L'édito de Géraldine Savary: «M comme maudite ménopause»

De la m… en général on ne parle pas. Il y a comme un tabou, une omerta, une gêne. Rares sont celles qui racontent ce moment où elles passent de l’autre côté, propulsées dans ce désert où les œstrogènes se débinent et les follicules ovariens se mettent à l’arrêt. Les amies font comme si elles ne faisaient pas partie du club, les conjoints fuient au jardin dès que le mot vient sur la table. Les mères ne transmettent rien à leurs filles, qui à leur tour se taisent et ainsi de suite depuis que le monde est monde et la femme est femme.

Il faut dire que ça se comprend. Les m…ées qui lâchent quelques confidences en font des récits terrifiants. Bouffées de chaleur, perte de cheveux, insomnies, fatigue, déprime, vagin sec, libido en berne. Ajoutons que dans un acharnement des lois de la nature qui contredisent celles de la gravitation, à partir de 50 ans, la graisse des cuisses remonte et migre vers le ventre et les hanches, ça crée une espèce de bouée qui reste même après les vacances.

Pour d’autres cependant, la m…se traverse magnifiquement bien. Tout aussi discrètes que celles qui galèrent (la société a de la peine à considérer qu’on puisse s’éclater sans pouvoir procréer), les m…ées heureuses chuchotent que, libérées des règles et du risque de tomber enceintes, elles se révèlent amazones, qu’elles débordent d’énergie, et qu’est-ce que 5 kilos de trop si la peau devient douce et tendre?

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En résumé, en 2023, on envoie des fusées dans le ciel et des avatars pour présenter la météo et on ne sait toujours pas grand-chose sur la m… Quand ça se déclenche, combien de temps ça dure, quels effets sur les os, le moral, l’espérance de vie, que faire avec les hormones qui vont et viennent et dansent la java toute la nuit.

En désespoir de cause, je serais presque tentée de remercier le marché (c’est dire). Pas celui du travail, qui a tendance à rejeter les plus de 50 ans, mais celui qui a compris l’intérêt financier des ménopausées: s’il y a 10 milliards de personnes sur Terre, que la moitié sont des femmes, il doit bien se cacher 1 à 2 milliards d’âmes tristes à l’idée que personne ne s’intéresse à elles et qui saisissent toutes les occasions pour se sentir encore un peu exister (bouquins, crèmes, régimes, pilules, conseils de stars, etc.).

Alors, la ménopause, cauchemar ou libération? Je ne sais quoi répondre à cette question (et de toute manière, je ne vous en parlerais pas, cf. premier paragraphe) mais je vous envoie à l'article que nous lui consacrons (à lire dès le 1er mai 2023 sur Femina.ch). Parce que pire que la ménopause, il y a l’ignorance de voir où elle nous mène.