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Octavie Delvaux décrypte la tendance des récits érotiques

Consentement les récits érotiques 2.0

Les récits érotiques se sont démocratisés et désormais, se lisent ou s'écoutent en toute liberté.

© PETITES LUXURES

Longtemps tabou et considéré comme un «fruit défendu», le récit érotique se dégustait discrètement – et l’on justifiait volontiers son goût pour la prose croustillante par une belle excuse «culturelle»: non, non, on n’avait pas dévoré Vénus Erotica, d’Anaïs Nin, ou L’ingénue libertine, de Colette, pour enclencher l’usine à fantasmes et se laisser titiller mais uniquement pour se cultiver… bien entendu!

Ce temps de la honte est aujourd’hui (heureusement!) révolu – l’érotisme s’assume et se savoure ouvertement. Et, du même coup, fleurit sur différents supports: romans, BD, mangas, audiolivres, podcasts, plateformes en ligne, ou comptes Instagram et TikTok, où il remporte de jolis succès. La preuve? La littérature estampillée New romance – des histoires d’amour épicées de scènes hot – a vu ses ventes doubler l’an passé, avec 6 millions de volumes. Résultat: elle représente désormais un achat de roman sur neuf et pèse 7% du marché du livre selon l’institut GfK. Côté «virtuel», les audios érotiques et les plateformes de podcasts telles que Femtasy, VOXXX, Le Son du Désir ou Colette se confesse, pour ne citer que celles-ci, cumulent des millions d’écoutes.

Quand et pourquoi les choses ont-elles évolué? Décryptage en compagnie de la médiéviste et autrice de récits érotiques Octavie Delvaux, à qui l’on doit notamment les fameux Sex in the Kitchen ou Éloge des petites bites (Éd. La Musardine).

FEMINA Vous dites que le récit érotique séduit surtout les femmes. Pourquoi?
Octavie Delvaux À mon avis, ces histoires, qui sont d’ailleurs le plus souvent écrites et/ou lues par des femmes, viennent combler un besoin de références sensuelles… que les hommes peuvent par exemple trouver dans la pornographie filmée.

Il y a pourtant beaucoup d’amatrices de films pornos!
Certes. Pourtant, je pense qu’on n’a pas tort de dire que les femmes sont généralement moins dans le visuel et plus dans l’imaginaire, à l’affût d’un érotisme suggéré plutôt que montré. En l’occurrence, la dimension sensuelle est davantage développée dans les récits écrits ou audio, qui constituent des refuges érotiques leur correspondant souvent mieux… et qu’elles se sont donc appropriés!

Approprié au point qu’on assiste depuis quelques années à une véritable explosion!

Il faut rappeler qu’il y a toujours eu des récits érotiques.

Mais ce qui les a rendus vraiment populaires et les a démocratisés, c’est la sortie de 50 nuances de Grey, en 2013. Je ne saurais pas expliquer clairement pourquoi cette trilogie a eu un tel retentissement et s’est vendue à 125 millions d’exemplaires dans le monde alors que d’autres romans de cet acabit avaient été publiés avant, mais le fait est qu’elle a vraiment été un déclencheur. En fait, elle a permis à beaucoup de femmes de se rendre compte qu’elles aimaient lire ou se faire susurrer à l’oreille des choses un peu coquines et qui les émoustillaient. À partir de là, une demande assez claire s’est manifestée. L’offre a donc suivi sous différentes formes! Cela dit, je pense que l’essor du récit érotique est aussi à mettre en parallèle avec celui des sex-toys.

C’est-à-dire?
Ces dernières années, en plus de s’améliorer «pratiquement» et technologiquement, les sex-toys se sont largement banalisés – tout comme les récits érotiques. Or, je pense que ces deux facteurs contribuent au bien-être féminin puisqu’ils aident les femmes à s’approprier leur sexualité, leur désir et leur plaisir et, par la force des choses, à les rendre moins dépendantes d’un ou d’une partenaire: grâce à ces «outils», qu’il s’agisse d’excitation ou de satisfaction, JE décide, sans avoir à compter sur qui que ce soit d’autre!

Pour en revenir aux récits érotiques… sont-ils le reflet des évolutions sociétales actuelles?
Pas vraiment: la plupart des récits érotiques «grand public» restent encore extrêmement «classiques» dans le sens qu’ils fonctionnent selon des schémas le plus souvent très hétéronormés. On trouve bien entendu des histoires lesbiennes mais on n’est pas dans le queer. Au grand regret de mon éditrice, d’ailleurs, qui a du mal à trouver des autrices ou auteurs convaincants dans ce registre-là.


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