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Interview

L'autrice Emy LTR libère la parole autour de la fausse couche

Lautrice emy ltr libere la parole autour de la fausse couche JORDAN DEAL

«On parle de la fausse couche comme de quelque chose de mécanique. Mais pour moi, quand j’ai perdu mon bébé à 9 semaines, j’avais son prénom, j’avais les couleurs de sa chambre, je lui parlais. J’estimais avoir le droit d’exprimer ma peine», confie Emy Letertre, alias Emy LTR pour ses millions d'abonnés sur les réseaux sociaux.

© JORDAN DEAL

Face caméra sur Zoom, Emy Letertre, connue de ses 1.6 million d’abonnés Youtube et de ses 1.1 million de followers Instagram sous le nom de Emy LTR, a la mine de la nouvelle maman comblée. Quoique. «Je me réjouissais que mon fils soit le bébé parfait et qu’il fasse ses nuits, mais là il fait ses dents… c’est moins reposant», s’amuse Emy, la petite trentaine. Son fils a huit mois. Et c’est dans un livre, Daronne: La grossesse dure un an (Éd. Albin Michel) qu’elle a choisi de raconter ses grossesses. Car oui, il y en a deux. La première s’est terminée par une fausse-couche à neuf semaines, en pleine crise du Covid. Deux mois plus tard, elle était à nouveau enceinte de celui qui, ces jours-ci, fragmente ses nuits.

Avant de se décider à les publier, Emy avait couché ses mots dans un journal intime jusqu’à ce qu’arrive sa fausse couche, avec son lot de culpabilité et de souffrances tant physiques que morales. En soixante chapitres explicites, elle se raconte du même ton franc et direct que celui qui a fait sa notoriété sur les réseaux sociaux. Aguerrie à ces derniers depuis une bonne dizaine d’années, Emy n’a pourtant pas échappé aux commentaires déplacés, voire carrément blessants, lorsqu’elle exposait ses préoccupations de femme enceinte, de femme qui perd son bébé (dans les WC), de femme qui retombe enceinte puis accouche, de femme en post-partum qui retrouve son corps. Entre autres joyeusetés de la maternité dont on ne parle pas forcément ouvertement. Aujourd’hui apaisée, elle veut témoigner et partager. Interview.

FEMINA Pourquoi avoir choisi le papier pour raconter vos grossesses?
Emy Letertre Même si j’ai démarré sur les réseaux sociaux et que je trouve ces plateformes géniales, pour parler de quelque chose qui me touche autant que mon fils et ma première grossesse, je n’avais pas envie de le faire sur quelque chose d’aussi consommable que du réseau social sur lequel on scrolle très rapidement. Je souhaitais avoir un support plus élégant pour mon fils, pour ceux qui ont envie de connaître notre histoire. Ce n’est pas la même démarche.

Quel a été le déclic?
J’avais commencé à écrire mon journal, que j’ai arrêté lorsque j’ai fait ma fausse couche. C’est en voyant le nombre de messages en réaction à l’annonce de la perte de mon bébé que j’ai décidé de continuer à écrire. Quand j’ai perdu mon bébé, j’ai cherché des témoignages de femmes qui étaient retombées enceinte, alors je me suis dit que de partager mes grossesses pouvait peut-être aider celles qui étaient dans la même situation.

Parmi les messages reçus suite à votre fausse couche, lesquels vous ont le plus frappée?
Ceux de toutes celles qui n’avaient jamais osé en parler et qui s’autorisaient à le faire. Je me suis dit que si mon histoire pouvait être un déclencheur, ça en valait la peine. Le jour où on arrêtera de minimiser les fausses couches, la communication se fera plus simplement. J’ai aussi reçu des messages monstrueux, notamment certains qui comparaient ma fausse couche à une gastro… Moi je suis blindée - et plutôt épargnée - depuis le temps que je suis sur les réseaux, mais pour une femme qui est fragile et fragilisée, on peut comprendre qu’elle ne veuille pas en parler en entendant ce genre de commentaire.

Comment avez-vous réagi aux remarques du style «ce n’est pas si grave», «t’en auras un autre»?
On ne nous autorise pas à faire le deuil de cette grossesse qui se termine trop tôt. Quand on vous dit «tu en auras d’autres, la nature est bien faite, ça veut dire que tu peux tomber enceinte», On parle de ça comme de quelque chose de mécanique. Mais pour moi, quand j’ai perdu mon bébé à 9 semaines, j’avais son prénom, j’avais les couleurs de sa chambre, je lui parlais. J’estimais avoir le droit d’exprimer ma peine.

Pour parler de votre deuxième grossesse sur les réseaux sociaux, vous avez attendu d’avoir un ventre bien rond. Pourquoi?
Après l’expérience de la fausse couche, je voulais vraiment attendre les trois mois de grossesse pour l’annoncer publiquement. C’était une manière de montrer aux femmes qu’on peut retomber enceinte rapidement - deux mois après ma fausse couche dans mon cas - et que ça peut bien se passer. Même si j’étais bien malade… mais ça j’en parle aussi dans mon livre.

Quand vous avez posté une photo de vous en brassière devant le miroir deux semaines après votre accouchement, les réactions n’ont pas toutes été tendres…
Quand j'ai publié cette photo en juillet 2022, je voulais parler du vide que je ressentais. J’avais eu un coloc pendant neuf mois, j’avais mes habitudes avec lui, et c’était difficile pour moi de passer d’un corps habité à un corps qui ne l’est plus. Je voulais parler de ce ventre vide. Ça m'a valu une déferlante de commentaires me reprochant mon ventre trop plat qui allait complexer les autres. Ça ne m’était pas venu à l’esprit en postant cette photo. Oui, j’avais un ventre plat deux semaines après l’accouchement, mais j’avais une déchirure, une suspicion de descente d’organes, je n’étais pas au top. On est dans une ère où on veut prôner que tout le monde a le droit de s’exprimer, d’avoir le corps qu’il a dans un esprit «body positive», mais ce n’est pas le cas. C’est pour moi un «body positive à la carte».

Vous terminez le livre en le dédiant à votre fils, pourquoi est-ce si important?
Je ne veux pas lui cacher qu’il est mon deuxième enfant. Ca sera peut-être anecdotique pour lui, mais je ne veux juste pas qu’un jour au détour d’une discussion il découvre que j’ai été enceinte une première fois avant lui, je ne veux pas qu’il ait ce sentiment de trahison.

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