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Toxic Positivity: tous ces contenus «feel-good» nous rendent-ils tristes?

Toxic positivity tous ces contenus feel good nous rendent ils tristes

«S'il est très bénéfique de chercher à se donner un peu courage ou d'élan supplémentaires, lorsqu'on se sent triste ou démotivé, il ne faudrait pas que cela devienne une forme d'évitement- Il convient d'envisager les choses dans ce qu'elles sont réellement, en donnant, si on y parvient, davantage d'importance aux événements positifs.» - Brigitte Favre, psychologue et psychothérapeute FSP

© Getty Images / Carlos Bezz

À moins d'être abonnée uniquement à des comptes de chats, de hérissons ou de pâtissiers (comme moi), il vous arrive certainement de tomber sur ces fameuses citations, devises ou mantras positifs, de véritables pep-talks destinés à nous remonter le moral en deux scrolls. Et j'avoue, ça marche: Instagram se prend volontiers pour un shot de vitamine D, une pom-pom girl minuscule et virtuelle, toujours prête à nous encourager lorsque nous broyons du noir.

Le concept n'est pas nouveau, mais la crise sanitaire semble l'accroître, alors que les internautes se montrent assoiffés de divertissement et de légèreté, dans un monde tout déboussolé. Ainsi, un nombre grandissant de comptes Instagram se fixe aujourd'hui l'objectif de divulguer des phrases positives, destinées à orienter nos pensées vers davantage d'optimisme.

Tel est évidemment l'effet escompté. Toutefois, il arrive que les pages concernées suscitent une toute autre réaction:

«Parfois, je culpabilise en voyant toutes ces phrases motivantes, avoue Julie, 30 ans. Quand je me sens triste ou stressée, je me dis que je devrais plutôt être heureuse et reconnaissante, comme me le rappellent tout le temps ces contenus sur les réseaux sociaux.»

Personne n'est constamment heureux!

Aux Etats-Unis, le phénomène possède déjà son propre nom: la Toxic Positivity, soit la naissance d'un sentiment d'inadéquation ou de morosité, suscités par un excès d'appels à la positivité.

Si vous partagez l'avis de Julie, soyez rassurée: il est impossible d'être positif vingt-quatre heures sur vingt-quatre, ainsi que nous le rappelle le psychologue FSP Julien Borloz: «Sur les réseaux sociaux, le but est de vendre du rêve, constate-t-il. Il s'agit d'une vitrine, sachant que les gens n'y montrent souvent que des résultats victorieux, sans dévoiler les étapes laborieuses qu'ils ont traversées pour y parvenir. Ces contenus peuvent effectivement aider ou motiver beaucoup de personnes, mais, lorsqu'ils s'accumulent, risquent aussi de nous donner l'impression qu'on doit toujours être positif.»

Or, cette idée n'est absolument pas réaliste, ni forcément souhaitable, selon notre expert: «La quête d'une constante positivité peut nous pousser à occulter les autres émotions, explique-t-il. La tristesse ou la colère, par exemple, sont utiles: elles représentent un signal que nous envoie notre corps en réaction à certains événements, et qu'il est important d'écouter. C'est en les vivant et en les comprenant qu'on leur donne l'opportunité de se dissoudre, et non de s'accumuler au fond de nous. Sans oublier la diversité des émotions dont on se prive en visant toujours la même humeur!»

© Viktor Forgacs / Unsplash

La positivité en temps de crise

Cela explique pourquoi les effets de la toxic positivity sont accentués par la période incertaine et stressante que nous traversons: une injonction constante à la positivité peut nous empêcher d'accueillir convenablement les émotions négatives qu'entraîne la crise sanitaire. Puisque chaque individu est impacté de manière différente, il semble tout naturel de vouloir gifler le premier Candide qui osera nous déclarer de but en blanc que «tout ira bien».

