Société
Géraldine Savary: «Conflits entre les générations? Mais non»
«Les crises que traversent le monde et la Suisse écornent notre confiance en l’avenir sans distinction de générations.» - Géraldine Savary
© ELSA GUILLETQu’est-ce qui relie actuellement les générations? La dépression. Oui, ça ne va remonter le moral à personne de commencer ainsi cet édito, mais les faits sont là: jamais les jeunes n’ont été aussi inquiets pour leur avenir. Les consultations pour pensées suicidaires ont augmenté de 26% en 2023, selon Pro Juventute. Les adolescents et jeunes adultes sont stressés par le culte de la performance, ils souffrent d’écoanxiété à imaginer leur vie sans ours blancs ni glaciers, ils ont peine encore aujourd’hui à se remettre du moratoire social subi pendant la période Covid.
Pareil pour les plus âgés qui perdent du pouvoir d’achat, s’inquiètent pour leur santé ou leur retraite, pensent que c’était mieux avant et que tout fout le camp. Symptôme de cette morosité universelle et transgénérationnelle: on constate un peu partout une «sex recession». Un nombre croissant de personnes avouent ne pas avoir de relations sexuelles depuis plus d’un an ou somnolent sur le canapé devant une bonne série au lieu de caresser un corps aimé dans un écrin accueillant.
Je vous entends penser «encore de mauvaises nouvelles». Hé bien non. Cela signifie que jeunes ou vieux, nous sommes dans la même galère. Les crises que traversent le monde et la Suisse écornent notre confiance en l’avenir sans distinction de générations. En voilà un destin commun: quoi de mieux que de ramer à l’unisson pour braver les tempêtes?
Rencontres anti-solitude
La preuve de cette solidarité: des adultes en devenir partagent des appartements avec des plus âgés, histoire de mutualiser les frais et de se secourir en cas de besoin, organisent des rencontres dans les quartiers ou les salles de village pour éviter que la solitude ne nous broie. Les retraités acceptent de financer des prestations publiques dont ils ne bénéficient pas alors qu’une grosse minorité de jeunes, même si leur soutien s’émousse, même si cela est surtout vrai pour la Suisse romande, regardent encore avec bienveillance l’initiative pour une 13e rente AVS, soumise au vote le 3 mars 2024.
Parce que nous avons toutes et tous été un jour jeunes, avec nos rêves, nos envies, nos démarches crânes et vacillantes, nous serons toutes et tous un jour ou l’autre, à baigner sous la lumière tombante du crépuscule. Au final, nos prières s’adressent au même ciel et aux mêmes étoiles.
