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Décryptage: le syndrome de l’imposteur

Décryptage: le syndrome de l’imposteur
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La peur d’être démasqué à un moment ou à un autre, que le monde se rende compte de notre présumée incompétence peut devenir invalidante au quotidien.

Le type de personnes les plus touchées

Malgré son appellation et le fait qu’il a été étudié par des psychologues, le syndrome de l’imposteur n’est pas considéré comme une pathologie par le DSM-5 (le répertoire des maladies mentales). Il toucherait 70% des gens à un moment ou à un autre de leur vie (source: «Traiter la dépréciation de soi, le syndrome de l'imposteur», Kevin Chassangre et Stacey Callahan, éd. Dunod). Les femmes y seraient plus sujettes, ainsi que les personnes à haut potentiel (surdoué(e)s), les autodidactes et les individus ayant bénéficié de discrimination positive.

Les personnes atteintes de ce trouble, pourtant souvent brillantes, tendent à adopter un style d'attribution externe pour les situations avantageuses. Par exemple, elles associent leur réussite à la chance, à leurs relations, à des concours de circonstances indépendants de leur volonté, et non à leurs propres capacités.

De l’apparition des signes aux répercussions professionnelles

Les premières occurrences de ce syndrome sont souvent observables dès le cycle scolaire: un enfant qui a de bonnes notes attribuera alors sa réussite au fait que l’enseignant «l’aime bien», et non à ses capacités propres. Et ce phénomène peut continuer tout au long des études et de la vie professionnelle: «mes professeurs vont-ils se rendre compte que je suis bien trop timide pour travailler dans le domaine des médias? Comment mes employeurs, qui m’ont reçu(e) en entretien, puis engagé(e) ont-ils pu ne pas se rendre compte que je ne suis pas assez compétent(e)? Au secours, ils vont finir par s’en apercevoir, c’est sûr!»


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L’imaginaire développe alors des scénarios catastrophe où le patron, l’associé ou le supérieur qui nous avait tant fait confiance, s’aperçoit de la supercherie et ne peut que réagir: c’est dans ces moments-là qu’il invente un licenciement, une mise au pilori attendue et «méritée».

Pour dissimuler l’«imposture», le sujet met en général en œuvre l'une ou l'autre de deux stratégies: en faire trop (l’«overdoing») ou pas assez (l’«underdoing»). Par exemple, en situation d'examen, celui qui emploie la stratégie «overdoing» se prépare très à l’avance et de façon intensive, ce qui augmente sa probabilité de succès. Or, il attribue ensuite ses excellents résultats uniquement à l'effort qu'elle a fourni et en aucune façon à son potentiel. En revanche, l'individu qui applique l’«underdoing», se prépare trop tard et très peu à l'examen. Cela lui permet de se protéger en cas d'échec en se disant qu'il aurait pu réussir s’il avait travaillé davantage. Mais lorsque le succès est tout de même au rendez-vous, il va l'attribuer à la chance plutôt qu'à ses capacités propres.

Les périodes de transition - l’entrée en études supérieures, une promotion, un changement de poste ou encore le jour où l’on devient parent - sont autant d’occasions de faire ressurgir ce symptôme.

Le sexe féminin serait trop modeste

Même si de plus en plus de femmes font carrière, la question de savoir si elles sont vraiment à leur place et légitimes au travail revient régulièrement dans leur discours. Elles se demandent si elles ne seraient pas plus utiles ailleurs, dans le rôle d’assistante auprès des enfants par exemple.

Au travail, même lorsqu’elles ont un niveau de responsabilités élevé, les femmes se définissent comme des contributrices, ne se sentent pas porteuses d’un projet, ni leader. Elles ne sont pas encore forcément dépêtrées des places où on les a cantonnées pendant des siècles. Cela s’applique particulièrement lorsqu’elles briguent un poste à prédominance «masculine», dans une branche technique, du type informatique, notamment.


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Lors d’une convention de youtubeurs en France, qui réunissait une soixantaine de vidéastes français spécialistes des jeux vidéo, et pendant lequel ils étaient invités à animer des ateliers et à rencontrer leurs fans, seules cinq femmes étaient présentes. L’organisation, consciente du problème, n’a pourtant alors contacté que des youtubeuses avec des communautés importantes et qui ont, en conséquence, un agenda surchargé qui ne leur a pas permis de se déplacer. D’autres auraient décliné l’invitation, «ne se sentant pas légitimes ou assez pertinentes». (source: «les inrocks»).

Il peut être encore assez intimidant de participer en tant qu’intervenantes à des conférences ou des événements où les femmes sont sous-représentées. La peur de se retrouver seule, de ne pas être experte, à la hauteur, ou de ne pas tout comprendre peut, malheureusement, s’avérer encore très présente chez les femmes.


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De l’art de bien se vendre

Cette situation se retrouve également dans les milieux artistiques, dont le jugement est en majorité subjectif et auxquels on accède souvent par la voie autodidacte plutôt que par les grandes écoles. Pour percer dans ces domaines, il faut aussi avoir du charisme et savoir «se vendre». L’ouvrage fourni est particulièrement personnel et intime, et donc d’autant plus difficile à faire valoir en tant que travail professionnel, et non comme une activité de loisir.

Une piste pour solutionner ce problème serait peut-être de faire émerger des modèles féminins dans ces milieux, pour que les enfants et les jeunes femmes puissent plus facilement s’identifier. Des initiations aux métiers techniques dans les écoles, ouverts à tous, pourraient également aider à diminuer ces disparités.


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Les stars ne sont pas épargnées par le syndrome de l’imposteur: Kate Winslet et Meryl Streep, par exemple, y ont été sujettes.

«Parfois, je me lève le matin avant d’aller sur le tournage, et je me dis je ne peux pas le faire, que je suis un imposteur!» Kate Winslet

«On se dit: pourquoi est-ce que les gens voudraient me voir à nouveau dans un film? Et de toute façon je ne sais pas jouer la comédie alors pourquoi est-ce que je fais tout ça?» Meryl Streep

La verbalisation constitue une étape cruciale pour surmonter le problème. Il faut en outre prendre conscience que se faire confiance implique aussi de faire confiance à l’autre qui, loin d’être incompétent, sait percevoir et évaluer nos capacités et qualités. Et surtout ne pas oublier que ce phénomène peut toucher tout le monde. La voisine, le collègue, la mère, l’ami qu’on idéalise a sans doute parfois aussi des accès de modestie exacerbée. Il faut descendre ces gens du piédestal imaginaire sur lequel on les a perchés et ne plus douter de nos compétences.

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