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Le règne des «fille et fils de»: jusqu'où iront-ils?

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Lily-Rose Depp, 17 ans, fille de Vanessa Paradis et Johnny Depp. Avec sa taille de puce et sa silhouette type brin d’herbe, elle aurait pu passer inaperçu. C’était sans compter sur son magnétisme et son audace. Déjà icône des magazines de mode alors qu’elle sort à peine de l’adolescence, Lily-Rose a même été sacrée égérie Chanel. Comme sa maman.

© Getty Images

Ils sont beaux. Ils sont riches. Ils sont jeunes. Ils fréquentent déjà les grands de ce monde et leurs portraits sont partout. Des princes, des princesses? Presque. Ils n’ont peut-être pas de sang bleu dans les veines, mais leur vie ressemble à un conte de fées en bonne et due forme. Eux, ce sont les «enfants de». En mode croissance exponentielle, ils ont pris le pouvoir, ces dernières années, et imposé leur image dans les médias, dans la culture, dans le luxe. Encore en âge d’aller à l’école. Souvent totalement inexpérimentés. Et pourtant adoubés comme les héritiers d’un royaume qui vend du rêve.

Lily-Rose, fille de Vanessa Paradis et Johnny Depp? 16 ans, à peine sortie de l’anonymat de l’adolescence et aussitôt propulsée égérie de Karl Lagerfeld du seul fait de son appartenance à une lignée très médiatique. Kaia Gerber, fille de Cindy Crawford? 14 ans et déjà prise sous l’aile du créateur Alexander Wang. Willow, fille de Will Smith? 15 ans et vite catapultée dans un triptyque cinéma-mannequinat-chanson. OK, on ne jouera pas les esprits chagrins en questionnant les compétences réelles de ces muses plutôt précoces. On constatera tout de même que le simple fait d’être «bien né» semble aujourd’hui plus que jamais un sacré avantage.

Les rejetons de stars seraient-ils en train de constituer une nouvelle aristocratie? «On a toujours vu émerger des «fils et filles de» dans la sphère publique, juste parce qu’ils avaient des parents célèbres, remarque Gianni Haver, sociologue de l’image à l’Université de Lausanne (UNIL). Mais il faut noter une évolution: si dans le passé il leur fallait se faire un prénom pour espérer percer, de nos jours, un patronyme suffit pour être perçu comme faisant partie de l’élite.» Ça s’appelle une logique dynastique, donc. Celle qui, depuis des siècles, veut que les privilèges, le pouvoir, la couronne parfois, se passent automatiquement de père (ou de mère) en fils (ou en fille).

Le talent serait héréditaire...

Certains cas évoquent carrément une transmission de type «famille royale», d’ailleurs. Ainsi d’Inès de La Fressange et de ses deux filles, Nine et Violette, apprenties mannequins pour les shootings les plus classieux. Ou du clan Beckham, dont les enfants adolescents brillent déjà dans le gotha. Il y a Roméo, devenu égérie pour Burberry à 10 ans. Brooklyn, proclamé photographe de mode à 16 ans pour une campagne de cette même marque, au grand dam des professionnels de l’objectif. Et Cruz enfin, 13 printemps et déjà présenté comme le prochain Justin Bieber parce qu’il chante dans sa salle de bains, sur les traces de sa maman.

«Il y a aujourd’hui la croyance que le talent est héréditaire, observe Valérie Gorin, sociologue des médias à l’Université de Genève (UNIGE). On hériterait en quelque sorte de gènes talentueux, intrinsèquement remarquables. Ce qui va bien dans le sens du renforcement actuel de la dimension aristocratique prêtée aux «enfants de»: à l’origine, la noblesse était une caste supérieure; à ses membres, on accordait des privilèges et présupposait des qualités avant même de mesurer leurs mérites réels.»

