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La Chine investit aussi la mode
Vendredi 2 mars 2012, après le défilé Dior, les paparazzi se bousculaient, aidés d'un trombinoscope, pour prendre en photo trois élégantes inconnues: Huo Siyan, en chapeau à plumes, Li Xiaolu et Lin Peng sont pourtant des stars à Pékin. Et les maisons de couture ne peuvent pas se permettre de négliger un pays qui, deuxième en nombre de milliardaires, représentera à l'horizon 2015 un marché du luxe de 27 milliards de dollars, soit 20% du chiffre mondial, selon le cabinet McKinsey & Co.
"C'est un pays qui est passionné par la mode, comme toutes ces nations émergentes où l'apparence est de la plus haute importance", note Didier Grumbach, président de la Fédération française de couture et de prêt-à-porter. Il participait la semaine dernière au cocktail "China in Paris", qui se tient depuis 2010 à chaque Fashion Week, pour créer des contacts entre les Chinois et la capitale de la mode. "Il y a dix ans, nous n'avions aucun Chinois dans notre industrie", dit-il.
Parmi eux, William Zhao, président du groupe COPAIS, recherche des nouveaux talents, alors qu'aujourd'hui, cinq marques européennes dominent le marché chinois: Dior, Louis Vuitton, Chanel, Gucci et Armani. "Je pense que l'industrie du luxe n'en est qu'à ses débuts en Chine. Nous visons les 10% de la population les plus riches et ces gens veulent de la nouveauté", dit-il.
"Ouvrir des portes"
Attirer les nouveaux labels ne suffit pas, la Chine veut aussi accroître la visibilité de ses créateurs dans le monde de la mode. "La Chine n'a pas d'équivalent des Japonais Yohji Yamamoto ou Issey Miyake. Ils veulent promouvoir le travail de créateurs qui pourraient devenir des marques nationales", explique M. Grumbach.
Depuis quatre saisons, Christine Zhao, organisatrice de "China in Paris", y a fait venir une demi-douzaine de créateurs chinois. "C'est pour leur ouvrir des portes, sinon ils ne savent pas comment prendre pied à Paris. Après, c'est à eux de voir s'ils veulent rester" et peuvent notamment franchir la barrière de la langue, raconte-t-elle. Jusqu'à présent, trois de ses protégés ont sauté le pas et exposent leur travail dans des showrooms parisiens. C'est le bon moment, pense Christine Zhao: "pour des raisons économiques et sociales, les gens sont très attentifs à la mode venant de Chine".
Après des années d'études à la prestigieuse Saint Martin's school et trois saisons à la Fashion Week de Londres, la créatrice de Shanghaï Masha Ma choisit de s'installer à Paris. A tout juste 30 ans, elle a été invitée cette année, pour la première fois, à rejoindre le calendrier officiel de la Fashion Week. Ma, dont le défilé est attendu mercredi, refuse de voir dans ses créations le pur fruit d'un héritage chinois, mais elle veut en revanche effacer l'image d'une Chine associée à la production de produits de faible qualité. "Je veux contribuer à changer l'idée reçue d'un +Made in China+ médiocre. Et je pense que c'est possible", dit-elle.
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