Féminisme et extrémismes
L'édito de Géraldine Savary: «Les anges de l’extrême droite»
Le 25 novembre 2021, lors des manifestations nationales dénonçant les violences faites aux femmes, une banderole est apparue dans les rangs des cortèges, qui jouait l’amalgame entre l’insécurité des femmes dans la rue et les étrangers. Tollé des autres manifestantes, heurts, échauffourées, intervention d’un agent de police, qui traduisent un paradoxe: comment concilier les revendications féminines en faveur de l’égalité entre les sexes, du droit à disposer de son corps avec un discours xénophobe, ultra-sécuritaire et ultra-réactionnaire?
Femina s’est intéressé à ces femmes qui manifestaient à Lausanne et au groupe auquel elles appartiennent, Némésis, du nom grec de la déesse de la vengeance. En Suisse, une vingtaine de jeunes filles en feraient partie, issues de différents cantons romands, rattachées à la branche française de ce groupuscule d’extrême droite qui prône des valeurs identitaires.
De Marine Le Pen à Alice Weidel en passant par Céline Amaudruz
Plus généralement, le paysage des extrêmes droites s’est féminisé. Au niveau politique, Marine Le Pen tient le Rassemblement national et est créditée de 14,5% des voix; en Allemagne l’AFD propulse des leaders féminines, telle Alice Weidel, cheffe du parti dans le Baden Wurtemberg; en Hongrie, au Danemark, ou en Italie, des silhouettes tirées à quatre épingles et perchées sur leurs talons aiguilles arpentent depuis longtemps l’échiquier politique de la droite dure; Céline Amaudruz en Suisse s’est imposée comme la figure incontestée de l’UDC en Suisse romande.
Hors du champ politique, les mouvements radicalisés à l’origine très masculins disposent désormais de porte-parole féminines. Souvent jeunes, rassurantes, d’apparence inoffensive, elles dédiabolisent les discours et les arguments de l’extrême droite en détournant les revendications féminines à leur profit. Ainsi l’insécurité que ressentent les femmes dans la rue et les violences dont elles sont parfois victimes sert de prétexte pour des slogans anti-migrants, anti-étrangers, ou anti-musulmans.
Une victoire au goût amer
La bonne nouvelle, c’est que même dans ces univers très masculins où l’influence se mesure au taux de testostérone, des femmes s’imposent au-delà du rôle de vitrine dans lequel on tente de les réduire. Qu’elles se réclament du féminisme montrent que ce dernier est sorti de l’image folles furieuses dont ces mêmes mouvements les affublaient. La mauvaise, c’est de les voir contribuer à défendre des formations ou des idées dont un des traits idéologiques fondamentaux est le sexisme, la misogynie, la différenciation stéréotypée des rôles et des genres. Parfois les victoires ont un goût plus amer que les défaites.
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