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Explorer sa génétique est un plus pour la santé des femmes

Explorer sa génétique est un plus pour la santé des femmes

«Les gens pensent que la génétique est quelque chose d’assez mystérieux, mais c’est comme si on faisait une radio, on va scruter votre ADN mais rien de plus.» - Ariane Giacobino

© GETTY IMAGES/DRAFTER123

Imaginez une consultation durant laquelle la discussion avec votre médecin consisterait à dresser l’arbre généalogique médical complet de votre famille pour y repérer les récurrences de certaines maladies afin de mieux les prévenir pour vous et vos enfants. C’est ce que propose la Dre Ariane Giacobino, professeure et spécialiste en génétique médicale qui a pris ses fonctions à la Clinique des Grangettes à Genève en janvier 2024. L’idée? Mettre à profit tout ce qu’elle a appris durant ses années de recherches et d’enseignement au bénéfice des patient-e-s. Aux spécialistes en reproduction, néphrologie, gastroentérologie ou encore oncologie, elle aimerait rappeler que, dans une petite proportion des pathologies traitées, il y a une base génétique à explorer.

FEMINA Est-ce que toutes les maladies dites familiales sont génétiques?
Ariane Giacobino Non. Tout ce qui est familial n’est pas forcément génétique. En médecine génétique, on fonctionne avec ce qui est héréditaire, c’est-à-dire le patrimoine génétique qui est transmis. Après, il existe des familles où il y a des mélanges d’environnements partagés et de portion du génome en commun qui font qu’il y a des maladies dont on dit qu’elles sont plutôt familiales.

Plusieurs cas de cancers dans une famille ne sont pas forcément héréditaires, donc?
Exactement. On voit parfois des familles où il y a différents cancers à un âge avancé, mais ça ne va pas forcément être des formes avec des prédispositions génétiques. C’est parce que ce sont aussi des maladies courantes, et même s’il y a quelque chose de familial et peut-être un terrain de fragilité plus grande, ces maladies correspondent à plusieurs gènes. Or, lorsqu’on parle de maladie héréditaire, on est dans le monogénique: un gène, une maladie.

Est-ce que la dépression peut être héréditaire, par exemple?
On sait qu’il y a à peu près 5000 maladies monogéniques connues à l’heure actuelle, et on estime qu’il nous en manque à peu près encore un millier. La dépression, les troubles DYS ou le TDAH par exemple n’en font pas partie.

De quelles maladies parle-t-on en particulier?
On parle beaucoup en ce moment du cancer.

Cinq à 10% des cancers du sein et 20% des cancers de l’ovaire sont liés à une prédisposition génétique. Et si on pense qu’il y a à peu près 6000 cancers du sein par année en Suisse, ça fait quelques centaines de femmes qui ont quand même une prédisposition.

Toutes les personnes ayant cette prédisposition génétique développent-elles un cancer?
Dans le cas du cancer du sein, la proportion est importante: si on a une mutation dans les gènes BRCA1 ou BRCA2, on a 60 à 80% de risque de développer le cancer du sein. Et 20 à 40% pour le cancer de l’ovaire. Le risque est énorme.

Comment savoir si on a ce risque?
On peut aller voir un-e généticien-ne et discuter, selon le groupe ethnique auquel on appartient, et son histoire familiale, de l’opportunité d’un test. On peut porter une mutation et rien ne s’est manifesté, mais peut être que la prédisposition est là.

Une femme qui a cette prédisposition génétique devrait-elle faire tester ses enfants?
Avant la majorité des enfants, on n’effectue pas de tests génétiques sauf s’il y a un bénéfice majeur pour leur santé. On essaie aussi d’être apaisant-e en leur disant que d’ici que leurs enfants aient 18 ans et fassent le test, il y aura peut-être déjà plein d’autres moyens de prises en charge. Ça permet aussi d’être rassurant: comme on le fait pour les grains de beauté, en étant contrôlé une fois par an, on navigue à vue mais on n’a pas de mauvaise surprise ou en tout cas pas trop mauvaise, car la prise en charge se fait tôt. On conseille aux parents de garder ça en tête pour leurs filles, et leurs garçons aussi.

Les garçons aussi peuvent être touchés?
Environ 1% des cancers du sein concernent l’homme. Tout homme avec un cancer du sein devrait avoir un test génétique. En outre, un homme qui a cette prédisposition peut la transmettre à ses filles et à ses fils. Selon le gène en cause, BRCA2 par exemple, il peut prédisposer au cancer de la prostate et du pancréas. Dans ces familles, il s’agit de ne pas seulement être attentif au cancer du sein chez les femmes, mais aussi chez les hommes qui en ont eu. Le cancer de la prostate comporte aussi parfois un facteur génétique.

Dans ce cas, une consultation génétique est donc un plus en matière de prévention?
Oui, l’intérêt est vraiment évident, ne serait-ce que pour le pourcentage élevé de cancers du sein et de l’ovaire avec une prédisposition héréditaire. Mieux vaut surveiller qu’arriver trop tard, même si on peut soigner les gens, et d’avoir pris les choses à l’avance.

Même les assurances commencent à être convaincues que certains tests génétiques sont utiles pour le maintien en bonne santé de la population en termes de prévention. Pour le cancer du sein notamment, les assurances se rendent bien compte du bénéfice.

En matière de santé féminine, souvent négligée dans la recherche ou les traitements notamment, c’est un progrès selon vous?
C’est un grand progrès, une appropriation du contrôle de sa santé et de la gestion du risque. Les gens pensent que la génétique est quelque chose d’assez mystérieux, mais c’est comme si on faisait une radio, on va scruter votre ADN mais rien de plus. En matière de prévention, une consultation chez le ou la généticien-ne peut autant apaiser que se dire «on prend le taureau par les cornes», on va de l’avant. De plus, les consultations sont remboursées par le TarMed. Ce n’est pas s’offrir un luxe.

Est-ce que vous constatez une augmentation des consultations?
Oui, y compris de personnes qui ne sont pas toujours envoyées par un-e médecin traitant-e. On sait par exemple qu’il y a des formes monogéniques rares de diabète qui commencent chez les jeunes. Ces consultations en prévention sont donc importantes, car le traitement peut être différent selon le type de gène en cause. Il y a quand même de plus en plus matière à surveiller et agir.

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