Katy Perry et Jeremy Scott: Les flammes jumelles

Il se tient prostré, à genoux devant elle. Son mocassin verni face contre tapis rouge. Une dramaturgie digne des archives du couronnement de feu la reine Elizabeth II. Ici s’arrête la comparaison. Jeremy Scott, directeur artistique de Moschino de 2013 à début 2023, baise la main gantée de l’une de ses premières muses: Katy Perry. Elle, elle en joue, avec son port de tête royal et sa coupe garçonne divinement sexy. Elle arbore une robe fourreau noire, lui un costume, avec la touche Moschino - des graffitis - comme pied de nez aux autres invités du MET Gala 2015 tirés à quatre épingles.

Leur amitié est déjà scellée et leur collaboration bien entamée. Jeremy Scott imagine des costumes pour la troisième tournée mondiale de la chanteuse, The Prismatic World Tour (2014-2015).

2015, c’est leur année. Ils partent à l’assaut du monde de la mode. L’interprète de Roar devient égérie Moschino pour la collection automne/hiver 2015 mêlant des inspirations urbaines et enfantines, où des tags côtoient des ours en peluche. Les compères enchaînent les gros coups. Pour son concert lors du Super Bowl 2015, Katy Perry fait appel au rebelle de la mode. Jeremy Scott se voit confier la tâche herculéenne d’habiller son amie pour l’événement le plus regardé à la télévision aux États-Unis. La pop star se produit à la mi-temps du match, un show de douze minutes qui deviendra le plus suivi de l’histoire du Super Bowl avec 118,5 millions de téléspectateurs.

Elle se présente dans plusieurs tenues de scène très pop. D’abord dans un ensemble deux pièces doré, recouvert de flammes. Entre deux chansons, elle enfile une robe ballon de plage, puis termine son concert dans une robe ornée de diamants, la tenue «la plus difficile à réaliser», selon les déclarations du créateur dans Elle.

Son complice pour une image de diva

Ces quelques minutes de spectacle marquent l’artiste à vie. Après le concert, elle se fait tatouer «XLIX» - 49 en chiffres romains - pour immortaliser cette édition du Super Bowl. Pour Jeremy Scott et pour Moschino, c’est un coup de projecteur immense. Celui qui a commencé sa carrière à Paris, sans-abri, impose son style dans tous les esprits. Comme un goût de revanche aux accents transgressifs et hauts en couleurs.

«Avec la mode, vous pouvez créer vos propres lois», c’est le mantra du créateur. Il l’a déclaré lors d’une interview pour Vogue après l’annonce de son départ de la maison italienne. Un principe qu’il continue d’insuffler à sa propre marque. Katy Perry partage cette philosophie:

Au MET Gala 2019, la chanteuse a foulé le tapis rouge en chandelier, signé Moschino. Une idée lumineuse qui a fait beaucoup de bruit. D’autant plus qu’à l’afterparty de l’événement, l’Américaine a enchaîné avec une robe cheeseburger sertie de pierres précieuses, excusez du peu. «C’est ma tenue de MET Ball préférée!, a-t-elle confié à Vogue. C’est une création de Jeremy Scott, que j’aime énormément». Elle est inarrêtable. Mais elle est comme ça, Katy, elle adore jouer de son image de diva.

Depuis 2018, elle est jurée de l’émission American Idol aux côtés de Lionel Richie et Luke Bryan. Avec ses looks, elle crève le petit écran tantôt avec du métallisé, des froufrous, des volants, des paillettes, tantôt avec de la transparence et du cuir.

Pour l’édition «spécial Disney» diffusée en direct le 14 mai 2023, la chanteuse est apparue en Elastigirl (Les Indestructibles). Ce n’était pas ce qui était prévu, mais lorsqu’elle réalise que l’émission tombe le jour de la Fête des mères, elle opte pour ce rôle de supermaman. Un déguisement en latex difficile, voire impossible à enfiler, ce qui lui vaut presque de manquer le début du show.

Des boutiques solidaires aux tenues haute couture

D’où lui vient cette fougue pour l’excentricité? Avant de déchaîner les foules, Katheryn Elizabeth Hudson grandit bien loin des strass et des paillettes, bercée par la religion et la musique chrétienne. À l’adolescence, elle compose et chante du gospel dans l’église de ses parents, tous deux pasteurs. Jusqu’ici, en apparence, rien de fougueux. On est bien avant la sortie de I Kissed a Girl (2008). C’est à 13 ans que Katy commence à étudier son style. Faute de moyens, elle parcourt les boutiques de seconde main et les enseignes vintage. Elle aime y dénicher des pièces uniques et cultiver une apparence de pin-up, ce qui influence son style pour ses premières apparitions publiques.

Katy Perry a prouvé à maintes reprises qu’elle était un véritable caméléon de la mode. Et surtout, qu’elle n’a pas froid aux yeux, à l’image de son ami designer: «Katy et moi, on parle la même langue, non seulement sur le plan visuel et créatif, mais aussi sur le plan humain, a-t-il confié au magazine «Page Six». C’est vraiment une personne que j’admire en tant qu’amie, en tant qu’artiste, en tant qu’interprète et en tant qu’être humain. J’ai été très heureux de faire partie de son parcours».

Un parcours commun scellé en 2015, lorsque les deux alliés ont gravé ensemble leurs empreintes sur le Hollywood Walk of Fame. Ce qui fait de Jeremy Scott le premier créateur de mode de l’histoire à figurer parmi les plus grands noms de la pop culture.