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«81 ans et toujours accro à ma moto»

Bikeuse a 80ans moto

Sur ma Harley, j’ai avalé les kilomètres et vécu mon rêve jusqu’au bout. Cette ivresse et cette liberté sont incomparables!

© Corinne Sporrer
J'avais 20 ans en 1958 et, depuis toujours, une folle envie d’avoir une moto. Mais à cette époque, il n’était pas envisageable pour une femme de devenir motarde. Je ne sais pas vraiment d’où me venait cette passion pour les deux roues, mais elle était là, bien ancrée. Originaire de Fribourg, j’ai grandi dans un environnement plutôt orienté mécanique, puisque mes parents possédaient un garage de réparation de voitures. Toutefois, je n’ai jamais été attirée par les quatre roues, même si je suis devenue la première femme apprentie mécanicienne sur auto de Suisse! C’est avant tout le champ de liberté que j’associais à la moto en elle-même qui me fascinait: sentir l’air, le vent, choisir sa route en fonction de là où le soleil brille le plus. Pourtant, j’ai dû faire le poing dans ma poche avant de m’offrir ce rêve de grosses cylindrées. Je me suis mariée, j’ai eu deux enfants et je leur ai consacré tout mon temps. J’ai aimé ce rôle de mère et je n’ai aucun regret, d’autant plus qu’un jour, ce sont eux qui m’ont fait le plus beau des cadeaux…

Une Harley pour mes 50 ans

Le jour de la Fête des mères, l’année de mes 50 ans, mes enfants m’ont dit d’aller voir au garage le cadeau qui m’attendait. C’était une Honda 125! Ils savaient que j’en rêvais depuis toujours et je pouvais ouvrir un nouveau chapitre de ma vie maintenant qu’ils étaient devenus grands. Depuis ce jour, je n’ai plus lâché le guidon. J’ai rapidement troqué la 125 pour une Harley-Davidson avec laquelle j’ai passé mon permis grosses cylindrées. Ma première virée, c’était jusqu’à Bulle pour voir ma sœur. Je me souviens que ma nièce a tout de suite voulu monter faire un tour.

J’ai commencé par sillonner la Suisse et. surtout, à faire des cols. Rien de tel qu’une sortie durant laquelle on en fait trois à la suite, comme le classique Susten-Grimsel-Furka. Je me suis inscrite dans un club, j’ai participé à un nombre incalculable de concentrations de motos et je me suis créé tout un réseau d’amis avec lesquels je pars pour des virées en Suisse et en Europe. De l’Espagne à la Suède, de Paris à Prague, j’ai avalé les kilomètres et vécu mon rêve jusqu’au bout. Cette ivresse et cette liberté sont incomparables. Aujourd’hui, on a des GPS, mais je trouve que ça tue l’aventure. J’aime avoir la carte sur mon réservoir, à l’ancienne, et demander ma route à un habitant. Ça fait partie de l’expérience et ça ouvre l’horizon. Parfois, en se perdant, on découvre des choses magnifiques, des petites routes sur lesquelles on n’irait pas autrement. En général, les itinéraires sont établis dans les grandes lignes, mais à moto, on se laisse guider par nos envies et notre liberté. La seule fois où j’ai vraiment fixé un but à un voyage, c’était pour m’arrêter dire bonjour à une amie en Suède, qui avait travaillé avec moi à l’époque chez TetraPak. Et la seule fois où je suis partie seule, malgré moi car ma camarade de route est tombée malade au dernier moment, c’est lorsque je suis partie pour la Pologne. Toutefois, j’ai fait demi-tour après la première nuit, car tout à coup, je me suis dit que si je tombais dans un talus, personne ne saurait où j’étais. L’unique contrainte, finalement, c’est la météo. On en est tributaire, mais depuis que j’ai troqué mon équipement en cuir pour du gore-tex, je peux tenir plusieurs heures sous la pluie sans être mouillée.

Un side-car pour balader mon petit-fils

Lorsque je suis devenue grand-maman, j’ai investi dans un side-car. J’ai tenté de convertir mon mari au plaisir de la route, mais ça n’a jamais été son truc. Mon petit-fils, par contre, a tout de suite adoré que sa mamie le balade en side-car. Ma petite-fille aussi. Je les embarquais pour aller au Zoo de Bâle ou pour pique-niquer en haut d’un col. Ils étaient aussi tout heureux que je vienne les chercher à la sortie de l’école. Toute leur classe trépignait quand j’arrivais sur mon bolide et chaque élève a eu droit à son tour en side-car. Avec le club de Moudon, on organisait même des sorties Passeport vacances pour offrir des virées à des enfants, parfois même des petits malades qui appréciaient beaucoup de découvrir cette liberté sur la route. Aujourd’hui, mes petits-enfants sont grands et ni eux ni mes deux enfants n’ont attrapé le virus de la moto, sauf ma nièce, qui a aujourd’hui 45 ans. Elle fait partie d’un club et m’appelle pour me proposer des tours. Alors que moi, je prends mon téléphone pour appeler mes copains de route, elle a créé un groupe WhatsApp pour organiser ses sorties, et elle sait qui se trouve où quand elle choisit de partir à moto. Je trouve ça super, même si moi je suis plutôt une motarde old school: l’imprévu et l’aventure font partie de la moto telle que je la conçois et comme je l’ai toujours rêvée.

Pas prête à poser les plaques

À 77 ans, j’ai dû lâcher ma Harley, car je me suis fait opérer de la hanche. Pendant trois ans je n’ai pas pu rouler. Et puis, pour mes 80 ans, je me suis offert une Honda 600. Depuis, je roule pour mon compte. Dès que les routes sont sèches, je file quelque part en Suisse. J’ai trois classeurs fédéraux avec des dossiers qui racontent mes 30 années de voyages à moto. Pour chaque itinéraire, il y a des photos, des anecdotes, des impressions. J’aime en offrir des exemplaires à ceux qui ont fait la virée avec moi. Durant les trois ans où ma santé m’a empêché de faire de la moto, j’ai évité de me replonger dans ces souvenirs, ça me faisait trop mal de ne pas pouvoir repartir sur la route. Mais depuis que j’ai ma Honda, je me suis réveillée! En trente et un ans de moto, je n’ai eu qu’un accident, pour lequel je n’étais pas fautive. Autant dire que je ne suis pas prête à poser les plaques!

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