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Laura: le foot, ma passion, ma méditation

C’est en travaillant pour l’UEFA (l’Union européenne des associations de football) que j’ai découvert le football au féminin. Comme bon nombre de grandes entreprises, la mienne possédait ses propres équipes sportives, masculines et féminines. J’ai commencé à pratiquer il y a deux ans. A dire vrai, j’ai contacté l’équipe sur la pointe des pieds car on m’avait souvent dit que les femmes pouvaient être dures entre elles lorsqu’il s’agissait de compétition. Des rumeurs circulaient, on prétendait que seules celles qui jouaient au football depuis leur plus tendre enfance avaient une chance de se faire une place dans l’équipe. Et je ne parle même pas de certains préjugés tenaces qui font des footballeuses des garçons manqués ou des camionneuses. Heureusement, l’expérience que j’ai vécue par la suite m’a prouvé le contraire.

Un sport d’endurance

Née en Angleterre, j’ai passé mon enfance à admirer l’équipe nationale et celle de Chelsea. Petite, le sport faisait partie de ma vie et le football me fascinait. Je regardais les matches à la télé et je m’enthousiasmais comme la plupart des supporters. Mais de là à sauter le pas pour courir sur le terrain. C’est grâce à des entraîneurs extraordinaires, des anciens professionnels, que je me suis lancée. J’ai commencé avec un entraînement par semaine, et j’ai très vite trouvé ça incroyable. Pour faire ce sport, il faut être «fit», développer son endurance et être fort dans la tête: ça m’a immédiatement plu! Le fait de porter des talons toute la journée pour ensuite enfiler des chaussures à crampons et courir comme une dingue sur du gazon m’a aussi beaucoup plu: j’aime les défis!

Après m’être entraînée pendant un an et demi au sein de l’équipe de l’UEFA, j’ai dû quitter celle-ci. Je changeais de travail et l’idée de lâcher mes coéquipières me rendait un peu triste. Comme mon nouvel employeur n’avait pas d’équipe de football féminin, je me suis mise à cogiter. Inspirée par une ancienne camarade de jeu, l’idée d’amener les différentes formations de la région à se rencontrer s’est imposée comme une évidence. Il fallait que j’organise un championnat de foot féminin, puisqu’il n’en existait pas. J’ai contacté la ligue romande (masculine évidemment!) pour amateurs l’été dernier. Je leur ai expliqué mon parcours, mon goût pour le football et ma volonté de rendre ce sport plus accessible aux femmes. Le président a immédiatement adhéré à mon projet. En quelques mois, nous avons réuni assez de passionnées et de passionnés pour concrétiser ce rêve. Nous avons créé des équipes, trouvé des sponsors et notre public.

Après le match, passage au pub

Le premier championnat de football féminin de la ligue romande a débuté le 20 avril 2015. Chaque équipe disputera douze parties d’ici le mois d’octobre. «Les Boucanières», dont je suis membre, se mesureront à quatre autres clubs de Suisse romande. Parmi les joueuses, il y a des mères au foyer, des femmes qui travaillent, des débutantes et des sportives plus expérimentées. Notre leitmotiv est simple: tout le monde peut jouer au foot! Après un match, on se réunit entre femmes dans notre pub fétiche. On y mange des burgers, on discute sport et vie pratique tout en levant nos verres en l’honneur du foot. Entre deux matchs, les échanges se poursuivent. On se soutient en s’envoyant des messages, on partage de bons moments.

Dans le fond, je ne me considère pas comme une bonne joueuse, et les moments de grâce dans un match sont précieux. Ils sont sans doute moins nombreux que dans une rencontre entre professionnelles, mais cela ne fait rien car je ne suis pas là pour gagner ou pour mettre la pâtée à l’équipe adverse. Le comportement des femmes est très fair-play: on s’encourage entre nous, on salue un beau geste et on ne fait pas tout un drame d’une faute sur le terrain. Evidemment, la pratique du football par des femmes est différente de celle des hommes. Les observateurs disent souvent que notre jeu est plus élégant et plus respectueux. Enfin, nous avons la chance de bénéficier d’entraîneurs qui sont d’anciens professionnels. Je pense notamment à Patrick Müller qui s’occupe de l’équipe de l’UEFA. L’engagement sportif est intense, les relations entre les joueuses aussi.

Mon fils, mon plus fervent supporter

Cette année, la Suisse joue pour la première fois les mondiaux féminins au Canada (du 6 juin au 5 juillet 2015, ndlr). C’est un moment fort que je me réjouis de suivre. Si les pays scandinaves soutiennent et mettent en valeur le football féminin depuis plusieurs années, le reste de l’Europe est davantage à la traîne. Et ça n’étonnera personne si je dis qu’en la matière les pays du bassin méditerranéen sont plutôt fermés. Imaginer qu’une femme puisse suer, crier et courir ailleurs que dans sa cuisine est impensable pour certains. Je me souviens d’une amie à laquelle j’avais proposé de jouer qui, malgré son envie, avait finalement refusé. En creusant un peu, j’ai compris que son mari n’était pas très enthousiaste… Dans ma famille, c’est mon fils qui est mon plus fervent supporter. Naturellement, mon homme m’encourage aussi et même davantage: il a accepté de coacher les Boucanières et il ressent énormément de fierté et de plaisir dans ce rôle. Ma cadette s’intéresse plus à des choses de filles, les poupées et la gymnastique. Mais elle demande toujours après les matchs si j’ai marqué un but. Je n’ai pas encore pu lui répondre que oui!

Les bénéfices que m’apporte la pratique de ce sport sont nombreux. J’ai gagné beaucoup de confiance en moi depuis que je tape dans le ballon, je n’ai plus peur de me mettre en danger sur le terrain et cette attitude se reflète dans ma vie quotidienne. Je me souviens qu’au début, faire des têtes m’impressionnait. Aujourd’hui, je n’ai plus peur de taper dans le ballon, d’y aller. Mon vœu le plus cher serait que d’autres équipes se joignent au championnat. Même si le fait de concilier vie familiale, travail et sport est souvent délicat pour les femmes, je constate que la barrière n’est pas infranchissable. Pratiquer le football est une activité proche de la méditation pour moi. Lorsque je suis sur le terrain, je ne pense à rien d’autre qu’à courir derrière le ballon. Et j’aime ça.

En savoir plus: www.lrf.ch


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