Environnement
L'impact de la crise climatique sur la santé des femmes
Alors que le GIEC vient de publier son sixième rapport d’évaluation, la hausse des températures ne devrait pas s’arrêter. Au contraire, puisque quels que soient les scénarios d’émission, cet organisme estime que le réchauffement de la planète atteindra 1,5 degré dès le début des années 2030.
Entre vagues de chaleur, précipitations extrêmes, sécheresses et changement du comportement de nombreuses espèces, la santé des femmes n’est abordée que dans de rares études, menées aux États-Unis. De fait, si les femmes enceintes sont considérées par le GIEC comme plus vulnérables aux fortes chaleurs au même titre que les personnes âgées, la hausse des températures pourrait aussi causer des perturbations sur les femmes tout au long de leur vie hormonale. Des effets négatifs à moyen et long terme qui se feraient sentir de la maturation sexuelle à la fertilité en passant par la grossesse et la ménopause, comme le listent, dans un article publié en 2022 dans le Journal of Women’s Health, Andrew Bremer et Guillermina Girardi, des Instituts américains de la santé (NIH). La chercheuse américaine apporte quelques explications à ces questions d’une actualité brûlante.
Dès les premières règles
Les dérèglements de la santé des femmes se feraient dès les premières règles, selon un article paru en 2020 dans l’International Journal of Environmental Research and Public Health. Si le lien de cause à effet entre hausse des températures et âge prématuré ou retardé des premières règles n’est pas forcément évident à comprendre, il faut le placer dans le contexte des changements environnementaux: l’exposition aux polluants dont les perturbateurs endocriniens et les impacts sur les facteurs nutritionnels notamment. Mary Regina Boland et Silvia Canelon, les autrices de ce travail, soulignent l’importance à long terme de ce dérèglement:
De la grossesse à la ménopause
Étape suivante – ou pas – dans la vie reproductive: la grossesse. Comme souligné par le GIEC dans son rapport, et par le monde médical dans son ensemble, les femmes enceintes sont plus vulnérables aux températures élevées. «Elles produisent déjà elles-mêmes plus de chaleur en raison d’une prise de poids et des sollicitations métaboliques du fœtus qui grandit. Elles sont aussi plus sensibles à la déshydratation, explique Guillermina Girardi. En plus des effets directs sur leur santé, les fortes chaleurs augmentent les risques de prématurité, de petits poids de naissance, de mortinatalité et de défauts cardiaques congénitaux.»
Des effets néfastes sur la santé reproductive des femmes, et sur celle de leurs enfants. Mais pas seulement. Durant la ménopause, les femmes pourraient subir des bouffées de chaleur plus fortes et plus fréquentes, selon une étude anglaise publiée dans la revue scientifique Menopause en 2020.
Tant durant la grossesse que durant la ménopause, la chercheuse ajoute que les femmes peuvent avoir des bouffées de chaleur et des sueurs nocturnes «susceptibles de causer des troubles du sommeil, de la fatigue, des problèmes cardiovasculaires, voire impacter leur qualité de vie et leur humeur.»
Inégalité des genres face au climat
Si, selon l’OMS, le changement climatique est considéré comme étant la plus grande menace sur la santé globale, et que des réponses s’organisent du côté du monde médical pour y faire face, Guillermina Girardi insiste «sur la nécessité d’avoir une communication efficace et des méthodes adaptées pour établir des stratégies de prises en charge contre les effets délétères des changements climatiques et environnementaux sur la santé des femmes».
Dans le contexte des changements climatiques, les femmes des pays du Sud et des pays les plus pauvres font déjà les frais de la hausse des températures. Ainsi, le GIEC reconnaît dans son précédent rapport qu’elles sont «moins aptes à faire face aux changements climatiques et que ceux-ci sont pour elles un facteur de stress supplémentaire». Et qui dit augmentation du stress dit impact sur la santé.
«Des 1,3 million de personnes vivant dans des conditions de pauvreté, 70% sont des femmes. Plus le changement climatique s’intensifie, plus les femmes ont de risques de subir des violences, des déplacements et la pauvreté, continue la chercheuse. Une étude menée en 2007 montre qu’en moyenne les désastres naturels tuent plus de femmes que d’hommes et diminuent leur espérance de vie. Plus le désastre climatique est violent, plus l’écart se creuse entre les genres.»
Si les effets du réchauffement climatique sont négatifs sur la santé des femmes, la chercheuse ne s’avance pas sur une potentielle adaptation aux températures plus élevées qui permettrait de limiter les dégâts. «C’est très difficile d’extrapoler en la matière, car de nombreux facteurs sociaux liés à la santé y contribuent. Certains bénéfices du réchauffement climatique ont certes pu être identifiés, mais il ne faut pas se leurrer, ce sont les effets négatifs qui sont et seront les plus problématiques à gérer.»
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