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Ursula Oesterle et Sophie Revaz: l'innovation au féminin
Deux personnalités, une seule philosophie que l’on pourrait résumer en trois mots: femme, santé et changement.
L’une est avocate de formation, membre de la direction générale de l’assureur Groupe Mutuel. L’autre détient un doctorat en physique, elle occupe le poste de vice-présidente de l’EPFL pour l’innovation. Deux personnalités, une seule philosophie que l’on pourrait résumer en trois mots: femme, santé et changement. Ensemble, Sophie Revaz et Ursula Oesterle incarnent une volonté nouvelle de booster la technologie au service des femmes.
Le Groupe Mutuel et l’EPFL ont, en effet, noué un partenariat destiné à soutenir des start-up dont le projet recèle un potentiel d’innovation dans la santé au féminin. Favoriser les «femtechs», c’est tout l’enjeu du programme Tech4Eva. L’idée? Faire émerger des solutions à des problèmes de santé spécifiquement féminins. Mais si l’on parle ici de santé, c’est «au sens large», insistent Ursula Oesterle et Sophie Revaz. Pour elles, les femtechs ne s’arrêtent pas aux traitements médicaux, elles englobent aussi la prévention, le bien-être, l’équilibre mental. Tout ce qui vise à améliorer la santé des femmes au-delà de la notion de maladie. Grossesse, fertilité, ménopause, menstruations, médecine genrée, bien-être sont au cœur des activités des trente start-up sélectionnées. Depuis avril 2021, ces jeunes pousses, de Suisse et d’ailleurs, bénéficient d’un encadrement à plusieurs niveaux: mentorat, expertise, formation, visibilité auprès d’investisseurs, etc. Ce soutien, d’une durée de neuf mois, doit servir d’accélérateur à leur éclosion sur le marché.
Amener là science là où elle peut avoir un impact
Dans la liste des innovations sélectionnées, on trouve par exemple un appareil d’analyse non invasive des embryons destinés à la reproduction médicalement assistée, un bracelet capable de réagir aux bouffées de chaleur pour rafraîchir le corps, ou encore un appareil connecté permettant de renforcer le plancher pelvien. La moitié des start-up du programme en sont à leurs débuts, l’autre moitié à un stade de développement plus avancé. Toutes ne sont pas dirigées par des femmes.
Nommée en début d’année à la tête de la vice-présidence de l’EPFL pour l’innovation, elle bataille pour la création de plateformes d’interactions entre le monde de la recherche et celui de l’entrepreneuriat. Avec un objectif: amener la science là où elle peut avoir un impact sur la société.
Pour Sophie Revaz, du Groupe Mutuel, c’est un projet qui va de soi. «Nous assurons des personnes, l’humain est au centre de notre activité. Nous avons 1,3 million de clients dont 50% sont des femmes. Si des innovations répondent à leurs besoins, nous pourrions les intégrer à nos services ou nous en inspirer afin d’offrir une meilleure prévention, de meilleurs traitements, de meilleures prestations.»
La santé, facteur d’égalité
Pour elle, comme pour Ursula Oesterle, trop de problématiques féminines demeurent taboues, alors qu’elles sont loin d’être anodines pour les femmes et pour la société. D’où la nécessité «d’engager un véritable changement culturel», pour reprendre les termes de Sophie Revaz. Selon elle, «on parle beaucoup d’égalité, d’une meilleure représentativité des femmes, à raison, mais la santé constitue aussi un facteur d’égalité». Elle influence notamment le parcours professionnel, Ursula Oesterle en est persuadée: «Je suis intimement convaincue qu’il existe un lien entre santé et carrière.» Trop souvent encore, les femmes encaissent des difficultés, des souffrances pas toujours visibles, en silence.
Tech4Eva est une des premières initiatives du genre au monde qui voit le jour en Suisse. Un pas vers un changement de mentalité et un geste pour attirer des fonds là où ils sont encore trop rares. Car comme le rappelle Sophie Revaz, «seuls 4% des investissements dans la recherche liée à la santé sont dédiés aux femmes».