Conflit israélo-palestinien
L'édito de Géraldine Savary: «L’optimisme à l’épreuve des bombes»
Je suis d’une nature optimiste. Élevée dans une famille où se réjouir pouvait porter malheur, j’ai grandi en prenant le contrepied, convaincue que le monde, un jour, irait vers le mieux. Que les sociétés deviendront plus justes, que les hommes et les femmes ressentent, quelles que soient les circonstances, l’amour du prochain, la solidarité avec les plus faibles, la générosité en cas de coups durs, l’envie d’apprendre et de comprendre. Il s’agit simplement de porter ces aspirations-là à la lumière plutôt que de flatter les plus bas instincts. Après tout, même les champignons de Paris arrivent à pousser dans les caves.
Je pensais qu’avec un petit effort collectif, tous les foyers auraient un frigo rempli, du pain pour finir le mois, des médicaments pour guérir de toutes les maladies, des vacances à gogo, et que la vie consistait à s’émerveiller de la beauté sur la terre, du chant des merles juste avant l’aube, de la couleur du ciel, du sourire d’un passant, d’une partie de jass.
Pour la première fois de ma vie, je cale. Où que l’on se tourne, les mauvaises nouvelles bouchent l’horizon. Le front intérieur charrie son lot de désolation, les pires fléaux s’abattent sur les pays voisins. Même la douceur des températures d’octobre assèche la terre, à l’ombre des glaciers mourants. Et voilà que désormais, des jeunes qui étaient juste en train de danser sur un bout de désert sont enlevés, utilisés comme des boucliers humains, otages de la radicalité des gouvernants. Les femmes ne sont pas épargnées, au contraire. Elles représentent un butin de haute valeur.
Narges Mohammadi et Claudia Goldin
La guerre à laquelle se livrent Israël et le Hamas renvoie l’écho de celle qui embrase l’Ukraine. Les territoires et les villes s’effacent sous le feu des armes, les êtres humains fuient comme des animaux l’incendie, les identités, les cultures se transforment en cendres, l’espoir en poussière.
Si on allume notre lampe frontale, voit-on poindre une ou deux lueurs? Allez, quand même: des Nobel distinguent Narges Mohammadi, la voix de la contestation iranienne, et Claudia Goldin, une économiste qui a consacré sa vie à comprendre la différence entre les sexes sur le marché du travail. Et aussi: le peuple suisse est convié à élire un nouveau parlement le 22 octobre 2023. Quoi de mieux que d’honorer la démocratie quand partout gronde le vacarme des bombes?