Sur un malentendu
Du virtuel au réel: quand deux avatars tombent amoureux
Célibataire depuis de nombreuses années, Sandra vivait tranquillement avec sa fille, satisfaite de sa situation: pas de relations, pas de problèmes. Un jour, elle tombe via Facebook sur un ersatz de Candy Crush, croit-elle, un genre de puzzle. Il s’agit en fait d’un jeu de stratégie, dans un univers médiéval, où il faut construire un château. Pour progresser, on rejoint une alliance, on élabore des plans. Les membres viennent d’un peu partout, mais surtout de France. Cachés derrière leurs avatars, ils discutent via le chat, pour les tactiques mais aussi parfois pour se dragouiller, en mode geek. C’est ainsi que Sandra devient de plus en plus complice avec Eric. Ils échangent leur numéro pour se parler hors de la plateforme.
Cinq heures au téléphone
Les deux alliés se découvrent des parcours communs, des expériences de vie similaires, une façon de gérer leur part d’ombre. Se parler tous les jours devient vite indispensable, parfois durant quatre ou cinq heures. Après des mois, ils prennent le risque de se rencontrer (jusqu’ici, ils ne savaient pas à quoi l’autre ressemblait physiquement). Ils se donnent rendez-vous dans un hôtel. «J’ai ouvert la porte… et nous ne nous sommes plus quittés», raconte Sandra. Après quarante-huit heures de romance digne d’un film, Eric repart chez lui, en France, et les amoureux entament une relation à distance, avec les frustrations qui vont avec. À l’automne, Eric quitte son travail et vient s’installer en Suisse, le 25 décembre. «Mon cadeau de Noël, dit la quinqua épanouie. Et une évidence, comme si on s’était toujours connus. Je comprends enfin, à mon âge, le sens du mot engagement.»
Le couple s’est marié virtuellement, dans le jeu qu’ils n’ont jamais quitté, en présence de leurs partenaires, il y a même eu un feu d’artifice. Toute la communauté est extrêmement bienveillante envers eux, ils ont une légende, on les a nommés prince et princesse. Un mariage qui pourrait bien se concrétiser dans la vraie vie.