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Je suis l’heureuse maman d’Eliott, un petit bout de chou de 1 an qui a littéralement transformé ma vie. Si ma grossesse s’est déroulée sereinement, l’accouchement a été pour le moins fracassant. Ce 22 janvier 2015 restera gravé à jamais dans ma mémoire. Cette nuit-là, ayant des contractions relativement espacées, je me préparais à partir pour la maternité. Mais les événements se sont précipités quand j’ai senti que mon bébé pointait déjà le bout de son nez! Paniquée, je me suis allongée sur le carrelage de la salle à manger tandis que mon mari composait le 144.

Comme dans un film, ils nous ont dit de préparer de l’eau chaude et des draps. Nous avons appelé à la rescousse une de nos voisines sage-femme, une chance vu l’urgence de la situation! C’est elle qui m’a posé Eliott sur le ventre. J’ai pu le tenir contre moi quelques instants avant d’être transférée en ambulance à l’hôpital. La joie d’être maman d’un deuxième petit garçon a été de courte durée. En effet, en examinant mon nourrisson, la pédiatre a constaté qu’il avait la nuque large. Ces mots m’ont glacé le sang car je savais à quoi cela faisait référence. J’en étais convaincue: elle devait faire erreur, car tous les examens effectués durant ma grossesse étaient normaux selon mon gynécologue. S’il avait vu quelque chose de suspect, il me l’aurait dit. Seule dans la chambre avec mon bébé, j’ai refusé d’admettre l’évidence malgré certaines caractéristiques physiques. Je voulais seulement profiter des premières heures de vie de mon petit bonhomme.

Comme un couperet

Mais j’avais un mauvais pressentiment, d’autant plus que les médecins ont tenu à examiner encore Eliott. Après ce qui m’a semblé une éternité, ils m’ont demandé de les suivre. Mon cœur battait la chamade. Quand ils m’ont annoncé qu’ils avaient de sérieuses suspicions de trisomie 21, le ciel m’est tombé sur la tête. Comment cela pouvait-il être possible de n’avoir rien décelé quand j’étais enceinte? Si on avait vu quoi que ce soit d’anormal, nous aurions tout «stoppé», car il était hors de question d’avoir un enfant «différent». Pourquoi cela m’arrivait à moi qui ai si peur du handicap? Des milliers d’interrogations se bousculaient dans ma tête.

Mon mari a été aussi anéanti que moi par cette nouvelle. Nous avions l’impression de nous retrouver en plein cauchemar, dont nous ne pourrions jamais nous extirper maintenant qu’Eliott était parmi nous. J’ai passé une nuit blanche à pleurer, à réfléchir, à me demander pourquoi, à culpabiliser et à en vouloir à la terre entière. J’avais le sentiment que ma vie était fichue, que le clap de fin était tombé brutalement comme un couperet. Je n’arrivais pas à concevoir une vie de famille avec ce petit être différent.


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Face à ma réaction de rejet, une employée du centre hospitalier m’a dit que si c’était vraiment trop un fardeau pour nous, nous avions le droit de penser à confier notre bébé à l’adoption. Au lieu de m’horrifier, cette idée m’a soulagée. Oui, peut-être que quelqu’un d’autre serait capable de lui donner de l’amour, car moi je ne m’en sentais pas la force. Après discussion avec mon époux, nous avons donc envisagé de «faire tomber du nid» notre petit. Pour ne pas qu’on prenne de décision hâtive, un médecin nous a proposé de garder Eliott à la maternité le temps du week-end, afin qu’on puisse réfléchir à la situation.

«Tu vas y arriver»

Rentrer à la maison sans mon bébé a été très difficile. Mais j’étais prise dans un tel tourbillon émotionnel que je ne savais plus où j’en étais. Le soir même, je me suis confiée à une amie qui m’a dit qu’elle connaissait une autre famille dans la région qui avait vécu une situation identique trois ans auparavant. Je lui ai demandé s’il était possible de la rencontrer. Sachant qu’il fallait nous décider rapidement, mon mari et moi avons pensé qu’il ne serait peut-être pas inutile d’échanger avec ces gens avant d’entamer une procédure pour faire adopter notre nouveau-né. Nous sommes donc entrés en relation avec ce couple, parents d’un bambin de 3 ans atteint de trisomie, qui a accepté très gentiment de nous recevoir le lendemain. Quand nous sommes arrivés chez eux, nous avons été accueillis par un homme avec un large sourire qui portait sur ses épaules un petit gars tout aussi épanoui que son père. Ils avaient l’air si heureux que cela m’a interloquée. Comment cela pouvait-il être possible alors que moi j’étais au fond du trou?

Nous avons découvert une famille tout ce qu’il y a de plus «normale», avec trois enfants. Dont Louis, le deuxième, adorable avec ses traits rigolos et sa grande sensibilité propres au syndrome de Down. Nous avons pu parler à cœur ouvert avec ces inconnus qui ont traversé la même épreuve que nous. Ils ne nous ont pas caché que pour eux aussi cela avait été dur au début et qu’ils avaient mis du temps à accepter le handicap. Mais ils nous ont assuré que c’était tout à fait possible d’avoir une vie de famille malgré cela. Alors que je versais des larmes en les écoutant, le petit Louis s’est approché de moi et m’a caressé la jambe comme pour me consoler. L’émotion m’a submergée. Au moment précis où sa petite main s’est posée sur moi, son regard bleu dans mes yeux, j’ai cru entendre: «Tu verras, tu vas y arriver.»

Un «ange tombé du ciel»

Au terme de cette rencontre, mon mari et moi avons fait quelques pas au bord du lac sans échanger un mot. Nous en étions maintenant sûrs, il fallait qu’Eliott rejoigne notre «nid», sa place était auprès de nous. Cette unique nuit loin de lui, sa chambre vide, son absence: tout cela nous était devenu insupportable. Nous sommes vite allés le chercher pour le ramener dans son foyer.

Un an après, je suis heureuse qu’Eliott ait réussi à déjouer les pièges de la médecine, car sans ça il n’aurait jamais pu enrichir nos vies et nous apporter tant de joies. Nous n’aurions jamais découvert sa douceur, sa gentillesse et son sourire, et nous n’aurions pas eu l’occasion de voir la vie sous un angle différent. Car cet «ange tombé du ciel» a bouleversé toutes les convictions que nous pouvions avoir. Je ne le remercierai jamais assez de m’avoir choisie comme maman, car grâce à lui j’apprends chaque jour sur la vie et sur moi-même.

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