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Quelles femmes pour diriger la BNS?

Quelles femmes pour diriger la bns

«Évoluer dans un monde masculin ne m’a jamais gênée. J’ai aussi vu l’arrivée des femmes dans la branche et j’ai pu mesurer ce qu’apporte la diversité», Eftychia Fischer, actuelle directrice de la BNS, dans 24 heures, en 2021.

© JEAN BERNARD SIEBER/BCV

Déjà sous le feu des critiques après le pactole de près de 110 milliards de francs qu’elle a mis sur la table pour la fusion urgente de Credit Suisse et d’UBS, la Banque nationale suisse (BNS) va perdre l’unique femme qui siégeait dans sa direction générale. La Genevoise Andréa Maechler, actuelle numéro 3 de l’institut et à la tête du département Marchés monétaires et des changes, Gestion des actifs, Opérations bancaires et Informatique depuis 2015, va en effet rejoindre la Banque des Règlements Internationaux (BRI) pour devenir sa nouvelle directrice générale adjointe dès septembre prochain.

Un départ regrettable au vu de la rareté des effectifs féminins dans l’univers de la finance, mais malgré tout peu surprenant pour nombre d’observateurs, puisque le poste de numéro 2 de la BNS, laissé vacant en 2022 avec le départ en retraite de Fritz Zurbrügg, ne lui avait pas été confié: c’est finalement Martin Schlegel, œuvrant au sein de l’institut depuis deux décennies, qui avait été nommé vice-président par le Conseil fédéral. Faut-il en déduire que les perspectives pour les femmes sont bouchées dans les plus hautes sphères de la finance helvétique? Pas si sûr.

Eftychia Fischer, physicienne et banquière

Car parmi les favoris au siège de numéro 3 de la BNS, les noms de deux candidates romandes semblent émerger dans les médias. La première n’est autre qu’Eftychia Fischer, actuelle présidente du conseil d’administration de la BCV. Celle qui a pris ses fonctions en janvier 2022 avait fait œuvre de pionnière bien malgré elle en devenant la première femme à prendre les rênes de la banque vaudoise après 175 longues années d’existence, preuve s’il en fallait que la parité homme femme est une donnée plutôt récente dans la stratosphère de la finance.

Outre ses compétences, son ascension fulgurante dans le milieu est peut-être aussi liée au fait qu’elle vient d’une discipline des sciences dures, réputées plus masculines, prompte à parler aux décideurs hommes qui peuplent le secteur avec une majorité écrasante. Née en Grèce en 1963 avant de s’installer en Angleterre à l’âge de six ans, cette passionnée de chiffres est en effet sortie de l’Imperial College avec un diplôme de physique, avant d’intégrer le monde bancaire londonien.

«Évoluer dans un monde masculin ne m’a jamais gênée, confiait-elle dans une interview accordée à 24 heures fin 2021. J’ai aussi vu l’arrivée des femmes dans la branche et j’ai pu mesurer ce qu’apporte la diversité. La diversité en général, pas uniquement des sexes.»

C’est dans la capitale britannique qu’elle rencontre un Suisse alors en stage dans le même établissement qu’elle, qui va devenir son mari. Le couple s’est installé en Argovie dans les années 80, même si l’un ou l’autre a parfois occupé des postes à l’étranger, Eftychia Fischer travaillant notamment à Paris et à Malte.

Rajna Gibson Brandon, professeure et chercheuse

Depuis sa nomination à la BCV, elle a rapidement dû faire face à une ère définie par les crises: hausse des taux de la période post-Covid à l’international, inflation, guerre en Ukraine, mais aussi forte instabilité des cryptomonnaies, qu’elle qualifie encore d’investissement assez peu recommandable, car risqué, dans ses interviews.

Reste qu’elle n’est pas la seule Romande citée comme idéale pour rejoindre le trio de tête de la BNS. Le nom de Rajna Gibson Brandon est également évoqué pour succéder à Andréa Maechler. Professeure en finance à l’Université de Genève depuis 2008, elle est une personnalité tenue en haute estime dans ce secteur en Suisse, grâce à son parcours académique brillant qui l’a conduit à enseigner à l’Université de Lausanne comme à celle de Zurich.

Dans les années 2000, Rajna Gibson Brandon a aussi dirigé Finrisk, le Pôle de recherche national (PRN) «Évaluation financière et gestion des risques» du Fonds national suisse. À l’époque, elle était alors l’une des deux seules femmes à conduire un PRN, contre 18 hommes au poste équivalent.

© UNIGE

Éviter les accidents

En 2022, on l’a en outre élue membre du conseil de la BNS jusqu’en 2024 en remplacement de Monika Bütler. Cette mordue de mathématiques, née en 1962 dans une famille de chercheurs, aime la science et l’abstraction, mais n’oublie cependant pas l’élément humain, clef de voûte selon elle du comportement des marchés.

«On peut comparer les instruments financiers aux voitures de sport, les accidents ne peuvent être évités que si la vitesse est adaptée aux circonstances», expliquait-elle en 2006 dans le magazine Horizons.

Une phrase qui en dit long sur l’importance, à ses yeux, de savoir gérer les risques dans un univers de la finance souvent tenté par le coup de poker à gros rendement.

L'avantage prouvé d'avoir des femmes

D’ailleurs, Eftychia Fischer et Rajna Gibson Brandon ont en commun cette approche réfléchie, rationnelle, d’un secteur qui peut rapidement se laisser déborder par ses excès. C’est peut-être pour leur profil de personnalités ayant bien la tête sur les épaules que la BNS, justement, regarde vers elles. La littérature scientifique a même prouvé que la présence de femmes dans ce secteur ultra-masculinisé était un véritable atout.

Lorsqu’elles occupent des postes importants dans les grandes banques, «plusieurs études prouvent qu’elles obtiennent de meilleurs rendements que leurs homologues masculins, car moins impulsives, moins dans l’excès de confiance», faisait remarquer dans nos pages, l’année dernière, Elyès Jouini, professeur d’économie à l’Université Paris Dauphine et responsable de la Chaire UNESCO Femmes et Science. Des femmes dans la finance, qu’elles siègent à la BNS ou dans les banques privées? L’économie mondiale n’a qu’à y gagner.

Les autres femmes fortes de la finance mondiale

Kristalina Georgieva Docteure en économie et universitaire bulgare née en 1953, elle passe par la Commission européenne puis la Banque mondiale, avant d’être choisie pour diriger le Fonds monétaire international (FMI), en 2019, pour succéder à la Française Christine Lagarde.

Janet Yellen Le Prix Nobel d’économie Joseph Stiglitz dit qu’elle était une de ses meilleures élèves. La carrière de cette native de Brooklyn lui donne raison: professeure réputée, elle fut présidente de la Réserve fédérale des États-Unis sous Obama, avant d’être choisie pour le poste clé de secrétaire au Trésor en 2021.

Christine Lagarde Son expertise d’économiste, mais aussi son expérience politique en tant que ministre sous Nicolas Sarkozy constituent un CV idéal. Après avoir dirigé le FMI entre 2011 et 2019, elle est ainsi devenue présidente de la Banque centrale européenne.

Elvira Nabioullina C’est l’un des plus grands atouts de la Russie de Poutine, actuellement jugulé par les sanctions découlant de l’invasion de l’Ukraine: cette brillante économiste, présidente de la Banque centrale russe, fait tout pour garder son pays à flot. Mais pour combien de temps?

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