Job
L’édito de Sonia Arnal: J’ai juste deux secondes
«J’en ai juste pour deux secondes.» C’est le nouveau mantra autour de moi. Chaque fois que je vais quelque part, on me demande «deux secondes» de mon temps pour répondre à une question, rendre une décision ou trancher (ça c’est au travail), relire un texte, chercher un pull égaré ou comprendre une facture (ça c’est à la maison), ou encore signer une pétition, verser une obole, participer à une action (nettoyer une plage, un versant de montagne) – ça c’est dans la rue.
Enfin, précaution oratoire… menterie, disons-le tout net. Comme vous le savez d’expérience si vous avez plus de 12 ans, dans la vraie vie, même les choses élémentaires prennent bien plus de temps que… Par exemple, si c’était si vite fait de ratisser sérieusement un parc et de le délivrer des déchets qui l’encombrent, il n’y aurait pas besoin de draguer les volontaires dans la rue. C’est typiquement une activité qui va te prendre la journée. Pareil avec cette idée de nettoyer le frigo: tu penses qu’en deux secondes, tu vas éponger la coulure de lait, mais deux heures plus tard tu es toujours en train de laver le bac à légumes dans lequel la carotte moisie a laissé une auréole verte.
Changement d'ère
En outre, il y a dévalorisation, voire mésestime. Cette formulation «juste deux secondes» implique en gros que la prestation qu’on demande est d’une évidence crasse, qu’elle ne vaut rien, en somme.
Non parce que, à force de ne faire que des choses qui prennent deux secondes, à la fin de la journée, entre le boulot, la marmaille, les tâches administratives et le ménage, on a quand même trimé 12 heures au bas mot.
J’ai donc décidé d’agir. J’annonce ici solennellement que, désormais, j’accorde aux gens le temps qu’ils me réclament. Le prochain qui se pointe la bouche en cœur pour me demander «deux secondes» pour lui résoudre un problème, je lui dis oui. Et il n’aura pas une seconde de plus.
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