L'édito de Géraldine Savary: «Où sont les familles nombreuses?»

La Suisse dépassera les neuf millions de personnes en 2023, une croissance qui nargue les prévisions réalisées il y a deux ans. Vingt fois plus rapide que l’Allemagne! En lisant ces chiffres, on est tombées des nues. Comment est-ce possible, alors que le taux de fécondité chute de par le monde, et en Suisse itou? Et qui êtes-vous, vous qui augmentez? Voisines et voisins de destin dans les trains bondés, les restos pleins, les logements chers? Des étrangers, disent les statistiques. L’introduction de la libre circulation des personnes a accéléré la tendance à être plus et de plus loin. Certaines ou certains gémiront sur une Suisse qui n’arrive plus à maîtriser le nombre de ses habitants, en particulier issus de l’immigration, d’autres considéreront que cette nouvelle population menace la planète et l’environnement.

Dans l'édition magazine du 19 février 2023, on a décidé de s’intéresser à des familles qui ont plein d’enfants. Parce que les statistiques ont aussi un visage. Alors, qui sont-elles? Comment vivent-elles? Est-ce qu’elles arrivent à s’en sortir? Premier constat, les profils des grandes familles sont variés. Le hasard de la vie a déjoué les planifications, des jumeaux sont arrivés qui ont fait gonfler les chiffres dans les berceaux, les convictions religieuses peuvent peser dans les projets communs, ou alors les séparations et les reconstitutions du nid familial redessinent les fratries. Les grandes familles vivent plutôt dans les cantons catholiques et hors des grands centres urbains, mais pas seulement.

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Quotidien structuré et vivre-ensemble

Les personnes que nous avons rencontrées racontent un quotidien très structuré, où tout doit être pensé et organisé. Les courses, les factures, les vacances, l’aménagement des chambres, les habits qui s’enfilent d’un enfant à l’autre, le partage des tâches. Les mères prennent une bonne partie de la responsabilité de faire tenir la famille, y compris quand il s’agit d’apprendre aux enfants à se gérer eux-mêmes. Enfin, la famille nombreuse développe des valeurs communes, un apprentissage au vivre-­ensemble.

Enfant, on a toutes et tous imaginé qu’on avait été enlevées à la naissance et qu’un jour notre vrai papa et notre vraie maman viendraient nous chercher et nous emmèneraient vivre dans notre vraie famille. En grandissant, on se rend compte qu’il n’y a pas de foyer parfait, ni de haricot magique qui définirait le bonheur à la taille de la fratrie. La seule chose qui reste, c’est l’amour qu’on transmet.