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Un foyer idyllique pour encadrer boulimiques et anorexiques

De ses années passées aux Etats-Unis, Susan Matthey a ramené un léger accent et un énorme projet: aménager une maison d’accueil pour les femmes souffrant de TCA (troubles du comportement alimentaire). Suissesse par son père, américaine par sa mère, elle a quitté la Suisse à 18 ans pour suivre des études de psychologie et sciences de l’éducation outre-Atlantique. Quelques années et bien des aller-retours plus tard, elle revient s’installer au bord du lac Léman avec un master en Clinical Mental Health Counseling et surtout une expérience de 5 ans dans un établissement de Caroline du Nord spécialement conçu pour encadrer anorexiques et boulimiques. Un genre de «cliniques» très courantes aux Etats-Unis et inexistantes chez nous.

La Maison Annabelle a ainsi ouvert ses portes en mai 2016 à Chernex, au-dessus de Montreux, et peut accueillir jusqu’à six pensionnaires. Susan nous fait visiter cette demeure familiale meublée avec des objets de récup repeints dans des couleurs apaisantes et harmonieuses dominées par le blanc. Le tout est si joli qu’on se croirait dans une galerie déco Pinterest! Sans parler de la vue panoramique qui s’apprécie de chaque pièce. On en oublierait presque que le lieu accueille des personnes en détresse.

Pour Susan Matthey, l’idée est vraiment d’offrir un cadre rassurant à ces jeunes femmes sur la voie de la guérison, hors de l’hôpital ou de leur domicile. Ici, elles prennent conscience de leurs problèmes, de leurs besoins, et réalisent qu’il y a une solution.

FEMINA: Quand doit-on s’alarmer face à un potentiel trouble alimentaire?
SUSAN MATTHEY En Suisse comme ailleurs, la minceur est trop souvent valorisée, on trouve mignon cette jeune fille si fine, ou on admire cette personne musclée qui fait tellement de sport. Or, ces apparences peuvent cacher un TCA. Il y a TCA dès que le rapport à la nourriture empêche la personne d’être heureuse et de vivre sa vie normalement.

Comment gérez-vous cette reprise de contact avec l’alimentation, ici, au foyer?
Les filles sont immergées dans la nourriture! Il y a 3 repas et 3 collations obligatoires par jour, pris en commun. Les menus de la semaine sont établis avec une diététicienne, les filles font les courses et cuisinent accompagnées d’un thérapeute. On y va crescendo. Au début, elles peuvent remplacer les aliments solides par un shake protéiné, car ce n’est pas si simple. Il faut aussi parfois passer toute une soirée à table pour que finalement le repas soit avalé.

Et il n’y a pas de drame, les calories étant quand même le coeur du problème des anorexiques?
Non. Il faut dire que les pensionnaires viennent de leur plein gré, donc elles acceptent un certain nombre de règles avant leur arrivée. Elles savent qu’on connaît tous leurs trucs pour contrôler leur poids, elles n’ont pas d’autre choix que de s’y plier. Interdiction de monter et descendre l’escalier 10 fois, porter des habits de saison (sinon elles se couvrent en été pour transpirer et se découvrent l’hiver pour brûler les calories), pas de moutarde ou condiment sur la table pour couvrir le goût des aliments. Pas de passage aux toilettes dans les 30 minutes qui suivent le repas, cigarette autorisée mais à portée de vue… Oui, il faut penser à tout, elles sont malignes!

La discipline, c’est le secret?
On ne fait pas la police, on est là pour soutenir les filles, elles doivent jouer le jeu et accepter la vie en communauté. Pas de nourriture hors de la cuisine, pas de télé dans les chambres, seulement dans le séjour, coucher tôt. Les téléphones portables ne sont pas interdits, juste mis de côté durant les ateliers la journée (art thérapie, méditation, image de soi...).


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Pas d’aliment interdit non plus?
Non! On évite de parler en calories mais en quantités, en cuillères à soupe par exemple pour les féculents, ou en portion tenant au creux de la main pour les protéines, et tous les groupes d’aliments doivent être présents pour l’équilibre, y compris les graisses. Au début, les aliments sécurisants sont favorisés, le riz, le poisson, la salade, puis on identifie les aliments effrayants, on travaille sur ces peurs, on débriefe pour démonter les croyances. Par exemple: si je mange du fromage, je vais grossir, si je grossis, on ne va plus m’aimer, et si on ne m’aime plus je vais mourir. D’où l’importance de pouvoir partager et échanger entre malades dans cet environnement sécurisé, sans honte.

Combien de temps durent les séjours à La Maison Annabelle?
De 1 à 3 mois. On peut venir quelques jours par semaine, au bout d’un certain temps rentrer chez soi le week-end. On n’accepte pas de filles en danger de mort, de par leur état psychique ou leur BMI, leur place n’est pas ici mais à l’hôpital. Nous ne prenons aussi que des personnes majeures (de plus de 18 ans donc). Notre thérapie semble convenir à nos pensionnaires, une seule est retournée à l’hôpital car elle continuait à perdre du poids ici. Contrairement à ce que l’on pourrait croire, le taux de réussite est assez élevé par rapport aux autres pathologies addictives comme la toxicomanie ou l’alcoolisme, surtout si le trouble est traité dès la première année.

Mais n’est-ce pas un traitement de luxe réservé à une certaine élite?
C’est justement ce que je ne veux pas! Nous sommes en train de réfléchir à une restructuration qui permettrait à tout le monde d’accéder à notre centre. Les TCA touchent surtout les femmes mais de toutes les classes sociales. Et ils sont en constante augmentation. Question coût, le tarif est actuellement de 169 fr. par jour, ce qui est standard pour un établissement socio-éducatif, comme un EMS. Le programme thérapeutique comprend tout ce dont les pensionnaires ont besoin. Elles continuent en général à voir leurs médecins traitants, généralistes ou psychiatres, et nous avons aussi nos propres spécialistes. Les séances de reiki ou autres thérapies de santé sont en sus mais remboursées par les assurances complémentaires.

Plus d'infos sur LMAB

La Maison Annabelle
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La Maison Annabelle, une ancienne maison familiale réaménagée.

© DR
Susan Matthey, directrice
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Susan Matthey, directrice de La Maison Annabelle.

© DR
Meuble avec tasses rétro
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Déco rétro pour le coin café.

© DR
Chambre pensionnaire Maison Annabelle
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Coquette et accueillante, l'un des chambres du foyer.

© DR
Chambre panoramique Maison Annabelle
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Chambre avec vue et déco aux couleurs douces.

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Chambre Maison Annabelle
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Chaque chambre a son charme et s'harmonie parfaitement avec le reste de la Maison.

© DR
Salle à manger Maison Annabelle
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Un lieu clé, la salle à manger où tous les repas se prennent en commun.

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Vue sur le Lac Léman
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Une vue qui invite à la méditation et l'introspection....

© DR

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