«Il est difficile, actuellement, de ne pas se sentir anxieux quant à son futur, ses proches, l'avenir de la planète, résume Brigitte Favre, psychologue et psychothérapeute FSP. Bien sûr, il est important de cultiver une attitude positive, mais si cela devient une injonction, elle augmente davantage notre niveau de stress. En constatant qu'elles ne parviennent pas à être positives tout le temps, certaines personnes se sentiront incomprises, frustrées ou finiront par beaucoup culpabiliser.» En d'autres termes, intimer quelqu'un à être positif sans lui donner d'outils concrets ne lui semble pas toujours être une idée très constructive.

En effet, lorsqu'on parle de psychologie positive, il ne s'agit pas de pousser les gens à être constamment heureux, en ignorant ce qui ne va pas: «S'il est très bénéfique de chercher à se donner un peu courage ou d'élan supplémentaires, lorsqu'on se sent triste ou démotivé, il ne faudrait pas que cela devienne une forme d'évitement, poursuit Brigitte Favre. Il convient d'envisager les choses dans ce qu'elles sont réellement, avec leurs aspects positifs et négatifs, en donnant, si on y parvient, davantage d'importance aux événements positifs. On tente de voir le bon côté des choses, sans se voiler la face devant l'adversité.»

De plus, notre experte souligne que, face au Covid-19, nos émotions négatives s'avèrent d'autant plus utiles: «Comme elles nous poussent à nous montrer vigilants et à anticiper un éventuel souci, elles nous protègent, en quelque sorte, estime-t-elle. Par contre, il ne faudrait pas qu'elles deviennent invalidantes, bien sûr!»

© Jacqueline Munguia / Unsplash

Mais... restons optimistes!

Ainsi, la positivité n'échappe pas à la maxime «aucun extrême n'est bon». Cependant, gardons en tête qu'elle reste bien sûr un formidable outil, lorsqu'elle n'est pas imposée, feinte ou véhiculée à outrance.

Pour Julien Borloz, positivité n'est pas forcément synonyme d'optimisme: «Dans l'idéal, il faudrait essayer de toujours envisager les apprentissages que l'on peut tirer d'une situation difficile, ajoute-t-il. De voir le bon côté des choses, tout en acceptant que certains moments seront forcément plus pénibles que d'autres. L'important est de rester authentique! Tant qu'on accepte les différentes facettes de la vie, on peut tenter de tirer le meilleur des passages durs.»

Même son de cloche pour Brigitte Favre, qui nous conseille d'être plus cléments envers nous-mêmes: «On peut retrouver un peu d'insouciance dans les petites choses, en vivant le moment présent, plutôt que de viser une positivité constante, rappelle-t-elle. On ne peut pas être un moteur constant pour les autres, ce serait bien trop fatigant!»

Et beaucoup moins intéressant, aussi, certainement. Ainsi, la prochaine fois que vous vous sentirez frustré en lisant les mantras 100% positifs dont Instagram vous assaille, souvenez-vous que vous avez le droit d'être pessimiste, de temps en temps. Cela vous permettra en outre d'être plus joyeux, pour de vrai, le lendemain!

Des comptes Instagram qui nous boostent avec équilibre

The Good Quote, un concentré de citations bienveillantes qui nous encouragent à accueillir nos émotions pour mieux rebondir,

Project Ur Ok, une page qui nous aide à nous sentir compris et à relativiser les difficultés qu'on peut traverser.

Just Girl Project, un compte spécialement dédié aux femmes, avec des citations inspirantes et des encouragements à se faire confiance, à être bienveillantes envers soi-même.

The Happy Newspaper, une page débordant de bonnes nouvelles et d'appels à s'aimer.

Hello Fears, ou le compte dédié à l'objectif d'affronter nos peurs, de quitter notre zone de confort pour changer notre vie.

Les Belles Nouvelles, pour se souvenir quotidiennement qu'il y a toujours du bon, dans chaque journée.

Gaëlle Prudencio, une pétillante influenceuse qui cultive un bel optimisme, tout en encourageant le mouvement body positive.


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