santé
Bien respirer pour éliminer les kilos
Favoriser une alimentation équilibrée et limiter les apports en graisses et sucres raffinés tout en pratiquant des activités physiques, c’est bien. Evidemment. Mais pour perdre du poids efficacement et à long terme, cela ne suffit pas. Du moins pas forcément. Car maigrir – et/ou ne pas grossir – n’est pas qu’une affaire de nourriture, mais aussi de gestion des émotions. Pourquoi? Et comment réussir à ne plus être victime de sentiments négatifs qui pèsent autant sur le moral que sur les hanches? Explications du Dr David O’Hare, médecin nutritionniste de formation, spécialisé dans le traitement de l’obésité.
Un cercle infernal
Expert reconnu de la cohérence cardiaque, il reçoit des patients depuis plus de trente ans. «Plus de 90% des personnes qui s’astreignent à un régime diététique dans le but de maigrir récupèrent (et souvent dépassent) leur poids de départ dans les six mois qui suivent la fin de leur diète.» Un constat d’ailleurs corroboré par une vaste étude publiée en 2011 par l’Agence nationale française de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).
De fait, cette recherche montre, d’une part, que les diètes restrictives non médicalement suivies sont potentiellement hyperdangereuses (déséquilibres nutritionnels, carences, etc.). Elle prouve, d’autre part, qu’elles ont aussi tendance à induire «une perturbation du comportement alimentaire». Un dérèglement qui augmente le risque d’une «reprise de kilos au-delà du statut pondéral initial». Et, pour le coup, génère l’entrée dans le cercle infernal et émotionnellement douloureux du «mincir-regrossir-remincir-regrossir».
Le stress, un ennemi pervers
Cela dit, si bien huilée soit-elle, cette mécanique diabolique du yo-yo peut (heureusement!) s’enrayer. Comment? En faisant baisser la pression, les problèmes de surpoids étant liés aux émotions négatives. En effet, «le stress est responsable d’une prise de poids via deux mécanismes. D’abord, lorsqu’il est chronique, il provoque une augmentation du taux de cortisol dans des proportions que le corps n’arrive plus à gérer. Or, cette hormone est responsable du stockage du sucre et favorise la réduction de la masse corporelle tout en modifiant la répartition des fluides dans le corps.» En résumé: un taux de cortisol qui reste élevé a des répercussions sur le tour de taille. Par ailleurs, chez quelque neuf personnes sur dix, énervement et anxiété induisent un grignotage superflu.
Gérer ses émotions par la respiration
Pour éliminer – ou mieux gérer – tensions et angoisses, notre spécialiste se base sur une méthode désormais très utilisée: la cohérence cardiaque. Par cette technique, popularisée notamment par David Servan-Schreiber dans son best-seller «Guérir», il est possible de contrôler son cœur et, partant, de jouer sur le cerveau en influençant le système nerveux autonome. En pratiquant tous les jours des exercices de respiration spécifiques, on provoque «une cascade d’événements hormonaux, neuronaux et biochimiques» qui mettent le système émotionnel en mode neutre. Une manière de leurrer le cerveau, note le spécialiste, en lui faisant croire «que tout va bien, qu’on est calme, qu’on n’a pas besoin de compenser ni de chercher des récompenses».
Quelques minutes par jour
Histoire d’obtenir des résultats concrets, le Dr O’Hare a établi un programme, décrit très précisément dans son «Maigrir par la cohérence cardiaque», qui tourne notamment autour de la pratique quotidienne de deux exercices:
- Le matin au lever et en fin d’après-midi: prendre cinq minutes, s’asseoir et respirer en «fréquence 6» (lire encadré).
- Juste avant les repas (ou collations): prendre une minute et respirer 6 fois, ce qui a le quadruple effet d’entraîner un recentrage physiologique et une meilleure conscience alimentaire tout en diminuant la sensation de faim et en accélérant la satiété. Avec de l’entraînement, cela permet aussi de réduire les émotions inductrices de compulsions alimentaires.
Le médecin relève toutefois qu’il s’agit d’une méthode complémentaire: une nutrition raisonnée doit être appliquée parallèlement. Il précise cependant qu’il est davantage question d’une bonne hygiène de vie que d’un régime stricto senso. Oui à une alimentation équilibrée et à des activités physiques, non à une diète stricte et génératrice de stress!
Bon à savoir
- Pour des raisons anatomiques et physiologiques, la cohérence cardiaque ne fonctionne pas de manière optimale lorsque l’on se trouve en position couchée. Mieux vaut donc pratiquer assis, confortablement installé sur une chaise. Ou éventuellement debout. Et dans tous les cas dans un endroit calme.
- La cohérence cardiaque est applicable au stress et à d’autres dérèglements physiologiques, dont le diabète, l’hypertension artérielle, l’insomnie. Il s’agit d’un complément qui permet de potentialiser les traitements.
- A ce jour, aucun effet indésirable n’est connu et la méthode s’applique à tous. Cependant, elle fonctionne moins bien chez les personnes qui suivent un traitement à base de bêtabloquants et/ou de neuroleptiques (médicaments qui bloquent les récepteurs à stimuler), et chez les transplantés cardiaques.
Exercice pratique de cohérence cardiaque
La «fréquence 6» Assis, les mains sur les jambes ou sur une table, pieds à plat et dos droit, il faut respirer profondément 6 fois par minute (au lieu des 10 à 25 fois habituelles) à raison de 6 inspirations abdominales par le nez et 6 expirations par la bouche de 5 secondes chacune. Environ deux semaines de pratique sont nécessaires pour commencer à adopter une respiration en «fréquence 6» de manière automatique et pour en observer des résultats tangibles.
Pour compter les secondes et les respirations Une montre ou les minuteurs des ordinateurs et téléphones portables peuvent évidemment faire l’affaire. De même, d’ailleurs, que les nombreuses applis ou sites Web dévolus à la cohérence cardiaque (par exemple florenceservanschreiber.com). David O’Hare, pour sa part, estime que compter les secondes détourne trop la conscience de la respiration et des sensations corporelles. Son truc? Le dessin! Muni d’une feuille de papier, d’un crayon et d’une minuterie réglée sur trois ou cinq minutes, il propose de «tracer» sa courbe de respiration. Ainsi, quand la poitrine se soulève à l’inspiration, le trait monte. Au petit temps d’arrêt, à peine perceptible, on obtient une crête, puis, à l’expiration, le tracé descend. Des vagues se forment et se succèdent. Une fois un automatisme rythmique installé, le dessin ne sera plus nécessaire.