Certes, mais comment, dans notre imaginaire, a-t-on fait passer les acteurs du showbiz des scènes et podiums aux escaliers d’honneur de châteaux légendaires? Peut-être parce que nous adorons observer ces représentants d’un univers fabuleux, un tantinet fantasmé, note Gianni Haver: «La presse people actuelle s’ancre dans les magazines des années 30, qui suivaient surtout les vies des personnalités couronnées. Or l’aristocratie de notre époque est assez invisible: à l’exception de quelques figures ultramédiatisées telles que Kate Middleton, une grande partie de la noblesse est inconnue du grand public, cachée dans une nébuleuse. Les enfants de stars qui réussissent constituent donc une sorte d’aristocratie palliative qui nous fait rêver, qui nous divertit aussi. Bien qu’elle ne dispose pas du véritable pouvoir, elle nous en met encore plein les yeux avec ses paillettes.»

Ce feu d’artifice médiatique tend à éclipser, toutefois, un phénomène nettement moins idéal: l’échec de plus en plus visible de la méritocratie – ou ascenseur social par le mérite – comme le met en lumière Olivier Crevoisier, professeur de sociologie à l’Université de Neuchâtel. «On sort peu à peu de cette société industrielle dans laquelle on s’insérait essentiellement par son travail. Aujourd’hui, ce qui définit le statut social est davantage dû à la renommée, devenue l’équivalent d’un capital économique important. Celle-ci se propageant d’ailleurs encore plus vite qu’avant, grâce à internet.»

L’enfant, objet marketing

Ironie de l’histoire, ces rejetons privilégiés sont rarement présentés avec une cuillère en métal précieux dans la bouche. «On dira souvent d’eux qu’en dépit de leur pedigree ils sont arrivés là par leur mérite et leurs compétences, note Julia Falcon, sociologue à l’UNIL. Les plus favorisés sont parfois ceux qui croient le plus en la méritocratie, car c’est un concept qui permet de légitimer leur place enviable dans la société.»

Mais l’émergence des «fils et filles de» n’est pas seulement le symptôme d’un sérieux manque de graissage de l’ascenseur social. Derrière ces histoires de gamins côtoyant les icônes planétaires, s’affichant dans les magazines de luxe et devenant des machines à rêve à peine sorties de l’adolescence, il y a, dans les coulisses, une mécanique bien huilée. «De nos jours, l’image d’une star ne se construit pas qu’avec son physique, son prestige ou sa fonction: l’enfant fait partie de ses attributs, souligne Valérie Gorin, comme une extension de sa personne. C’est assez cynique à dire, mais il est un peu comme l’une des composantes de son look, au même titre qu’un nouveau sac tendance affiché à son bras. Il prolonge le récit de la star dans les médias.»

Et lorsque ladite VIP est bankable, tout ce qui se trouve à proximité l’est aussi, forcément. L’enfant de star? Une bannière commerciale qui fait fantasmer les grandes marques. Lesquelles s’engouffrent dans la brèche. Surtout celles qui gravitent autour du style, car «la mode investit de plus en plus le monde de l’enfance pour des motivations marketing», comme le rappelle la sociologue de l’UNIGE. «En effet, on préfère miser sur ces enfants car ils représentent un capital initial mesurable: celui de leurs parents, analyse Gianni Haver. L’investissement est ainsi beaucoup moins hasardeux.» Et le mariage des plus heureux: le luxe ayant longtemps été l’apanage de la noblesse, les enfants de célébrités embarqués dans les campagnes des maisons prestigieuses sont aussitôt étiquetés graines d’aristocrates. Bref, la boucle est bouclée.


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Reste que cette entrée par effraction dans l’univers de la noblesse peut n’être pas définitive. «On parle beaucoup de mini-Cindy dans le cas de sa fille Kaia, ou de mini-Madonna pour Lourdes, comme si le caractère héréditaire de leur talent était acquis et pouvait assurer la fondation d’une dynastie, constate Valérie Gorin. Mais il faudra attendre une génération pour voir si cela se vérifie. Des échecs vont probablement survenir.» Des désillusions, voire carrément des catastrophes. Car «dans les années 80-90, on aimait surtout parler des «enfants de» pour leurs excès et leurs échecs, tels le fils de Michael Douglas ou de Mélanie Griffith». Créature onirique et supérieure un jour, objet de risée générale le lendemain. Les nobles rejetons feraient bien de se méfier: il y a peut-être un gouffre au bout du tapis rouge.


