C'est votre histoire
«Ma fausse couche a été un traumatisme»
J’avais toujours imaginé ma vie avec des enfants. Lorsque j’ai rencontré celui qui allait devenir mon mari, en 1982, j’ai vite senti que c’était l’homme parfait. Très vite après notre mariage en 1986, nous avons essayé d’avoir un enfant. À l’époque, j’avais 36 ans, et mon médecin m’avait informée que tomber enceinte à mon âge me placerait dans les grossesses à risque. Les choses n’ont effectivement pas été aussi aisées qu’on le souhaitait.
Nos essais se prolongèrent pendant une période assez difficile, pleine d’incertitudes. Et puis enfin, j’ai fini par tomber enceinte. Nous étions comme sur un petit nuage durant des semaines. Nous discutions des prénoms, de la manière avec laquelle aménager la chambre du futur bébé… Mais au bout de deux mois et demi de grossesse, il y a eu ce jour horrible.
J’ai décidé de partir à l’hôpital pour un contrôle. On m’a orientée vers une échographie. Je me suis retrouvée avec un technicien un peu désinvolte, manifestement peu concerné par ma détresse.
Toutes les larmes de mon corps
Il m’a fait installer puis s’est mis à passer la machine sur mon ventre, scrutant l’écran. Je me souviens parfaitement de cet instant où il a soudain ouvert la bouche sans même me regarder. «Il n’y a plus rien.» Mon sang qui se glace. Mes yeux qui cherchent un réconfort, des réponses dans les siens. Mais il prenait tout ça à la légère. Moi, je ne m’attendais pas du tout à un tel diagnostic, posé si froidement. J’ai alors pleuré toutes les larmes de mon corps. J’étais complètement perdue.
Le technicien a semblé très surpris de ma réaction, il s’est excusé mais je n’ai pas eu droit à plus d’explications que ça. On m’a installée dans une chambre pour me remettre de mes émotions et attendre mon mari. C’était clair, notre bébé n’existait plus.
L’entourage qui se dérobe
Quelques jours plus tard, j’en ai parlé à des proches, mais là encore, l’événement n’a pas été pris comme je l’aurais souhaité. On ne me soutenait pas vraiment émotionnellement, comme si ce genre de vécu ne le nécessitait pas. On me disait des trucs du style «Tu pourras en refaire un autre». Tous ces gens ne comprenaient pas que je m’étais projetée loin avec cet enfant désiré, qu’il n’avait pas été qu’un objet abstrait de mon corps ou un simple nombre de semaines.
Alors, assez vite, on a voulu un autre enfant, malgré tout. Il nous a toutefois conseillé de retenter cela via des inséminations pour maximiser les chances de tomber enceinte.
Pendant huit mois, toutes les quatre semaines, mon mari et moi allions ainsi à l’hôpital pour ces interventions. Nous voulions enfin devenir parents. Mais tout ce temps et cette énergie n’ont rien donné. Nous avons fini par nous résigner et laisser tomber ce processus très lourd psychologiquement. C’était devenu clair, évident: nous n’aurions jamais d’enfant.
Comme une place vide à côté
Même si c’était un vrai renoncement pour moi, tout cela nous a amenés à revoir notre façon de concevoir notre vie. On a décidé de passer le cap et de nous lancer dans d’autres projets, comme acheter un appartement ensemble, créer un nid douillet juste pour nous. Je ne regrette pas d’avoir stoppé les inséminations, mais je sens toujours qu’il manque quelque chose à côté de moi.
Les jours de Fête des mères, de fêtes de famille, c’est souvent un peu dur. Avec ma sœur, qui en a eu deux, j’ai cependant pu être tante et marraine. Mais notre vie actuelle est parfaite, notre couple est très soudé. A aucun moment cette expérience n’a menacé notre amour. Au contraire, cela nous a aidés à renaître à deux de cette perte.