C'est votre histoire
«Si ça avait été possible, j'aurais donné mon lait»
L’arrivée d’un enfant est un tsunami, mais quand mes jumelles sont nées en 2016, c’était fois deux avec une hospitalisation en néonatologie pour Camille en soins continus, et Olivia avec moi en chambre. Un bébé qui arrive prématurément n’a pas les mêmes besoins au même moment, du coup l’allaitement ne se fait pas de la même façon. Moi qui n’avais jamais vu un tire-lait pour mes deux filles aînées, je me souviens de ce que m’avait alors dit l’infirmière: «Ça va devenir votre meilleur copain.» C’était la première rencontre avec un truc que j’allais utiliser huit fois par jour. Avec des bébés qui font juste deux kilos et qui ne peuvent pas téter comme des bébés à terme, la mise au sein n’est pas du tout la même. J’ai donc utilisé ce tire-lait, et des biberons du CHUV avec du lait artificiel pour supplémenter dans l’attente que mon tirage de lait augmente par rapport aux quantités utiles pour mes bébés.
Avec le recul, je pense vraiment que si à l’époque il y avait eu un lactarium, j’aurais accepté le lait maternel d’une autre femme dans la mesure où ce lait est donné, offert par quelqu’un qui l’a fait avec bienveillance et qu’il est stocké avec des protocoles qui peuvent rassurer.
Ces mamans qui galèrent
À un moment donné, j’avais beaucoup de lait, et je voyais d’autres mamans qui galéraient dans le service, mais l’idée de donner mon lait ne m’aurait pas traversé l’esprit, tellement j’avais la tête dans le guidon. J’avais un litre et demi de lait par jour à une époque, qui était stocké soit au frigo, soit au congélateur pour mes bébés car leurs besoins étaient moins importants. Au fil du temps, vu que leurs besoins augmentaient, j’ai pu prendre dans les réserves. La situation s’est ensuite compliquée car Camille a dû être réhospitalisée tous les deux mois. Ça engendrait de la fatigue, du stress et du coup une diminution de la lactation.
L'importance du soutien par les pairs
C’est lorsque j’ai terminé d’allaiter Olivia et Camille que je suis devenue marraine d’allaitement et que je me suis mise à animer des Cafés au lait au CHUV. Durant ces rencontres, des mamans qui ont allaité des bébés prématurés viennent soutenir d’autres femmes qui vivent ces situations. C’est en entendant ces mères raconter qu’elles n’ont pas assez de lait, qu’elles n’arrivent pas à tirer leur lait ou qu’elles ont de la peine à devoir donner du lait artificiel à leur bébé que je me suis dit qu’avec le recul, j’aurais pu donner mon lait lorsque j’en avais trop durant l’hospitalisation de mes jumelles. Avoir le lait d’une autre maman – qui n’en a plus forcément besoin – en attendant de pouvoir tirer son propre lait permettrait d’atténuer le stress et la culpabilité.
J’imagine que, pour certaines, ça pourrait être une démarche délicate d’accepter le lait maternel d’une autre femme, mais de savoir que cette maman est aussi passée par les étapes difficiles et les conséquences sur l’allaitement qu’implique ce vécu en néonatologie, c’est un soutien précieux. L’important est d’informer les parents de façon éclairée sur l’utilité du futur lactarium, et j’imagine que toutes les mamans qui ont traversé ces difficultés donneraient leur lait si elles le pouvaient.»
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