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Ecologie: Al Gore remonte au front avec son nouveau film
S’entretenir avec Al Gore, c’est avant tout l’entendre parler d’écologie. Devançant les questions, devinant les objections, balayant les contradictions, cet ex-politicien professionnel devenu activiste du réchauffement climatique est avant tout un passionné. Volubile.
Des femmes qui l’ont influencé, il n’en retient pour l’heure qu’une, Rachel Carson, mais il n’a pas de mots assez forts pour en faire l’éloge. Oubliée sous nos latitudes, cette biologiste américaine fut celle qui, en 1962, dénonça le scandale du DDT. Ce puissant insecticide, à l’origine de nombreux cancers et destructeur de la faune, fut alors interdit aux Etats-Unis et dans le monde. «Son livre, ‘Silent Spring’ (23 fr. 80 en librairie), a eu un impact profond sur ma jeunesse qui a retenti sur les décennies suivantes», relève Al Gore. «Elle est à l’origine de ma prise de conscience environnementale personnelle, mais on lui doit aussi le changement de paradigme de tout un pays qui a abouti à la création de l’Agence américaine de protection de l’environnement. Je me suis d’ailleurs largement inspiré de sa démarche pour mon ouvrage, «Earth in the Balance», publié au début des années 1990. Son œuvre est d’une modernité incroyable et gagne à être lue aujourd’hui encore.»
«J’ai toujours été entouré de femmes fortes, intelligentes»
Une seule personne capable de faire basculer une nation… on comprend l’importance que peut avoir cette référence pour un Al Gore qui cherche - lui aussi - à devenir un être providentiel. Mais il enchaîne immédiatement. «J’ai toujours été entouré de femmes fortes, intelligentes et qui n’avaient pas peur d’exprimer leurs opinons. De mon père, j’ai appris l’action politique, le dévouement et l’importance de la parole donnée. Mais c’est ma mère qui a fait de moi l’homme que je suis. Elle adorait lire et nous a aidés, ma sœur [Nancy, décédée d’un cancer en 1984] et moi, à construire notre culture littéraire durant l’adolescence. Sans elle, je n’aurais jamais découvert l’œuvre de Rachel Carson. Maman fut réellement l’autre grande inspiration de ma jeunesse.»
Si son père, Albert Gore Senior, était un homme politique démocrate influent du Tennessee, dont il fut ensuite sénateur, la mère d’Al, Pauline LaFon Gore, était à la tête d’un grand cabinet d’avocats de Washington et réputée pour aider de jeunes filles fraîchement diplômées à lancer leur carrière dans le droit. «Je pourrais aussi vous citer plusieurs noms d’hommes que j’ai rencontrés à l’armée, durant la guerre du Vietnam, ou de collègues à la rédaction du «Tennessean», le journal où j’ai fait mes classes de journaliste, mais c’est encore une femme qui me vient à l’esprit lorsque j’évoque mes influences de jeunesse: ma sœur Nancy. De dix ans plus âgée, elle a toujours cru en moi. Elle m’a conseillé durant toute ma vie, même, parfois, lorsque je ne lui demandais rien», s’amuse-t-il.
«En Suisse, on peut faire bouger les choses»
Le président américain Donald Trump, qui affiche son scepticisme sur la réalité du réchauffement climatique, arrive naturellement dans la conversation. «Le concernant, je ne peux qu’évoquer à nouveau Rachel Carson. Lorsqu’elle dénonçait l’usage destructeur du DDT et d’autres pesticides on lui rétorquait: «Vos études ne prouvent rien et les maladies touchant les animaux n’affectent pas les êtres humains». Aujourd’hui, malgré la recrudescence des cancers et les avancées scientifiques sur le réchauffement climatique, les mêmes continuent à nier l’évidence. Rachel Carson l’écrivait déjà dans les années 1960: «Lorsque la population s’insurge contre les ravages évidents provoqués par les pesticides, on la nourrit de demi-vérités tranquillisantes. De toute urgence, nous devons renoncer aux assurances trompeuses, aux douceurs qui recouvrent d’indigestes réalités.» En fait, ceux qui s’enrichissent en polluant ont toujours refusé de voir les évidences et ils utilisent toujours les mêmes trucs, depuis si longtemps!
Alors que son assistante entre dans la pièce pour signaler la fin du rendez-vous et maîtriser l’agenda de l’ancien vice-président, Al Gore s’interpose: «Donnez-nous encore deux minutes, nous n’avons pas parlé de la Suisse!» Sans attendre, il enchaîne: «Je passe dans votre pays une fois par an en moyenne. J’y ai des amis de longue date. Je suis aussi persuadé que la Suisse est l’un des endroits où les grands de ce monde peuvent se rejoindre pour faire avancer les choses. Je pense bien sûr au Forum économique mondial de Davos, où j’ai été présent plusieurs fois, mais aussi aux Nations Unies, à Genève.»
Son actu Son film, «Une suite qui dérange: le temps de l’action», sera au cinéma dès le 11 octobre 2017. Tourné 10 ans après «Une vérité qui dérange», ce documentaire montre combien la situation environnementale s’est aggravée, mais aussi à quel point une solution est proche.
Son don inattendu Parler français avec l’accent suisse. Je manque de pratique, mais j’ai étudié dans cette langue une partie de mon adolescence, lorsque mon père était aux Nations Unies.
Sur sa shamelist Je me sens souvent gêné quand je prends des vacances car je me dis qu’il y a tant à faire. J’ai une ferme dans le Tennessee et une péniche sur un lac. J’adore m’y ressourcer.
Son dernier fou rire A une soirée du Festival de Cannes lorsqu’on a joué «Kiss», de Prince, je n’ai pu m’empêcher d’attraper la main de ma compagne, Elizabeth Keadle, et d’aller avec elle sur la piste de danse.
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