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Semaine du Design de Milan

Adeline Mollard: La directrice artistique de la House of Switzerland

Semaine du design de milan adeline mollard la graphiste de la house of switzerland FLAVIO KARRER

«On ressent dans le graphisme l’urgence du changement» - Adeline Mollard

© FLAVIO KARRER

Passionnée de design et de musique, la Fribourgeoise Adeline Mollard a vu du pays. Après ses études à l’ECAL de Lausanne et son Master en histoire de l’art à l’Université de Zurich, elle a vécu dix ans à Berlin. Au bénéfice d’un Prix du design en 2022, elle réalise cette année l'identité visuelle et la direction artistique générale de la House of Switzerland, à découvrir pendant la semaine du design de Milan du 17 au 23 avril 2023 – programme complet sur le site design.swiss. À quelques jours de l’ouverture de l'événement qui se déroule en parallèle du célèbre salon international du meuble de Milan, nous lui avons demandé si le patrimoine géographique influence le graphisme.

FEMINA Adeline Mollard, vous êtes la graphiste mandatée pour l’identité visuelle de cette seconde édition de la House of Switzerland durant la semaine du design de Milan. Parlez-nous de ce projet.
Adeline Mollard Le thème central de la maison, «Urgent Legacy», donné par la Fondation suisse pour la culture Pro Helvetia et Présence Suisse, m’a évoqué cette urgence de changement. Mais c’est le côté interdisciplinaire qui m’a attirée. Dès le début, nous formons un quatuor avec Work Matter, le duo de design industriel et scénographie basé à Lausanne et composé de Elie Fazel et Valentin Sieber, ainsi que la photographe Sara Bastai qui vit entre Porto et Lausanne. Ensemble, nous avons développé le concept global, un domaine nourrissant l’autre et vice versa.

Comment se traduit cette urgence de changement dans le graphisme et le design?
Le changement de paradigme amène au questionnement de comment réaliser les choses en étant plus responsable. Work Matter a amené cette idée d’une scénographie en chantier, avec des éléments venus de la construction comme des gabarits et des briques. Nous avons également travaillé la signalétique avec des banners de chantier, pour montrer que quelque chose est en train d’être produit sur place.

Qu’exprime cette identité visuelle en 2023?

Nous souhaitions mettre la tradition suisse à l’honneur, mais avec un twist contemporain. Nous sommes de plus en plus fréquemment confrontés à ces questions dans nos métiers. Sans être parfait sur toute la ligne, il est important de montrer que le design est porté vers l'avenir et que nous y réfléchissons, chacune et chacun dans nos domaines.

Visuellement, le traitement des images et le type de police choisie ont quelque chose de très futuriste.

Êtes-vous intervenus sur le bâtiment qui abrite la House of Switzerland?
Non, l’utilisation des gabarits était justement une manière de suggérer des espaces tout en laissant visible le squelette de l’architecture de la Casa degli Artisti qui est un très beau bâtiment en briques apparentes. Il en revient donc au visiteur de compléter son image mentale avec les différents espaces des exposants.

Quels sont vos critères pour accepter un mandat?
Le sujet sur lequel je vais travailler est le critère numéro un, ensuite tout dépend du moment où la proposition arrive dans mon parcours. J’ai choisi ce métier parce j’aime mettre les talents des autres en lumière. Il se trouve que c’est souvent des domaines que j’aime, comme le design dans le cas de la House of Switzerland à Milan et la musique qui est mon autre passion, et qui m’a amenée au projet du Kilbi Festival avec le Bad Bonn à Guin, dans le canton de Fribourg. À la base, c’est ma collection de disques qui m’a amenée à vouloir devenir graphiste. Chez moi, c'est l'idée ou le concept qui guide la forme.

Quelles sont les qualités requises pour un travail en communication visuelle ?
Il faut exercer son regard sur les proportions, et sur les distances, sur la forme. Mais au-delà de cet aspect, la partie relationnelle est très importante. Il faut savoir écouter les gens pour comprendre leur besoin et les mettre en confiance. Quand la confiance est installée, on ose prendre une direction plus expérimentale. Le but étant d’étonner sans se contenter trop rapidement.

Quelle est, selon vous, la part du patrimoine géographique dans le graphisme?
Mon stage et mes séjours à New York ou les voyages en général m’ont beaucoup forgée et nourrie. Le langage typographique et la manière de communiquer dans les rues sont visuellement très différents. À Berlin où j'ai vécu pendant dix ans, je me suis sentie plus libre. Chaque jour, j’étais étonnée par des gens que je croisais dans la rue, ce qui est moins fréquent en Suisse. À mon retour, j’ai apprécié l’accès facilité à des livres d’artistes et des mandats de communication visuelle pour des musées et des théâtres. En Suisse, la culture est réellement mise en avant et subventionnée. Il en découle des projets intéressants pour les graphistes.

Que représente le label Swissness à vos yeux?
C’est peut-être à travers ce que les gens disent de nous dans d’autres pays que cette notion se définit. J'espère que ça se fluidifie un peu, que c'est moins clivé. À travers cette rigueur qui nous caractérise, se profile un twist d’humour dans le design.

Le graphisme a de l’humour?
Je pense que oui! Pousser certains concepts jusqu’à l’absurde dans certains cas ne peut se faire sans une certaine forme d’humour.

© IMAGE TREATMENT BY SARA BASTAI AND GRAPHIC DESIGN BY ADELINE MOLLARD

Ce qui est certain, c’est que le graphisme suisse rayonne internationalement.
Oui, la Suisse est un petit Eldorado de ce point de vue-là. C’est très évident dans les book fairs [ndlr: les salons du livre des différentes villes internationales] où les maisons d’édition suisses sont très représentées. On a de bonnes formations en Suisse, généralement tournées vers l’extérieur avec des intervenants étrangers qui viennent enseigner chez nous. En se baladant dans les rues d’une ville comme Zurich, la qualité des affiches est impressionnante. On y ressent bien cette intention de la beauté de l’objet visuel, de l’affiche en tant qu’œuvre.

Vous êtes lauréate d'un Prix suisse du design en 2022. Que représente cette distinction?
Quand on ne gagne pas, on se dit que ce n’est pas si important. Mais quand on gagne, ça fait énormément plaisir. Tout le monde a besoin de reconnaissance. J'ai présenté huit sites que j'ai fait ces quatre dernières années. Les voir regroupés dans une exposition est une chose rare, car le graphisme ne s'expose pas tellement, il est généralement plus éphémère.

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