Make-up: Karim Rahman travaille souvent dans l'urgence à Cannes

L'occasion pour le public d'assister chaque soir à un défilé de stars sur le tapis rouge du Palais des Festivals pour la traditionnelle montée des marches. Si les robes de créateur attirent généralement toute l'attention, la mise en beauté ne doit pas être négligée, car elle fait parfois toute la différence.

Karim Rahman, expert maquilleur L’Oréal Paris, sublimera le teint de nombreuses icônes du cinéma et égéries de la marque de cosmétique et leur offrira une mise en beauté pour briller sur le red carpet de la Croisette, durant ces douze journées de festival. Rencontre.

Après la «pin-up» l'an dernier, avez-vous choisi un thème beauté pour ce Festival de Cannes 2016?
Oui, il y a toujours un thème pour Cannes, qui est notamment choisi pour défendre les valeurs et les couleurs de la marque L’Oréal Paris. On a toujours eu des collections qui étaient plutôt basées sur l'or, et cette année on a une collection baptisée «Red Carpet», inspirée des tapis rouges de tous les festivals, pas uniquement celui de Cannes, mais aussi du monde du cinéma.

Qu’est-ce qui devra attirer l'attention cette année? Le regard ou la bouche?
Les yeux prennent le dessus pour cette 69e édition. Il y a un vrai focus sur le regard. Ce qui est intéressant avec la bouche, c'est que ce sera un vrai choix, un parti pris. On peut avoir une bouche nude naturelle, ou une bouche très sophistiquée. Il n'y a pas de règle. C'est vraiment une histoire de goût et d'envie. Mais c'est vrai que l'accent sera surtout porté sur les yeux, avec beaucoup de mascara et un contraste assez foncé avec un «Smokissime» (Le Superliner de la collection Red Carpet, ndlr) noir bleuté qui donne du mystère. Pour le regard, la palette de fards à paupières est un dégradé de rouge et de rose. Elle fait un peu girly au premier abord, mais quand on l'applique en contraste avec des yeux très marqués et très denses - comme c'est le cas cette année -, ça donne un mélange très raffiné et très chic.

Comment permettre aux femmes de reproduire facilement ce look glamour chez elles?
Pour le teint, il faut opter pour du naturel, ne pas changer ses habitudes. Ensuite il faut faire un choix: mettre l'accent sur la bouche ou sur les yeux. Si elles choisissent les lèvres, il faut opter pour une bouche rouge très foncée et très mate, et ne surtout pas être timide. Il faut oser et aller droit au but. Ou alors, elles peuvent mettre le focus sur les yeux, avec beaucoup de mascara en haut et en bas, du kajal à l'intérieur et on sculpte le regard de manière très intense. Celles qui sont vraiment à l'aise peuvent faire un trait d'eye-liner graphique avec une touche de couleur sur la paupière mobile, et le tour est joué. Il faut vraiment cibler le produit, la texture et l'applicateur avec lesquels elles sont le plus à l'aise, et intensifier.

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Quelles sont les contraintes rencontrées par les make-up artists pendant le festival?
Le temps. Ça va vite, parfois trop vite, et ça donne le vertige. Là, par exemple, il est 10 h 30 (à l'heure où l'interview est réalisée, ndlr), et j'ai déjà maquillé Leïla Bekhti, Susan Sarandon, et Julianne Moore. Donc il y a vraiment cette contrainte de temps et on travaille souvent dans l'urgence à Cannes. Mais finalement, c'est une contrainte au moment où on le vit. Avec le recul, on retient les moments magiques. On a la chance de travailler dans de très bonnes conditions. Les égéries viennent dans une suite dédiée, on n'a pas besoin de courir, et tout est très bien organisé. Parfois c'est tendu, mais on finit toujours par y arriver. Autre contrainte, le temps…, mais cette fois plutôt la pluie et le vent… comme on peut le voir ce matin.

Avez-vous une anecdote sur une mise en beauté réalisée dans l'urgence justement?
Ça arrive tout le temps. L'année dernière, Karlie Kloss s'est blessée en montant dans la voiture, donc je suis rentré dans le cortège et l'ai rejointe. Elle s'est fait mal donc elle a un peu pleuré et j'ai dû la remaquiller dans la voiture. Et puis finalement elle est sortie, elle était magnifique, elle a monté les marches, et moi je suis rentré avec la voiture.

En dehors des égéries L’Oréal Paris, savez-vous déjà qui vous allez maquiller cette année?
On est toute une équipe, mais moi je suis assez exclusif à L’Oréal Paris et aux égéries. J'ai peu de temps, mais je peux éventuellement aussi maquiller des personnalités qui me le demandent, si j'arrive à les caler dans mon emploi du temps. Le problème est que j'ai plusieurs casquettes. Je fais les workshop, je présente les collections aux journalistes, et je m'occupe aussi des masterclass et des tutoriels, donc j'ai rarement le temps de me consacrer à d'autres stars malheureusement. Mais ça peut arriver. Quand Tilda Swinton vient à Cannes, on arrive toujours à la caler, tout comme Emma de Caunes ou Mademoiselle Agnès. Il y en a plein d'autres, mais c'est vrai que c'est toujours difficile à organiser.

Quelle star rêveriez-vous de maquiller?
Ce matin, j'ai adoré maquiller Susan Sarandon. C'était la première fois, et c'était magnifique. J'avais peur, et puis finalement ça s'est très bien passé. C'est une femme brillante et intelligente. Mais celle que j'aurais rêvé de maquiller c'est Monica Vitti. Et j'aurais adoré travailler avec David Bowie.

Puisque vous parlez d'homme… Est-ce qu'ils se maquillent aussi pour la montée des marches?
Oui, bien sûr, ça arrive. Je m'occupe très peu des hommes, car je n'ai pas beaucoup de temps, et je me réserve aux égéries. Mais, ça ne prend pas beaucoup de temps. On hydrate et on fait une petite mise en beauté, en cinq minutes. Je n'aime pas trop maquiller les hommes dans le sens où j'estime qu'ils doivent juste être soignés, pas maquillés. C'est donc toujours très léger.

Vous entamez aujourd'hui votre septième festival, est-ce grisant à force?
Non pas du tout, c'est toujours une expérience incroyable. Certes, c'est glamour et paillettes, mais je suis aussi cinéphile et c'est quand même agréable d'être là et de parler cinéma avec Susan Sarandon, comme je l'ai fait ce matin. Je ne m'ennuie pas du tout, et c'est toujours sympa de rencontrer Martin Scorsese dans l'ascenseur ou Woody Allen dans les escaliers. On n'a pas le temps de s'ennuyer à Cannes et je trouve que c'est au contraire très excitant. Si c'était grisant, je ne serais pas là.

Si vous ne deviez maquiller qu'une femme cette année?
C'est drôle parce que j'ai un regret, j'aurais dû inviter ma mère cette année, et ça aurait été elle du coup. J'y ai pensé toute la matinée. Mais ce n'est pas possible, car elle n'est pas là. Mais ce n'est que partie remise.