©Jon Kopaloff/FilmMagic; Dave M. Benett/Getty; Foc Kan/Getty; James Devaney/Getty

Lourdes Leon, 19 ans, fille de Madonna et Carlos Leon. Durant son enfance, on a beaucoup parlé de ses sourcils broussailleux. Mais les temps ont changé, Cara Delevingne a fait de cette particularité un détail sexy, et Lourdes est désormais égérie pour Stella McCartney. On la dit même encore plus belle que sa maman…

Georgia May Jagger, 24 ans, fille de Jerry Hall et Mick Jagger. Elle a débuté sa carrière dans le mannequinat dès ses 15 ans. Avant de passer devant l’objectif des plus prestigieux photographes de mode: Mario Sorrenti, Patrick Demarchelier, ou encore Terry Richardson.

Violette d’Urso, 16 ans, fille d’Inès de La Fressange et Luigi d’Urso. Avant de craquer pour le minois de Lily-Rose Depp, Karl Lagerfeld avait élu la jeune Violette nouvelle muse de ses shootings. Elle apparaît ainsi, dès l’âge de 15 ans, dans les pages de «Vogue» ou de «Vanity Fair». Sa grande sœur, Nine, 20 ans, est également égérie pour une grande maison de luxe.

Suri Cruise, 10 ans, fille de Katie Holmes et Tom Cruise. Elevée dès le berceau au rang d’it girl, la petite Suri s’est surtout fait connaître pour ses caprices de (mini) star: chaussures à talons, manteau hors de prix et orgie de produits de beauté dès l’âge de 3 ans. Plus récemment, elle aurait décidé de virer son professeur de guitare pour cause de «différends créatifs». Et le melon, sinon, ça va?


©Ian Gavan; Dave M. Benett; Karwai Tang/Foc Kan; Mike Coppola/People.com; Charley Gallay/Getty Images

Dylan Penn, 25 ans, fille de Robin Wright et Sean Penn. On l’a découverte à l’occasion d’une brève idylle avec le vampire charmeur Robert Pattinson. Depuis, elle a posé pour divers magazines, dont W, et vient d’entamer une carrière d’actrice. Elle a notamment joué aux côtés de Kevin Spacey.

Julia Restoin Roitfeld, 35 ans, fille de Carine Roitfeld et Christian Restoin. Fille d’une célèbre rédactrice en chef de «Vogue» France, elle a été choisie en 2006 par Tom Ford, ami de la famille, pour être l’égérie du parfum Black Orchid. Depuis, on l’a vue devenir graphiste ou consultante pour plusieurs enseignes de vêtements.

Brooklyn Beckham, 17 ans, fils de Victoria et David Beckham. Avoir 6,4 millions d’abonnés sur Instagram, est-ce l’équivalent d’un impressionnant CV? La réponse est oui, puisque Burberry l’a récemment nommé photographe pour sa nouvelle campagne.

Jaden Smith, 17 ans, fils de Jada Pinkett et Will Smith. Dans la fratrie Smith, très médiatisée, le jeune Jaden a fait les choses en grand tout en se jouant des codes. On l’a en effet vu poser dans la campagne printemps-été 2016 de Louis Vuitton, au milieu de mannequins féminins. Détail piquant? Il y porte une jupe plissée. Quant à sa sœur Willow, elle est déjà une star.

Zoë Kravitz, 27 ans, fille de Lisa Bonet et Lenny Kravitz. Enfant d’un papa hypercélèbre lui-même fils d’un père producteur, Zoë a pourtant été élevée loin des flashs avides des paparazzis. Eloignement temporaire. Elle a rattrapé son retard en devenant actrice (aux côtés de Jodie Foster dans «A vif», 2007), mannequin pour de prestigieux magazines et musicienne dans un groupe de R’n’B.

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