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Visite guidée: La ferme africaine de Karen Blixen

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«Je crois en cette ferme, je suis convaincue qu’elle finira bien par marcher. Et plus je reste ici, plus elle a de signification pour moi.» - Karen Christentze Dinesen en 1922, alors qu'elle devient (enfin!) l’unique gérante de la plantation

© De Agostini / Getty Images

Janvier 1914. A 29 ans, des rêves plein la tête, Karen Christentze Dinesen débarque de son Danemark natal à Mombasa, au sud du Kenya. But de ce voyage qu’elle espère sans retour: rejoindre son fiancé, le baron suédois Bror von Blixen-Finecke, qui vient d’acquérir une plantation de café ainsi qu’une propriété dans la banlieue verte de Nairobi.

Entre les lumières de l’aube dignes des premiers matins du monde, les peuples autochtones dont elle découvre les coutumes avec autant de respect que de fascination, la nature qui l’ensorcelle, elle tombe sous le charme de l’Afrique. Et plus particulièrement sous celui de Mbogani, où elle emménage en 1917. Il faut dire que cette «maison dans la forêt» dont elle parle avec amour dans La ferme africaine – roman autobiographique publié en 1937 et que l’on voit dans le film Out of Africa – ne manque pas d’atouts cœur.

Côté panorama, d’abord. «L’altitude combinée au climat équatorial composait un paysage sans pareil. Paysage dépouillé, aux lignes allongées et pures, l’exubérance de couleur et de végétation qui caractérise la plaine tropicale en étant absente: ce paysage avait la teinte sèche et brûlée de certaines poteries», écrit-elle ainsi.

Et côté confort, ensuite. Construite en 1912 par un architecte suédois au pied des Ngong Hills, le long de la vallée du Grand-Rift, cette ferme en pierre et toit en tuiles rouges conçue dans le plus pur style colonial tient en effet du petit paradis.

© Terry Fincher / Alamy

De la vie idéalisée à la réalité

Aujourd’hui devenu Musée Karen Blixen, Mbogani est visitable. Et l’on s’y prend à imaginer la vie de l’époque: lever de soleil dans la fraîcheur matinale, à déguster dans le sublime et vaste parc, avant de lire (travailler?) dans le confortable bureau-bibliothèque. Pour se remettre, petite douche façon pluie dans la salle de bains en faïence blanche, puis sieste dans une chambre à la douceur pastellisée, avant un solide apéritif dans le salon cossu – du Mozart diffusé par gramophone en prime –, suivi du dîner en tenue de soirée dans la salle à manger en palissandre. Le tout conclu par un dernier verre étoilé pris sur la véranda… Dans la réalité, le quotidien de Karen est clairement moins oisif.

De fait, vite agacée par son mari, qui se révèle aussi piètre époux que mauvais gestionnaire, elle prend rapidement les choses en main. En 1922, elle se sépare de Bror et, dès que le divorce est prononcé, en 1925, elle devient (enfin!) l’unique gérante de la plantation:

«Je crois en cette ferme, je suis convaincue qu’elle finira bien par marcher. Et plus je reste ici, plus elle a de signification pour moi.»

Las, les éléments sont contre elle: sol trop acide, manque d’eau, invasions de sauterelles… les récoltes sont maigres et le krach boursier de 1929 n’arrange rien puisque les cours s’effondrent. Mais Karen ne lâche rien. Non seulement pour elle, mais aussi pour ses employés et les 153 familles qui vivent sur ses terres et dont elle se sent responsable. Dans cette lente marche vers la banqueroute, elle peut toutefois compter sur ses amis Farah (son interprète somali devenu homme de confiance) et Kamante (un petit Kikuyu qu’elle adore et avec qui elle continuera à avoir des échanges épistolaires pendant des années). Ou encore Denys Finch Hatton, un aristocrate et aviateur anglais qui devient son amant dès 1928 et la pousse à écrire – conscient de son talent.

Juin 1931. Malgré les fonds importants que lui envoie sa riche famille du Danemark, la faillite est prononcée.

© Gina Rodgers / Alamy

Retour difficile

Juillet 1931. Ruinée et dévastée par la mort accidentelle de Finch Hatton deux mois plus tôt, Karen Blixen n’a d’autre choix que de quitter ce Kenya qu’elle aime tant pour rentrer au pays. A quelques jours du départ, elle écrit:

«Même si elle a été un peu plus tendre envers certains autres, je suis malgré tout persuadée que j’ai été l’une des enfants préférées de l’Afrique. Un vaste univers de poésie s’est ouvert à moi et m’a laissée pénétrer en lui ici, et je lui ai donné mon cœur. J’ai plongé mon regard dans celui des lions et ai dormi sous la Croix du Sud, j’ai vu les grandes plaines être la proie des flammes, et alors qu’y poussait une herbe verte et tendre après la pluie, j’ai été l’amie de Somalis, de Kikuyus et de Massaï, et j’ai survolé les Ngong Hills… J’ai cueilli la plus belle rose de la vie — je crois que ma maison a été une sorte de refuge pour les passants et pour les malades, et qu’elle a été pour tous les Noirs le centre d’un esprit d’amitié…»

Malheureuse et dépitée, Karen Blixen retourne donc en Scandinavie. Au seuil de la cinquantaine, elle se met à écrire pour tromper le vide, pour conjurer la tristesse d’avoir quitté Mbogani. Le succès rencontré par ses romans la console. Un peu. Mais ne change rien à son vague à l’âme. D’autant moins qu’elle est malade. Probablement atteinte d’une syphilis transmise par son mari au début de leur mariage, elle dépérit. Et meurt en 1962, à 77 ans.


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