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Pedro Almodovar présidera le jury du Festival de Cannes

Pedro Almodovar présidera le jury du Festival de Cannes

Pedro Almodovar à Cannes en 2016 en compagnie de l'actrice Adriana Ugarte.

© Getty

Son épaisse chevelure a blanchi et, à 67 ans, Pedro Almodovar, qui va présider cet année le jury du Festival de Cannes, doit désormais se défendre de ne plus être aussi «almodovarien» que certains critiques ou spectateurs le voudraient. Car son nom aura longtemps été synonyme de transgression, d'humour osé, de mélodrames passionnés et d'héroïnes hors normes.

Après le succès de «Femmes au bord de la crise de nerfs» en 1988, extravagant vaudeville qui le lança à l'international, le journaliste français Bernard Pivot s'amusait à lui énumérer en 1992 les thèmes abordés dans ses films: masochisme, homosexualité, masturbation, drogue, pornographie, attaques contre la religion... La réponse d’Almodovar:

Tous ces thèmes dont on dit qu'ils sont tabous appartiennent à ma vie, je ne les considère pas comme interdits ni scandaleux.

Il aura suffi de quelques années pour que ce Madrilène tout en rondeurs - homosexuel revendiqué - devienne l'incarnation d'une Espagne moderne et tolérante. Né le 24 septembre 1949 dans la région aride de La Manche, au centre de l'Espagne, Pedro Almodóvar Caballero a rarement évoqué son père - un muletier qui disparaissait des semaines entières pour aller vendre du vin - décédé l'année de son premier film en 1980.

Hommage à sa mère

Mais sa mère a été la grande figure de sa vie, et l'exploration des liens maternels un de ses thèmes de prédilection. «Ma passion pour la couleur est la réponse de ma mère à tant d'années de deuil et de noirceur contre nature; j'ai été sa vengeance sur la sombre monochromie imposée par la tradition», confiait-il en 2004 en France. Pedro a 16 ans quand il prend son indépendance pour gagner Madrid. L'école de cinéma étant encore «fermée par Franco», c'est à la cinémathèque qu'il découvre ses maîtres pour toujours, d'Hitchcock à Bergman en passant par Buñuel, a-t-il raconté en 2016 à des étudiants madrilènes.

Gagnant sa vie comme agent administratif de la compagnie de téléphone publique, le jeune homosexuel plonge tête la première dans «l'underground» madrilène, s'adonne au punk-glam-rock et, dès 1974, tourne de petits films en super 8. Son premier long métrage, «Pepi, Luci, Bom et autres filles du quartier» (1980) ressemble à un joyeux roman-photo érotique, aux héroïnes désinhibées ou en voie de l'être.

Jamais sans ses actrices fétiches

Il va tourner les 19 suivants dans son pays, retrouvant régulièrement ses actrices fétiches (Carmen Maura, Rossy de Palma, Penélope Cruz, Marisa Paredes, Victoria Abril...). Ses héroïnes sont souvent des femmes passionnées, obstinées, tenues de se réinventer pour faire face aux crises et aux rebondissements - improbables - qu'Almodovar glisse invariablement dans ses scénarios. Il est aussi l'un des premiers à peupler de transsexuels et de travestis ses œuvres à l'humanisme chaleureux et à l'esthétique kitsch, comme dans «La mauvaise éducation», certainement son film le plus personnel sur l'amitié de deux garçons dans un internat catholique dirigé d'une main de fer.

Ces cinq dernières années, Almodovar est passé d'un thriller dérangeant, «La piel que habito» à une comédie fantasque dans les airs, «Les amants passagers», puis au mélodrame pur, «Julieta», portrait d'une mère que sa fille abandonne.Pour expliquer cette nouvelle gravité, il évoque souvent sa propre vie d'homme vieillissant et solitaire, reclus avec chat et «fantasmas» (fantômes ou fantasmes en français).

Deux Oscars, aucune Palme d'or

Cinq fois en compétition officielle à Cannes, il n'a jamais reçu la Palme d'or, même si en 2006, «Volver» avait reçu le prix du meilleur scénario et celui d'interprétation collective pour l'ensemble de ses actrices. Deux de ses plus grands succès ont été récompensés par des Oscars: les mélodrames «Tout sur ma mère» et «Parle avec elle».


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