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Ce n’était pas prévu au programme que je devienne si vite maman! A 16 ans, comme toutes les filles de mon âge, j’étais insouciante et j’aimais sortir faire la fête. Je voyais aussi régulièrement Kevin, mon ami d’un an plus âgé, qui fréquentait la même classe que moi au gymnase.

Malgré une contraception aléatoire, j’étais à mille lieues de penser que je pouvais tomber enceinte. Mais ayant beaucoup de nausées, j’ai fini par faire un test de grossesse. Et celui-ci s’est révélé positif. Quel choc! Je me suis demandé quelle allait être la réaction de mon ami en apprenant la nouvelle. Quand je lui ai montré le test avant les cours, il n’a pas prononcé un mot. Son silence s’est prolongé toute la journée, et j’ai pensé que c’était mauvais signe. S’il n’était pas prêt à assumer ce bébé avec moi, je ne me voyais pas l’élever seule. Il fallait qu’il soit à mes côtés sinon j’allais devoir envisager le pire. Quand Kevin m’a dit qu’il était hors de question que j’avorte, j’ai été soulagée. Je ne me sentais pas capable de le faire.

Mais à une année de la maturité gymnasiale, comment allions-nous mener de front nos études et un enfant? Car il était clair pour tous les deux que nous ne souhaitions pas interrompre notre cursus scolaire et que nous voulions poursuivre une formation universitaire. Nous avons réfléchi à différentes solutions, dont celle d’étudier à tour de rôle. En cherchant des informations sur internet, je suis tombée sur l’association Jeunes parents. La responsable, qui a elle-même été maman très tôt, m’a rassurée en me disant que c’était possible de faire des études tout en élevant un enfant. Même si dans la réalité, par la suite, cela s’est révélé plus compliqué que prévu.

Des rumeurs pas très sympas

Il a fallu mettre mes parents au courant de la situation. J’ai écrit une longue lettre à ma mère pour lui expliquer que j’avais mûrement réfléchi la décision de garder cet enfant, en accord avec Kevin. Je lui ai dit qu’on souhaitait ne pas dépendre d’eux pour élever ce petit bout de chou, mais qu’on aurait certainement besoin de leur aide au début. Ma mère a bien réagi, mais je craignais la réaction de mon père, qui a toujours été fier de moi. Mais après avoir lu mon message, il a étonnamment bien pris la nouvelle et m’a promis qu’il me soutiendrait inconditionnellement.

Au gymnase, quelques rumeurs pas très sympas ont circulé dans mon dos, mais dans l’ensemble cela s’est bien passé avec mes camarades et mes professeurs. Investie dans mon rôle de future mère, j’ai dévoré tous les livres sur le sujet. J’ai radicalement changé mon mode de vie en faisant attention à mon alimentation et en renonçant aux sorties. Mes notes n’ont d’ailleurs jamais été aussi bonnes qu’à ce moment-là. A la mi-août, juste avant que mon ami reprenne le chemin de l’école, j’ai accouché d’une petite fille et je suis devenue maman à plein temps.


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Pour ne pas «squatter» chez mes parents ou chez ceux de mon ami, nous avons fait le choix d’habiter en alternance chez les uns et les autres. Ma chambre s’est transformée en nursery, mais je n’ai pas délaissé pour autant mon bureau d’étudiante. En effet, j’ai pris de l’avance pour l’année scolaire suivante en entamant mon travail de maturité sur le thème «Le choix de l’avortement». Car les réactions contrastées et parfois violentes lors de mon début de grossesse m’ont choquée.

Le soir, après sa journée de cours, mon ami prenait le relais auprès de sa fille. Malgré notre jeune âge, nous avons bien réussi à gérer l’arrivée de ce bébé. Mais nous avions envie d’avoir notre «chez-nous». J’ai frappé à la porte de plusieurs organismes pour voir s’il était possible de bénéficier d’une aide financière. Mais en tant que parents adolescents et étudiants, nous n’entrions dans aucun des critères qui permettent de recevoir un soutien. A les entendre, il valait mieux arrêter nos études et ne rien faire, car à ce moment-là seulement nous aurions eu droit à l’aide sociale. Nous nous sommes donc débrouillés par nos propres moyens, avec nos trois allocations familiales et le modeste revenu de footballeur de Kevin. Nous avons emménagé dans un deux-pièces avant le premier anniversaire de ma fillette. Pour arrondir les fins de mois, j’ai commencé à travailler le soir et les week-ends dans un fast-food. Quand j’ai repris ma dernière année gymnasiale, il a fallu jongler entre le bébé, les études et mon job qui finissait à minuit. C’était difficile. Heureusement, j’ai pu compter sur les grands-mères pour prendre le relais, j’ai obtenu ma maturité gymnasiale et même un 6 pour mon travail.

Obligée de compter chaque centime

Une fois à l’université, j’ai pensé que les choses seraient plus faciles, car je n’étais pas obligée d’assister à tous les cours. Mais sans place de crèche, un job dans un cinéma, les cours à rattraper et la fatigue qui s’accumulait, j’ai perdu pied et j’ai redoublé mon année. Tout comme Kevin avant moi. Pour pouvoir me concentrer sur mes études, j’ai choisi d’arrêter mon job d’appoint. Notre situation était devenue précaire: nous comptions chaque centime. A bout de forces, et soutenue par un service juridique gratuit, j’ai fait recours au Tribunal cantonal contre la décision des organismes qui refusaient de nous attribuer une bourse ou des prestations complémentaires. Pourquoi aurions-nous moins droit à de l’aide que d’autres, alors que nous nous battions pour aller au bout de notre formation et devenir autonomes? J’ai joint à mon dossier la Déclaration universelle des droits de l’homme.

Mon combat a porté ses fruits puisque nous avons obtenu des prestations complémentaires pour familles, qui nous permettent aujourd’hui de poursuivre nos études avec plus de sérénité. Je n’ai pas fini de potasser mes cours tout en pouponnant, car je viens de donner naissance à un petit garçon, pour la plus grande joie de ma fille de 6 ans. Je fais actuellement ma dernière année de bachelor en deux ans. Et si tout va bien, je devrais obtenir mon diplôme en sciences sociales et politiques l’an prochain. Je compte poursuivre mon cursus universitaire, car j’aime apprendre. Je suis reconnaissante envers mon entourage de m’épauler pour me permettre d’aller au bout de mes aspirations professionnelles. Sans leur soutien, rien de tout ça ne serait possible.

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