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L'édito de Géraldine Savary: «Hommage à Noelia de Jesus, maquilleuse»

Edito Geraldine Savary redactrice en chef Femina

«Noelia, quand je m’étais confiée à ses mains, m’avait dit: "Je fais des choses très discrètes, mais j’ai une signature, il y a des gens qui reconnaissent mon maquillage." Sa signature perdure, comme notre immense tristesse.»

© ELSA GUILLET

Sur la photo qui surplombe cet édito, j’ai les traits reposés, la peau lumineuse et le regard éveillé. Ne croyez pas que le résultat tient des bontés de la nature. Si nos visages sont à peu près présentables, c’est grâce à des mains légères comme des plumes, à des anges bienveillants qui posent ici et là un peu de couleur, quelques grains d’éclat, une étincelle au bord de l’œil. Et voilà que la magie opère.

Une de ces magiciennes, une fée plutôt, celle qui a rendu possible la photo de cet édito, vient de décéder dans l’accident tragique qui endeuille le canton de Neuchâtel. Noelia de Jesus avait juste trente ans, elle travaillait depuis de nombreuses années pour Femina. Elle a maquillé et coiffé non seulement les membres de la rédaction, non seulement les mannequins pour des shootings mode, mais aussi une bonne partie des personnes qui posent dans nos pages portraits. Des connues, des inconnues, des femmes comme vous et moi, vieilles ou jeunes, novices ou habituées aux séances photos sont passées entre les mains de Noelia. À chaque fois, elle les rassurait, elle traquait leur personnalité, comprenait ce qu’elles souhaitaient révéler ou cacher. Elle scrutait les visages, les peaux, non pour y chercher les défauts mais au contraire pour faire vivre les élans, les passions et les enthousiasmes au-delà du figé de l’image.

Sa signature

Pour magnifier nos traits, les maquilleuses-coiffeuses arpentent la Suisse romande. Souvent seules, indépendantes de cœur et de statut, elles se déplacent avec de lourdes valises, à la demande, pour un portrait gros plan, pour accompagner les actrices et les acteurs d’un spectacle, parce qu’il y a une assemblée générale et que les administrateurs ne veulent pas avoir l’air crevé sur grand écran. Elles doivent rester disponibles, montent dans des trains vers des destinations inconnues, conquièrent en quelques minutes la confiance des personnes dont elles vont s’occuper. Car quoi de plus intime que d’offrir son visage? Dans leur bagage, elles cachent leurs secrets de fabrication. Des palettes de fards, des fonds de teint pour toutes les carnations, des pinceaux de tailles infinies, des cotons, des éponges, des brosses. Parfois, elles sculptent le perché des pommettes, les angles du menton, le creux des joues juste avec leurs doigts. Leur travail est invisible, pire, il ne doit pas se voir.

Noelia, quand je m’étais confiée à ses mains, m’avait dit: «Je fais des choses très discrètes, mais j’ai une signature, il y a des gens qui reconnaissent mon maquillage.» Sa signature perdure, comme notre immense tristesse.

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