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La photo dans la peau

Tout en douceur, assise au soleil sur la terrasse de son bistrot fétiche des alentours de la gare de Lausanne, Nathalie Herschdorfer parle de son rapport à la photo. «Je me protège moi-même des images qui passent dans la presse, dit-elle. J’ai besoin de prendre de la distance. D’ailleurs, je suis une des rares à avoir loupé le 11 septembre à la télé…» La nouvelle directrice du festival de photographie Alt.+1000 à Rossinière (qui vient de se clore) publie un ouvrage poignant baptisé «Jours d’après – Quand les photographes reviennent sur les lieux du drame». 189 images réalisées par trente photographes, qu’elle a rassemblées pendant deux ans, et qu’elle commente de manière touchante. On y trouve des clichés «post-11 septembre» bien sûr, mais pas seulement. Chambres à coucher intactes de jeunes soldats tombés en Irak, prises de vues dans les forêts bosniaques dix ans après les massacres, décor rwandais du génocide, graffitis sur les murs d’un centre de torture dans le Kurdistan irakien, maisons dévastées après le cyclone Katrina en 2005… Sans oublier ces photos de familles argentines, prises trente ans après les disparitions, et mettant en lumière le vide laissé par la personne «absente».

Objets, façades, visages, paysages: chaque photo porte une charge émotionnelle phénoménale. «Le Musée de la Croix-Rouge à Genève m’avait donné carte blanche pour une expo, raconte l’historienne de l’art de 39 ans. Ce livre est né ainsi. L’évidence était de partir sur le photojournalisme, les réfugiés, les guerres, etc., mais ça ne m’intéressait pas d’exposer ces thèmes déjà traités. Et j’avais observé un nouveau courant créé par des gens qui cherchaient à travailler autrement. Depuis quinze ans, l’accès à la guerre est restreint. En même temps, la photo amateur a pris une place énorme. J’ai vu que des photographes avaient besoin de parler de ces sujets très vifs mais n’avaient pas accès aux événements.»

Emotions fortes

En commençant sa recherche, Nathlie Herschdorfer est vite submergée par la richesse du sujet. Elle décide de «partir sur un livre». Les clichés qui l’ont le plus touchée? «Ceux de la photographe roumaine Dana Popa, sur l’esclavage sexuel en Moldavie. Ces images de très jeunes filles sont poignantes. Il y a des histoires sordides… Mais ça fait du bien de voir que la photographie peut encore donner des émotions.» Elle continue aujourd’hui à recevoir des travaux: «Je pourrais publier un deuxième livre.»

Nathalie Herschdorfer a quitté le Musée de l’Elysée en 2010 après douze ans de bons et loyaux services. «Après mon départ de l’institution, je me demandais si les gens allaient continuer à me téléphoner», avoue-t-elle. Plusieurs expos en vue, un projet de dictionnaire de photographie sous le coude, des voyages hebdomadaires dans les capitales européennes… elle jongle pour son plus grand bonheur entre sa vie de famille et son travail. Un rythme effréné pour celle qui a eu envie, avec «Jours d’après», de «poser les choses. Tout va tellement vite, on a besoin de prendre le temps.»

«Jours d’après – Quand les photographes reviennent sur les lieux du drame», par Nathalie Herschdorfer, Ed. Thames & Hudson. A paraître le 6 octobre 2011.

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