais d’un cancer des ovaires. La tristesse mais également la colère m’ont alors submergée, pourtant j’ai tout fait pour me reprendre: je devais être forte – pour moi et pour mes proches – puisque l’opération suivante, qui se déroulerait à Berne, était déjà programmée. Il me restait peu de temps pour m’y préparer et je voulais garder la maîtrise sur ces derniers instants de ma vie «d’avant».


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Un jour, après mon retour à la maison, mes proches sont venus et nous avons dîné ensemble. Certains ont bu un peu trop pour chasser l’angoisse, je me suis nourrie de leur amour… Le chirurgien qui allait m’opérer m’a expliqué le déroulement de l’intervention de A à Z. En entendant la liste des organes qui allaient être enlevés, j’ai compris que plus rien ne serait comme avant. Je suis rentrée chez moi très ébranlée et j’ai dit à mon compagnon que si la situation était trop difficile à gérer, il pouvait me quitter. Evidemment, il n’en a rien été. Nous vivions en couple depuis six ans et il m’a assuré qu’il me soutiendrait jusqu’au bout, quelle que soit l’issue de la maladie.

Emotions contradictoires

L’opération était planifiée pour le 23 juillet. Ma mère m’a accompagnée tôt le matin à l’hôpital, tandis que mon ami devait venir me voir à mon réveil, en fin de journée. Je ne me sentais pas du tout stressée, je savais que je n’avais pas le choix. Après neuf heures passées sur le billard, une infirmière m’a annoncé que l’intervention avait été un succès. Moi, je me retrouvais dans un sale état: je me sentais extrêmement faible et je vomissais. Après une nuit agitée baignée par des émotions contradictoires et un grand sentiment de solitude, le chirurgien m’a expliqué que mon cœur avait battu normalement tout au long de l’intervention, et que mon système sanguin fonctionnait parfaitement. Les risques d’hémorragie étant élevés pour ce genre d’opération, ma jeunesse et ma vigueur avaient représenté de sérieux atouts…

Je suis restée une semaine en convalescence à l’hôpital de Berne. C’était une période étrange, hors du temps. Le monde des blouses blanches pesait sur mon moral et je ne rêvais que de rentrer chez moi. Heureusement, je pouvais compter sur les visites fréquentes de ma mère, et ma sœur avait pris congé pour s’occuper de moi. Elle me lavait, me faisait les ongles…

Une perte de poids de 13 kilos

J’ai pu rentrer à la maison le 31 juillet. Les vacances que nous avions prévues de longue date avec mon compagnon avaient naturellement été annulées. Nous avons donc vécu dans une bulle durant deux semaines, en attendant la première chimio. Pour éviter le choc de la perte de mes cheveux, je me suis rasé la tête.

La première injection a eu lieu au Centre hospitalier de Bienne. Durant six heures, je suis restée sur une chaise, sous perfusion. Une fois rentrée chez moi, j’ai été prise de vomissements. En quelques semaines, j’ai perdu près de 13 kilos. C’était violent: je ne reconnaissais plus ni mon visage ni mon corps. Des modifications dans le traitement m’ont aidée à mieux vivre les injections suivantes, mais mon moral en a pris un sale coup et j’ai perdu ma joie de vivre. Certains jours, j’avais envie de tout foutre en l’air. Le traitement était pour moi comme un avant-goût de la mort, tant il m’épuisait. Heureusement, mon compagnon, ma famille, ainsi que de précieux amis étaient à mes côtés. Leur soutien a été une des clés de mon rétablissement.

Les chimios s’enchaînaient toutes les trois semaines, entrecoupées de poussées de fièvre, de départ aux urgences et de mise sous antibiotiques. Quand j’ai perdu mes sourcils, je m’en suis fait tatouer afin de rester féminine. La sixième et ultime chimio s’est déroulée en décembre 2015. C’est à ce moment que j’ai vraiment réalisé à quel point j’étais passée tout près de la mort.

Aujourd’hui, six mois après cette expérience extrêmement douloureuse, je me demande encore si c’est bien moi qui ai vécu tout cela. Mais une chose est certaine: profiter de la vie est devenu mon leitmotiv. J’ai prévu, par exemple, de nombreux voyages. Et désormais je suis bien décidée à laisser l’ombre du crabe derrière moi!

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