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L'édito de Géraldine Savary: «Petzi, Babar et Bécassine, du balai?»

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«Délester des œuvres de leur contexte, cacher le sens de l’Histoire, remodeler la vie de nos sociétés à l’image qu’on s’en fait maintenant ne sert à personne.» - Géraldine Savary

© ELSA GUILLET

Dans les célèbres contes de Heinrich Hoffmann (1845), psychiatre de Francfort, une petite fille transgresse l’interdit parental et joue avec le feu; elle finit par flamber et être réduite en cendres. Un enfant n’obéit pas à sa mère qui lui dit d’arrêter de sucer son pouce en son absence? Alors surgit un tailleur qui, armé d’une grande paire de ciseaux, lui coupe les pouces. Un autre sort de chez lui pour braver la tempête et disparaît dans le ciel, emporté par le vent.

Vous serez sans doute d’accord avec moi, ce médecin allemand a l’air d’avoir tellement envie de pourrir les nuits des enfants et les soirées des parents qu’on peut le laisser s’empoussiérer dans les rayons des bibliothèques.

Mais où va-t-on si désormais on caviarde Roald Dahl? Matilda, Charlie et la chocolaterie et Sacrées sorcières squattent nos imaginaires. Ces histoires font rêver nos enfants, nous permettent de créer le lien avec eux quand on en discute, de partager des moments magiques, juste avant qu’ils ne s’endorment. «Continue, maman», nous disent-ils, «encore une page, papa», râlent-ils avec la voix qui lutte contre le sommeil.

À quand la censure de nos héros et héroïnes préféré-e-s?

À ce rythme, on devrait renoncer à Petzi parce que l’Amiral fume la pipe, à Babar parce qu’il fait l’apologie de la colonisation. Bécassine donne une image franchement dépréciative des Breton-ne-s et que penser de la pauvre Schtroumpfette, seule au milieu d’une horde de petits mâles sous hallucinogène? Même les Barbapapa, la famille baba-écolo créée en 1970, pourrait passer sous la pelleteuse: Barbabelle s’occupe d’esthétique, Barbalala de musique alors que Barbidur aime le sport et Barbibul les sciences.

Dieu merci, la polémique autour de la réécriture de Roald Dahl a eu ce mérite. Sur ce coup, pédopsychiatres, spécialistes, autrices et auteurs de livres pour enfants tombent d’accord et les maisons d’édition rétropédalent. Délester des œuvres de leur contexte, cacher le sens de l’Histoire, remodeler la vie de nos sociétés à l’image qu’on s’en fait maintenant ne sert à personne. Ni aux générations futures, privées de débats, de questionnements, de construction de soi, ni à nous qui devons transmettre un héritage ô combien imparfait.

Les contes racontent le monde et ce qu’il peut avoir de terrifiant: la cruauté des adultes, la peur de la perte ou de l’abandon, la misère sociale, le rejet des différences. On ne peut pas aimer le jour si on n’a pas apprivoisé la nuit.


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