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Octobre rose

«À 25 ans, j'ai vaincu mon cancer du sein»

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«Je ne peux plus attendre, car je sais à quel point chaque seconde est précieuse. Je veux avancer, maintenant, tout de suite, avec toute la gratitude et l’impatience que m’a laissée cette bataille. Car lorsqu’on survit à un cancer du sein, je pense qu’on se doit de faire mieux qu’auparavant. On se le doit à soi-même, mais aussi à toutes celles qui n’ont pas eu cette chance.»

© Corinne Sporrer

En novembre 2017, alors que je prenais une douche, j’ai senti une petite boule sous mon sein gauche. Je ne me suis pas vraiment inquiétée, jusqu’à ce que mon copain, plus anxieux, me conseille de consulter, afin de m’assurer que tout était normal. Il n’y avait jamais eu de cancer du sein dans ma famille et je ne voyais aucune prédisposition particulière. Vu mon âge, les professionnels pensaient qu’il ne s’agissait que d’un kyste bénin, mais le médecin m’a quand même demandé de passer plusieurs examens, dont une ponction. Dix jours plus tard, il m’a téléphoné, afin de me donner le résultat. J’étais au travail et, sentant son malaise, je lui ai demandé de me dire la vérité tout de suite. Verdict: «C’est cancéreux». J’étais seule, debout dans un couloir, et ne réalisais pas encore ce qui venait de m’arriver. En retournant à ma place de travail, j’ai senti progressivement le poids de la nouvelle sur mes épaules. J’ai fondu en larmes dans le bureau de ma cheffe.

Le soir même, je l’ai annoncé à mes proches. Certains ont pleuré, d’autres ont paniqué, la plupart m’ont avoué qu’ils ne savaient pas quoi me dire. Mais il n’y avait rien à dire. C’était devenu ma nouvelle réalité et j’allais l’affronter.

Heureusement, la tumeur ne s’était pas encore étendue et mon cancer était très récent, totalement guérissable. Je suis tombée sur un oncologue extraordinaire, une fusion parfaite d’objectivité professionnelle et d’humanité compatissante. Il a détaillé le protocole médical qui m’attendait, un véritable plan de bataille dans lequel je me suis immédiatement projetée. Je connaissais la date de fin de mon traitement et me suis focalisée là-dessus de toutes mes forces.

Le médecin m’a expliqué que lorsqu’on se bat contre un cancer, le résultat dépend à 80% du mental. Je me suis répété que tout allait bien se passer et me suis promis que ma vie changerait le moins possible. J’ai continué à travailler, à faire du sport, tout en m’écoutant, car je fatiguais plus vite.

Début d’une bataille

Les chimiothérapies ont commencé très rapidement. Hormis la fatigue et quelques nausées, surtout durant les jours qui suivaient les injections, j’ai eu peu d’effets secondaires. Je n’ai jamais vomi. Je le vivais bien mieux que certaines autres patientes qui me racontaient leur calvaire. J’étais aussi très entourée. Ma sœur m’a notamment accompagnée à toutes les séances de chimio et mon colocataire était toujours là pour me faire hurler de rire ou me proposer des activités qui me changeaient les idées. Mon copain ne m’a jamais regardée différemment. Il a tout entrepris pour me soutenir de son mieux.

Cependant, tout l’optimisme du monde n’aurait pu éviter la chute de cheveux. Consciente qu’ils allaient tomber assez vite, j’ai appelé une amie coiffeuse pour lui demander de réaliser les coupes et les couleurs les plus improbables, celles que je n’avais jamais osé porter auparavant. Quelques semaines plus tard, sentant que le moment était arrivé, je suis allée dans un institut où une professionnelle m’a rasé la tête. Sur le moment, sous la perruque, je tenais bon. Toutefois, le soir, en l’enlevant pour la première fois, devant le miroir, ce fut un moment difficile.

On ne réalise pas toujours à quel point la chevelure joue un rôle important dans la féminité, mais, bizarrement, on s’habitue à tout assez vite. Des perruques (qui grattent), je suis passée aux franges de cheveux, encadrées par un bandeau coloré. Cet accessoire m’a beaucoup aidée, je me sentais libérée. En parallèle, j’ai tout de suite décidé de compenser avec des boucles d’oreilles, un maquillage des yeux plus marqué et du rouge à lèvres. Je pense que je m’y étais inconsciemment préparée.

Dernière ligne droite

Suite aux chimiothérapies, ma tumeur avait presque disparu. Toutefois, de nouveaux tests ont révélé que je portais un des gènes prédisposant au cancer du sein. Mon risque de récidive était de 90%. J’avais anticipé tous les scénarios possibles avant de connaître le verdict et ma décision était déjà prise. J’ai choisi de subir une double mastectomie, directement suivie d’une reconstruction mammaire, afin de diminuer au maximum le risque de devoir revivre cette épreuve. Il m’était impensable de vivre avec une telle épée de Damoclès au-dessus de la tête. L’opération a duré sept heures, mais tout s’est bien passé et je me suis rétablie rapidement. L’un de mes seins a malheureusement rejeté la prothèse peu de temps après, ce qui a conduit à de nouvelles opérations, mais tout est en bonne voie actuellement.

Grâce à l’opération et aux rayons qui ont suivi la chimiothérapie, mon risque de récidive est actuellement à moins de 10%.

Je suis en rémission et cela n’a pas de prix. Le cancer est parti, mais je dois encore réparer ses dégâts. Au début, j’avais l’impression déstabilisante qu’on m’avait ôté l’objectif sur lequel j’avais focalisé tout mon être pendant des mois. Je n’avais plus de plan de bataille et me suis subitement retrouvée devant un immense horizon vide. Je dois accepter un nouveau corps, les 12 kilos pris à cause de la chimiothérapie, ainsi que mes nouveaux cheveux, qui ont repoussé bruns et bouclés. Soulagés et ravis, mes proches n’ont pas tout de suite réalisé que j’avais presque davantage besoin d’eux après la guérison que durant le traitement.

Je vis les répercussions de l’épreuve gagnée, je me pose des questions et je ne veux plus attendre de vivre. Le cancer a cela de bon qu’il vous offre la capacité de savourer chaque instant avec une force inouïe.

Je ne peux plus attendre, car je sais à quel point chaque seconde est précieuse. Je veux avancer, maintenant, tout de suite, avec toute la gratitude et l’impatience que m’a laissée cette bataille. Car lorsqu’on survit à un cancer du sein, je pense qu’on se doit de faire mieux qu’auparavant. On se le doit à soi-même, mais aussi à toutes celles qui n’ont pas eu cette chance.

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