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Le Schweizerhof Bern et son histoire
Avec ses moulures au plafond, ses lustres en cristal – restaurés à Vienne dans les règles de l’art – et ses colonnes de marbre blanc, le salon Trianon de l’Hôtel Schweizerhof, à Berne, semble d’un autre âge. Certes, la climatisation y a été installée, modernité oblige, mais la vaste salle de bal datant de 1913 n’a rien perdu de sa superbe. Bien que recouvert d’une épaisse moquette, le parquet craque sous les pas, comme pour témoigner de son passé fastueux. Pour un peu, on entendrait le frou-frou des robes qui ont virevolté sur ces 350 m2 de chêne brut. Si les décennies ont passé, le salon n’a pas perdu le sens de la fête. Chaque réveillon, un bal de la Saint-Sylvestre y est organisé. Le thème du prochain est déjà choisi: les années 80. Les temps changent. Mais la nostalgie reste.
Depuis sa réouverture en 2011, après six ans d’une rénovation complète, le cinq-étoiles bernois s’attache à entretenir le souvenir de son illustre passé. Incrusté dans le plafond de la réception, un écran de télévision diffuse en boucle des images stellaires illustrant la théorie de la relativité restreinte, élaborée dans la capitale suisse par Albert Einstein. Dans le Cigar Lounge, une photo en noir et blanc accrochée au mur offre une vue sur les extérieurs du Schweizerhof durant les Années folles.
Hormis ce cliché, les documents d’époque sont rares. Rien d’étonnant à ce qu’Anja Ullmann, directrice des ventes et du marketing, soit aussi fière de détenir l’un de ces précieux vestiges: un dépliant de l’hôtel datant de 1966. «Mon mari l’a acheté aux enchères et me l’a offert à Noël l’année dernière», explique la jeune femme en feuilletant délicatement la relique aux images joliment désuètes. On y voit notamment la Schultheissenstube, l’ancien restaurant typique du Schweizerhof. La taverne a été détruite il y a près de dix ans, mais son excellente réputation lui a survécu. Ainsi, il arrive encore que des clients appellent la réception pour réserver une table.
De Lino à Loren
Pour les fins gourmets, reste la Jack’s Brasserie, ainsi rebaptisée en 1992 en mémoire de Jack Gauer, ancien propriétaire de l’hôtel. Avec ses boiseries, ses banquettes tapissées de velours et ses lampes Art déco, elle porte beau ses 100 ans. Quatorze points au Gault&Millau, huitante places et une spécialité maison: le Wienerschnitzel. On le dit délicieux. Sophia Loren, Ursula Andress, Lino Ventura ou Jacques Attali l’ont-ils dégusté? Impossible à savoir: comme tout hôtel de luxe, le Schweizerhof cultive l’art de la discrétion. Néanmoins, il a gardé une trace du passage de ces convives hors du commun en gravant leurs noms sur des plaquettes en laiton clouées tout autour des banquettes de la brasserie.
Le cinq-étoiles a connu tant de stars. Liz Taylor y a séjourné, mais aussi Ella Fitzgerald, le prince Rainier et Grace Kelly, Sir Peter Ustinov, David Niven, Placido Domingo, Diego Maradona, Christina Onassis, Alberto Tomba, Franz Josef Strauss, Mireille Mathieu… Le livre d’or porte, ici, bien son nom. Une scène d’«Au service secret de Sa Majesté», le seul James Bond avec George Lazenby dans le rôle de 007, a même été tournée sur un balcon de l’hôtel dans les années 60.
Et puis, il y a tous ces anonymes qui venaient autrefois s’encanailler au Jaylin’s, le club de jazz du Schweizerhof, dont les soirées étaient courues dans toute la ville. En 2012, il a été remplacé par un vaste spa, et le son du jazz a laissé la place à de la musique d’ambiance beaucoup plus chill-out; il faut bien vivre avec son temps… La direction l’a compris. Bain japonais avec écran de télé au-dessus de la baignoire dans les suites, reproductions de Paul Klee dans toutes les chambres, minibar à discrétion (sauf liqueurs), chef sushi à demeure, le Schweizerhof a tout mis en œuvre pour satisfaire les exigences de la clientèle actuelle. Sur le site TripAdvisor, les internautes lui ont d’ailleurs décerné la première place parmi les hôtels citadins suisses et parmi les hôtels de Berne.
Que de chemin parcouru depuis 1859, année où Daniel Vogel acheta le Fetzer et le bâtiment voisin, le Zähringerhof, pour les réunir et en faire ce qui allait devenir le premier hôtel de luxe de Berne. A l’époque, le Palais fédéral était encore en construction et la gare ferroviaire n’existait pas. Mais le Schweizerhof était déjà debout. Il l’est toujours, dressant son imposante façade sur la Bahnhofplatz. Imperturbable.
Le Schweizerhof Bern en chiffres
- 1859 L’Hôtel Fetzer est rebaptisé le Schweizerhof.
- 99 chambres et suites.
- 2012 Inauguration de la Sky Terrace sur le toit.
- 500 m2 Surface du spa.
- 135 collaborateurs.
- 600 sortes de vins disponibles à la Jack’s Brasserie.
- 515 fr. Nuit la moins chère (en double petit-déjeuner).
Elle y a posé ses valises
En mai 1950, juste après avoir épousé Nicky Hilton (le grand-oncle de Paris) à Beverly Hills, Elizabeth Taylor, alors âgée de 18 ans, embarque avec son mari – le premier! – à bord du «Queen Mary» pour un voyage de noces en Europe. Durant trois mois, le couple sillonne le Vieux- Continent, s’arrêtant au lac de Côme et à Berne, où ils descendent au chweizerhof.
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