culture
Maïtena fait du vieux avec du neuf
Exit les chroniqueurs politiques Jean-Michel Apathie et Natacha Polony. Adieu, les Guignols. Bye-bye, la Miss Météo. Ciao, Antoine de Caunes. A la trappe, la Boîte à questions. Le moins que l’on puisse dire, c’est que la mue du «Grand Journal», diffusé du lundi au vendredi en access prime time et en clair depuis plus de dix ans sur Canal+, s’annonçait radicale. Par presse interposée, Maxime Saada, directeur de la chaîne fraîchement nommé, et Maïtena, nouvelle présentatrice du talk-show, l’ont répété tour à tour tout l’été durant: «Le Grand Journal» est mort, vive «Le Grand Journal»! Autant dire qu’on l’attendait au tournant, cette nouvelle version ô combien prometteuse. On se prenait même à rêver qu’elle nous ramènerait sur Canal - qu’on avait lâchée depuis des mois pour zapper entre France 4 et France 5 de 19 h et 20 h 30. Sauf qu'à l'arrivée, seule la déception a été à la hauteur de nos espoirs.
Ce n’est pas faute d’avoir été charitable, pourtant. On a regardé non seulement la rentrée du 7 septembre 2015, mais aussi les quatre émissions qui ont suivi. Après ces cinq premiers jours, on a fini par zapper. La mayonnaise du «Grand Journal» façon Bolloré (le nouveau PDG du groupe Canal) ne prend pas. Pour sa première, Maïtena avait certes mis les petits plats dans les grands. Sur le plateau relooké en orange very seventies ultra flatteur pour le teint, le Premier ministre français, Manuel Valls. Etonnement. Il y a encore quelques semaines, Maxime Saada, nouveau directeur de la chaîne mis en poste par Vincent Bolloré, déclarait à «Télérama» que la précédente mouture était trop politique à son goût et qu’en conséquence, la nouvelle accorderait plus de place à la culture. Exception qui confirme la règle? Non, car le lendemain, nouvel invité politique. Et le surlendemain. Et les jours suivants.
Vous avez dit «statique»?
La pseudo-mise à niveau de l’émission-phare de C+ a dû laisser plus d’un téléspectateur perplexe. Car le nouveau «Grand Journal» ressemble furieusement à l’ancien: talk-show en trois parties (politique, actualité, culture - avec son live), trois chroniqueurs autour de la table (Augustin Trapenard, toujours impeccable, le seul de l’ancienne équipe à être resté) et une pastille humoristique (Cyrille Eldin, transfuge du «Supplément» et du «Petit Journal»). Hormis la présence de Victor Robert qui présente son journal directement sur le plateau, rien n’a diamétralement changé ni sur le fond, ni sur la forme. Interrogée par «Le Parisien» juste avant sa première, Maïtena avait promis une émission «moins statique»; seulement, depuis lundi dernier, l’animatrice ne bouge de son pupitre que lorsqu’elle se lève pour accueillir les invités de la troisième partie sur la scène… avant de retourner s’asseoir. Pour le show en mouvement, il faudra repasser.
Le grand plongeon
Résultat, les critiques pleuvent. Sur les réseaux sociaux, en premier lieu. Après la première du 7 septembre 2015, les internautes s'en sont pris principalement à la coupe de cheveux de Maïtena. Cette dernière s’en est d'ailleurs amusée le lendemain devant les caméras. Mais elle aurait dû plutôt s’interroger: si l’on n’a vu que sa crinière blonde, c’est peut-être qu’il n’y avait rien d’autre à retenir. Désabusés, les téléspectateurs multiplient les commentaires négatifs sur la page Facebook du «Grand Journal». Inspide pour les uns, triste, voire ennuyeux pour les autres. Seul le nouveau générique récolte des suffrages. Mais le contenu, nada. Un désamour sanctionné par les audiences de l’émission: de 915 000 téléspectateurs le soir du 7 septembre, on a plongé à 611 000 trois jours plus tard. Soit la pire audience du «Grand Journal» depuis 2006. Une situation que le site francetvinfo.fr qualifie de «catastrophe industrielle». A juste titre.
En ressuscitant l’access prime time sur Canal+, tranche horaire sinistrée depuis le départ du duo Antoine de Caunes-Philippe Gildas, «Le Grand Journal», avec Michel Denisot aux commandes, avait relevé en 2004 le pari de faire du neuf avec du vieux. Onze ans plus tard, l’émission fait exactement l’inverse: du vieux avec du neuf. Esprit Canal, es-tu (encore) là?
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