
Le choix du prénom
L'édito de Géraldine Savary: «Je vous salue, petites Marie»

«Rappelons d’abord aux candidats et aux candidates aux élections françaises et aux commissaires européens que le choix et l’utilisation d’un prénom est une affaire privée qui raconte la place qu’a notre enfant dans notre cœur, dans notre couple, dans notre histoire.» - Géraldine Savary
© ANOUSH ABRARChoisir un prénom n’est pas le moment le plus facile quand un enfant s’annonce dans un foyer. Les couples se mettent rarement tout de suite d’accord, l’un se remémorant sa première petite copine («Laure-Audrey-Jennifer, j’aime bien») ou son actrice préférée («et pourquoi pas Scarlett?»), l’autre préférant un prénom qui prépare à des carrières de professeurs ou d’écrivains («Aurélien-Hadrien-Antoine, ça sonne bien, non?»). Les grands-parents s’en mêlent bien sûr, ils disposent d’un vaste patrimoine de patronymes à recaser (grand-mère Germaine, tante Thérèse, cousin Albert).
Et voilà qu’en plus de tout ça se penchent sur le berceau des nouveau-nés Éric Zemmour et la Commission européenne, tels des djinns inquiétants. Le premier a annoncé vouloir revenir à la loi française de 1803, abrogée en 1993, qui obligeait les parents à choisir un prénom dans les calendriers officiels. De l’autre côté, la Commission européenne a récemment publié un document interne – qu’elle a retiré ensuite – pour inviter ses membres à éviter d’utiliser le prénom de Marie, considérant qu’il était trop marqué par la religion chrétienne. Un évêque s’en est mêlé, d’autres crient au wokisme. Nos enfants sont à nouveau otages de débats ridicules et stériles.
Un choix indépendant des religions
Rappelons d’abord aux candidats et aux candidates aux élections françaises et aux commissaires européens que le choix et l’utilisation d’un prénom est une affaire privée qui raconte la place qu’a notre enfant dans notre cœur, dans notre couple, dans notre histoire. On a toutes et tous des rêves secrets vis-à-vis des prénoms, le nôtre qu’on a détesté et qu’on a mis du temps à aimer, les personnes qu’on a chéries et à qui on souhaite rendre ainsi hommage, des livres, musiques, films qui nous ont accompagnés ou consolés, des héritages qu’on a peut-être envie de transmettre, des expériences qui renaissent par la grâce d’une nouvelle vie.
D’autre part, le choix et l’utilisation d’un prénom n’ont plus rien à voir avec les religions. On retrouve Marie dans la Bible et le Coran, chez Cabrel, Godard ou Patrick Juvet. Les prénoms les plus utilisés des Romands en 2021 pour les filles sont Emma, une sainte teutonne catholique, Mia, la variante suédoise de Myriam, Mila, un prénom slave qui évoque la douceur. Quant aux garçons, Gabriel existe dans les trois Livres, Liam vient de l’hébreu, Noah de l’arabe. Que du joli monde dans les maternités.
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